Face à l'augmentation mondiale des déplacements forcés, l’unité est cruciale

Une augmentation significative des déplacements forcés et de la migration à l'échelle mondiale a donné lieu à des discussions majeures dans divers pays et régions, notamment au sein de l'Union européenne et aux États-Unis.

Au cours du dernier mois, plus de 127 000 migrants sont arrivés en Italie par voie maritime. Ce chiffre représentant quasiment le double de celui enregistré pour la même période l'année précédente. Cette augmentation du nombre de migrants et de demandeurs d'asile a engendré des clivages profonds parmi les partis et les sphères politiques de plusieurs nations européennes. À titre d’exemple, le gouvernement néerlandais s'est effondré en juillet en raison de son incapacité à parvenir à un consensus sur la question de l'immigration. Le Premier ministre Mark Rutte, à la tête du Parti populaire pour la liberté et la démocratie, de tendance conservatrice, avait tenté de restreindre l'afflux de demandeurs d'asile aux Pays-Bas. Lors d'une conférence de presse télévisée, il a souligné: «Les divergences au sein de la coalition en matière de politique d'immigration sont un secret de polichinelle. Malheureusement, nous devons désormais nous rendre à l’évidence que ces divergences se sont révélées insurmontables. Par conséquent, je vais présenter la démission de l'ensemble du gouvernement au roi.»

En ce qui concerne la politique d'immigration, si les divisions dans les positions politiques des dirigeants européens continuent de se creuser, la situation pourrait bien évoluer de la même manière qu’aux États-Unis, où l’écart entre les partis politiques sur cette question cruciale est devenu trop profond pour être comblé. Cela rendrait extrêmement complexe l'adoption de lois, la mise en place de politiques éclairées ou la réalisation de réformes substantielles nécessaires pour faire face efficacement à la crise. En d'autres termes, cela entraînerait une impasse totale.

Les États membres de l’UE peuvent travailler ensemble dans le cadre du bloc afin de lutter plus efficacement contre l’augmentation des migrations

Majid Rafizadeh

La démarche essentielle pour répondre à cette problématique humanitaire d'envergure mondiale est l'unité. En ce qui concerne l'Union européenne, les États membres peuvent collaborer au sein du cadre de l'Union afin de relever de manière plus efficace le défi croissant des migrations. Cette lourde responsabilité devrait être partagée entre les membres de l'UE pour éviter que certains pays ne portent le fardeau prépondérant de l'augmentation des flux migratoires.

Cette approche facilitera également le processus d'enregistrement et d'intégration des arrivants, tout en allégeant la charge des nations qui reçoivent un grand nombre de migrants par rapport à d'autres. L'afflux massif de personnes peut avoir un impact significatif sur les aspects sociaux, économiques, politiques, voire environnementaux des pays d'accueil. En effet, si les pays hôtes ne sont pas préparés à cette situation, ils risquent de subir des pressions économiques et politiques.

Même si les migrants s'installent avec succès dans un nouveau pays, ils se heurtent à d'importants défis supplémentaires, notamment les barrières linguistiques, les difficultés d'accès aux soins de santé et aux médicaments, la recherche de logements appropriés, l'adaptation à de nouvelles cultures, règles et normes, la recherche d'emplois, ainsi que la discrimination et le racisme. En d'autres termes, des problèmes surgissent lorsque les pays d'accueil ne disposent pas des ressources nécessaires et ne sont pas prêts sur les plans économique et social pour gérer un afflux massif de population.

Pourtant, il est encourageant de constater que la semaine dernière, l'Union européenne a pu parvenir à un accord sur la question de l'immigration. Fernando Grande-Marlaska Gomez, le ministre espagnol de l'Intérieur par intérim, a déclaré : «Nous avons fait un énorme pas en avant sur une question critique pour l'avenir de l'UE. Grâce à l'accord conclu aujourd'hui, nous sommes désormais mieux positionnés pour aboutir à un accord global sur l’ensemble du pacte relatif à l'asile et aux migrations avec le Parlement européen d'ici la fin de ce semestre.» De même, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a affirmé : «Il s'agit d'une avancée commune, rendant la solidarité entre les États membres obligatoire en cas de crise.»

Une autre problématique essentielle réside dans la sensibilisation de la société à la situation des personnes déplacées de force. Il est impératif de mettre en lumière le courage et la détermination requis pour fuir son domicile à la recherche d’un endroit sûr pour sa famille, en particulier lorsque des enfants et des personnes âgées sont impliquées.

Même lorsque les migrants s’installent avec succès dans un nouveau pays, ils sont confrontés à d’importants défis supplémentaires

Majid Rafizadeh

Être contraint d'abandonner le lieu où l'on a vécu, étudié et grandi, être forcé de laisser derrière soi amis et proches pour commencer une nouvelle vie dans un endroit étranger est une épreuve profondément traumatisante. Pour survivre et s'épanouir dans un nouveau foyer, il faut faire preuve d'un courage, d'une foi et d'une force extraordinaires.

Plusieurs raisons sous-jacentes poussent les individus à fuir leur domicile. Les facteurs les plus prédominants sont la violence, les conflits, la guerre et la crainte de persécution.

Toutefois, bien que l'UE et les États-Unis aient connu une augmentation des flux migratoires cette année, il est important de souligner que la grande majorité des personnes qui fuient leur pays pour trouver refuge ailleurs (environ 85 %) sont accueillies par des pays en développement.

C'est la raison pour laquelle il est essentiel que les pays nantis offrent leur soutien. Grâce à des investissements judicieux et à une intégration réussie, les migrants peuvent devenir un atout qui stimule l'économie du pays hôte et favorise la productivité. Comme l'a souligné Amnesty International : «Les pays prospères ne font pas assez pour partager les coûts liés à la protection de ceux qui ont tout laissé derrière eux. Les appels à l'aide humanitaire en faveur des réfugiés sont systématiquement, et souvent considérablement, sous-financés. En résumé, le monde a besoin de toute urgence d'un nouveau plan global basé sur une véritable coopération internationale et une répartition significative et équitable des responsabilités.»

En somme, les déplacements forcés et les migrations sont désormais une crise mondiale. C'est pourquoi il est impératif que la communauté internationale œuvre dans l'unité et la solidarité pour faire face à cette augmentation des déplacements forcés et des migrations, tout en veillant à ce que les besoins humanitaires fondamentaux de chacun, particulièrement des femmes et des enfants, soient comblés.

Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. 

X: @Dr_Rafizadeh

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com