Fariba Adelkhah: Une chanson plutôt qu'un discours pour raconter sa détention en Iran

L'universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah (Photo, AFP).
L'universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 21 octobre 2023

Fariba Adelkhah: Une chanson plutôt qu'un discours pour raconter sa détention en Iran

  • Moins visible aujourd'hui, elle a pénétré en profondeur la société, selon des experts
  • Scènes encore inimaginables il y a un an, des femmes apparaissent désormais dévoilées dans l'espace public

PARIS: De retour en France après quatre ans et demi passés en Iran, dont une grande partie en prison, la chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkah, ex-"otage d'Etat", s'apprête vendredi à prononcer un discours. Puis elle décide subitement de le ranger et se met à chanter.

Sa voix, douce, ne tremble pas devant l'assistance médusée venue l'accueillir à Science Po, l'université parisienne où elle enseignait avant ses années de détention. Plusieurs centaines d'étudiants, professeurs et soutiens retiennent leur souffle, conscients de vivre un moment rare, magique.

A capella, Fariba Adelkhah revisite "Do panjereh" (deux fenêtres), un hit de la chanteuse Gougoush, la grande diva de la pop d'avant la Révolution islamique, qui fit son grand retour à la chanson en 2000 en Amérique du Nord, après 21 ans d'un silence imposé dans son pays.

Dans cette chanson, totalement improvisée, avoue-t-elle, il est question de "deux fenêtres encastrées dans un même mur, qui ne peuvent se tenir la main". Une histoire de vie emmurée dans une prison, élégante métaphore de sa situation personnelle passée.

Spécialiste du chiisme et de l'Iran post-révolutionnaire, Mme Adelkhah est arrêtée en 2019 puis condamnée l'année suivante à cinq ans de prison pour atteinte à la sécurité nationale, une accusation qu'elle rejette. Libérée en février, elle n'est pas autorisée à quitter l'Iran, jusqu'à mardi dernier, jour de son retour en France.

Paris a plusieurs fois utilisé le terme d'"otages d'Etat" pour désigner son cas et celui des autres Français détenus par Téhéran.

Vendredi, la sexagénaire doit donc pour la première fois s'exprimer publiquement, mais elle commence par la vocalise. Elle répond ensuite, très humblement, aux interrogations d'étudiants parfois éplorés. Sans jamais cesser de sourire.

"Ne faites pas de moi une révolutionnaire, une combattante. Je suis une chercheuse. (...) Ca faisait trente ans que je faisais ce métier quand je me suis faite arrêter", dit-elle, racontant les "nuits entières (passées) à écrire", pour "faire comprendre à mes interrogateurs que je ne suis pas ce que vous pensez, l'espionne".

Pas un mot sur le traitement qui lui a été réservé par le régime iranien en prison, un espace qu'il "ne faut pas trop embellir", selon elle.

«Immense joie»

"La taule, pour les gens qui y vivent, c’est une communauté. Une toute petite communauté. On était 40 et on est passé à 60. (...) L’espace est petit, donc très naturellement, on marche sur les plate-bandes des autres, on les gêne et cela crée des conflits."

Elle ajoute : "la vie en prison, c’est pas une vie très amicale".

Dans cette période sombre, une "immense joie" la saisit pourtant, raconte-t-elle. A partir de septembre 2022, le mouvement "Femme, vie, liberté" fait trembler le régime iranien.

Née de la mort de la jeune kurde iranienne Mahsa Amini après son arrestation par la police des moeurs pour non respect du strict code vestimentaire islamique, la contestation, dans laquelle les femmes sont en première ligne, s'exprime d'abord par des manifestations d'ampleur, violemment réprimées.

Moins visible aujourd'hui, elle a pénétré en profondeur la société, selon des experts. Scènes encore inimaginables il y a un an, des femmes apparaissent désormais dévoilées dans l'espace public, malgré les risques, le port du foulard étant un des piliers de la République islamique.

"On se faisait une joie énorme de ce qui se passait à l'extérieur", narre la chercheuse, pour qui la jeunesse iranienne, à la manoeuvre, "n'a rien à perdre" et s'avère "beaucoup plus courageuse" que la génération précédente, plus conservatrice.

La chercheuse ne dévoilera pas davantage ses sentiments, alors que quatre autres Français restent détenus en Iran.

Fariba Adelkhah incarne une "joie collective", affirme de son côté le directeur de Science po, Mathias Vicherat, qui salue sa "dimension solaire", son "humour", son "dynamisme".

"La liberté académique (...) doit devenir un vrai fondement de la démocratie", souligne-t-il à l'AFP.

Questionné sur ce tour de chant, le directeur confie sa "surprise" mais loue le "symbole".

Mme Adelkhah "chantait beaucoup pour ses codétenus. Elle était souvent convoquée pour des moments de deuil", au sein de la prison, raconte-t-il. Son chant vendredi était "sa manière d'exprimer son émotion, au-delà de phrases ou de concepts."


Le pianiste Igor Levit va donner un concert de plus de 16 heures à Londres

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
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  • Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance"
  • "Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée

LONDRES: Le pianiste Igor Levit va donner jeudi et vendredi à Londres un concert unique, prévu pour durer plus de 16 heures, en jouant en solo "Vexations" d'Erik Satie, sous la direction de l'artiste Marina Abramovic, connue pour ses performances radicales.

Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance".

"Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée. Elle se traduit ainsi par une performance durant entre 16 et 20 heures. Habituellement, plusieurs pianistes se succèdent pour jouer ce morceau sans interruption.

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19.

C'est la première fois qu'il va jouer ce morceau en intégralité en public.

Le public va être "témoin (d'un moment) de silence, d'endurance, d'immobilité et de contemplation, où le temps cesse d'exister", a commenté Marina Abramovic, artiste serbe de 78 ans. "Igor interprète +Vexations+ avec des répétitions infinies, mais une variation constante", a-t-elle ajouté.

Le rôle de Marina Abramovic, connue pour ses performances qui poussent les spectateurs dans leurs retranchements, est de "préparer le public à cette expérience unique".

Erik Satie avait lui écrit à propos du morceau à l'adresse des pianistes: "Pour jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses".

Dans une interview au quotidien britannique The Guardian, Igor Levit a encouragé son public à "se laisser aller". "C'est juste un espace vide, alors plongez dedans", a-t-il dit.

Les spectateurs pourront assister au concert soit pour une heure soit dans sa totalité. Il commencera jeudi à 10H00 (09H00 GMT).


Les Marionnettes enchantent Dubaï: une scène multilingue et inclusive pour les enfants

Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
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  • Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe
  • «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella, la fondatrice

DUBAÏ: À Dubaï, dans un paysage dominé par les écrans et les technologies dernier cri, un petit théâtre de marionnettes attire l’attention des familles en quête d’activités culturelles pour leurs enfants. Fondé par Gabriella Skaf, Les Marionnettes propose une expérience ludique, éducative et multilingue qui séduit aussi bien les enfants que leurs parents.

Une idée née d’un besoin personnel

Gabriella Skaf, franco-libanaise et ancienne juriste en droit bancaire, a quitté les salles d’audience pour donner vie à un tout autre théâtre: celui des marionnettes.

«J’ai toujours rêvé de créer quelque chose qui me ressemble, mais je n’avais pas encore trouvé la bonne idée», confie-t-elle avec sincérité.

C’est lors de vacances en France que tout a commencé: «Nous emmenions souvent nos enfants voir des spectacles de marionnettes, et ils étaient fascinés. Mon fils n’avait même pas deux ans, mais il restait captivé du début à la fin. À Dubaï, rien de tel n’existait», raconte Gabriella.

De retour aux Émirats, elle décide alors de donner vie à ce manque. «Au départ, c’était une petite idée… Puis les choses se sont enchaînées: nous avons trouvé un local, pris contact avec des marionnettistes en France, et après plusieurs mois de préparation, le théâtre a ouvert ses portes en novembre 2024.»

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Les Marionnettes propose des spectacles interactifs pour enfants en plusieurs langues (français, anglais, arabe, russe…).

Une programmation multilingue et interactive

Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe. «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella.

Le théâtre offre deux formats principaux:

  • Les spectacles de marionnettes, qui durent environ une heure avec une pause au milieu.
  • Le storytelling, plus court (30 minutes), où un animateur lit un livre, parfois accompagné de marionnettes, suivi d’une activité créative comme du bricolage, du dessin ou la fabrication de masques.

«L’objectif, c’est de rendre la lecture vivante et de faire participer les enfants. On essaie aussi de varier les langues: italien, arabe, français, russe… bientôt l’espagnol.»

Une activité éducative qui séduit les écoles

Les écoles ont rapidement adhéré au concept. «Les retours sont extrêmement positifs, confie Gabriella. Les enseignants apprécient le fait que ce soit à la fois pédagogique et ludique. Les enfants participent activement, posent des questions, interagissent avec les marionnettes… et surtout, ils gagnent en confiance.»

La différence entre les visites scolaires et familiales est notable. «À l’école, les enfants sont plus calmes, attentifs, et respectent davantage les consignes. Lorsqu’ils viennent avec leurs parents, ils se montrent plus spontanés, plus libres… mais tout aussi enthousiastes. Ce sont deux énergies différentes, et chacune a son charme.»

Les enfants sont encouragés à s’exprimer pendant les spectacles. «Les marionnettes posent des questions, les enfants répondent. Même les plus timides finissent par participer.»

Un message fort autour de l’inclusion

Le 30 avril, Les Marionnettes lancera un spectacle inédit en partenariat avec Sanad Village, une organisation qui accompagne les enfants à besoins spécifiques. «C’est une histoire sur l’inclusion. Le but, c’est d’apprendre aux enfants à accepter les différences, à être gentils et ouverts aux autres», explique Gabriella.

Le spectacle sera présenté en anglais, en français et en arabe, et proposé aux écoles ainsi qu’au grand public.  C’est un sujet important. On veut que les enfants comprennent qu’il ne faut pas avoir peur de ce qui est différent.»

Une ambition régionale

L’objectif de Gabriella ne s’arrête pas à Dubaï. «On aimerait bien développer le concept dans d’autres pays de la région: Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Liban. Il existe un véritable besoin pour ce type d’activité culturelle.»

Pour rendre le projet plus mobile, un théâtre itinérant est en préparation. «On pourra l’emmener dans les écoles, dans d’autres villes, et même l’utiliser pour des événements privés ou des anniversaires.»

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Gabriella Skaf - Fondatrice, Les Marionnettes. (photo: fournie)

Une programmation à découvrir en famille

Les spectacles ont lieu les week-ends – vendredi, samedi et dimanche – tandis que les séances de storytelling se déroulent en semaine. Une activité pour les tout-petits, appelée «Bright Minds», est aussi proposée le lundi matin.

«Le programme change chaque mois et on publie les détails chaque semaine sur notre site et nos réseaux sociaux. Les gens peuvent réserver en ligne ou acheter leurs billets sur place», précise Gabriella.

Prochaine étape: un club de lecture pour enfants, des ateliers théâtre et même des cours pour apprendre à créer ses propres marionnettes.


Les îles Farasan célèbrent l'arrivée annuelle du hareng

Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
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  • Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.
  • Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

RIYAD : Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.

Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

Reconnaissable à son bec de perroquet et à ses couleurs vives, le harid prospère dans les habitats riches en coraux, avec plus de 90 espèces, chacune ayant des formes et des couleurs uniques.

Farasan, un groupe d'îles coralliennes situées à 40 km de la côte de Jazan, devient le site de cet événement naturel lorsque de vastes bancs de poissons harid se rassemblent, selon l'agence de presse saoudienne. 

Les habitants peuvent prédire l'arrivée du poisson grâce à une odeur distincte qui se dégage de la mer après le coucher du soleil, le 15^e jour du mois lunaire.

La pêche annuelle au harid, célébrée à la fin du mois d'avril, est une tradition qui reflète l'héritage culturel des îles et qui fait la joie des habitants des îles Farasan depuis des siècles.

Reconnaissant l'importance culturelle et touristique de cette pêche, le prince Mohammed bin Nasser, gouverneur de Jazan, a inauguré le premier festival du harid des îles Farasan en 2005.

La 21^e édition du festival a été lancée lundi, mettant en avant les îles comme une destination prometteuse pour les touristes et les investisseurs. 

Le festival met en avant les coutumes, les traditions, les jeux folkloriques, l'artisanat et les sites historiques uniques de Farasan, tout en présentant l'artisanat local, comme les pièges à pêche, le tissage de palmiers, la création de sacs et de tapis, ainsi que le tricotage de chapeaux. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com