Blinken arrive en Israël pour une visite de solidarité après l'offensive du Hamas

Le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen accueille le secrétaire d'État Antony Blinken à son arrivée à l'aéroport Ben Gourion de Tel Aviv après une attaque sans précédent perpétrée par des militants du Hamas. (Reuters)
Le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen accueille le secrétaire d'État Antony Blinken à son arrivée à l'aéroport Ben Gourion de Tel Aviv après une attaque sans précédent perpétrée par des militants du Hamas. (Reuters)
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Publié le Jeudi 12 octobre 2023

Blinken arrive en Israël pour une visite de solidarité après l'offensive du Hamas

  • Israël a juré "d'écraser" le mouvement islamiste palestinien, laissant présager une offensive terrestre dans la bande de Gaza contre le Hamas, qui a lancé le 7 octobre une attaque sanglante
  • Il doit rencontrer le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, dont le pays est un proche allié des Etats-Unis

TEL-AVIV: Le Hamas a de nouveau échangé des tirs jeudi avec Israël, où le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, est venu soutenir l'allié de Washington mais aussi appeler à la retenue pour protéger les civils palestiniens, la guerre ayant déjà fait des milliers de morts.

Israël a juré "d'écraser" le mouvement islamiste palestinien, laissant présager une offensive terrestre dans la bande de Gaza contre le Hamas, qui a lancé le 7 octobre une attaque sanglante, d'une ampleur sans précédent sur le territoire israélien et détient depuis 150 otages.

Environ 1.200 Israéliens, pour la plupart des civils, ont été tués dans cette attaque, et 1.354 Palestiniens selon les autorités locales, dont de nombreux civils, sont morts en six jours dans la bande de Gaza, où les frappes israéliennes ont transformé en ruines des immeubles entiers.

"Tout membre du Hamas est un homme mort", a lancé mercredi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu face au pays traumatisé, comparant le Hamas au groupe jihadiste Etat islamique, promettant de "l'écraser et le détruire".

L'objectif est la "liquidation" du gouvernement du Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, a affirmé jeudi un porte-parole de l'armée. Il a expliqué que l'armée se préparait à une "manœuvre terrestre", mais que rien "n'a encore été décidé".

Israël se prépare à une manoeuvre terrestre à Gaza mais rien n'a été décidé, selon l'armée

L'armée israélienne se prépare à une manoeuvre terrestre sur la bande de Gaza mais rien n'a encore été décidé, a déclaré jeudi un porte-parole militaire, au sixième jour de la guerre déclenchée par les attaques sans précédent du Hamas contre Israël.

"Ca pourrait être par voie aérienne, ça pourrait être conjointement à partir de la mer et des airs. Nous attendons de voir ce que nos responsables politiques décident éventuellement au sol (mais) cela n'a pas encore été décidé", a déclaré le lieutenant-colonel Richard Hecht lors d'une conférence de presse en ligne.

"A cet instant précis, nous nous concentrons sur leur hauts dirigeants, non pas seulement la direction militaire, mais aussi leurs responsables gouvernementaux jusqu'à (Yahya) Sinouar (le chef du Hamas à Gaza, NDLR). Ils sont directement impliqués", dans l'attaque meurtrière de samedi qui a provoqué la stupéfaction en Israël et bien au-delà par sa brutalité, a encore dit le lieutenant-colonel Richard Hecht.

L'objectif de l'armée est la "liquidation" du gouvernement du mouvement islamiste Hamas, au pouvoir depuis 2007 dans la bande de Gaza, a-t-il ajouté.

L'armée a déployé des dizaines de milliers de soldats à la frontière avec l'enclave palestinienne, tout en poursuivant les bombardements visant les infrastructures, les commandants et les centres d'opérations du Hamas, selon l'armée.

Les frappes aériennes ont été déclenchées en réponse à un assaut aérien, terrestre et maritime surprise lancé samedi par des combattants du Hamas, qui a fait plus de 1.200 morts en Israël.

Jusqu'ici, le Hamas a tiré plus de 5.000 roquettes sur Israël, selon l'armée. Les bombardements de l'armée israéliennes ont fait au moins 1.354 morts dans la bande de

Gaza, selon un dernier bilan des autorités du Hamas.

"Nous nous préparons pour les prochaines étapes de la guerre, nous élaborons des plans d'urgence opérationnels multiples", a ajouté M. Hecht.

Lors d'une conférence de presse séparée, le porte-parole en chef de l'armée, Daniel Hagari, a réitéré les objectifs militaires contre les islamistes.

"Nous écrasons la capacité du Hamas à fonctionner en tant que souverain. Il ne parvient déjà plus à diriger Gaza dans certaines zones", a-t-il dit.

Jeudi, Israël et le Hamas ont échangé de nouveaux tirs, des journalistes de l'AFP ayant été témoins de plusieurs frappes aériennes visant deux camps de réfugiés palestiniens dans la bande de Gaza. "Quiconque s'approche de la clôture (séparant Israël de Gaza, ndlr) sera tué", a déclaré M. Hagari.

Israël a également imposé un "siège complet" au territoire palestinien, coupant l'électricité, l'eau et le carburant à Gaza.

Le ministre israélien de l'Energie, Israël Katz, a indiqué jeudi que son pays n'autoriserait pas l'entrée de produits de première nécessité ou d'aide humanitaire à Gaza tant que le Hamas n'aura pas libéré les personnes enlevées samedi en Israël. Environ 150 Israéliens, étrangers et binationaux ont été pris en otage par le Hamas, selon le gouvernement israélien.

Durant la nuit, Israël a de nouveau pilonné la bande de Gaza, d'où sont parties plusieurs salves de roquettes vers le sud du pays puis vers Tel-Aviv. Le Hamas a affirmé riposter à des frappes ayant ciblé "des civils" dans deux camps de réfugiés de la bande de Gaza.

Des correspondants de l'AFP ont été témoins de dizaines de frappes aériennes en direction du camp d'Al-Shati et dans le nord de Gaza.

Grand allié d'Israël, le président américain Joe Biden avait toutefois demandé au pays de respecter "le droit de la guerre" dans sa riposte.

"Nous sommes déterminés à nous assurer qu'Israël obtienne tout ce dont il a besoin pour se défendre", avait déclaré avant son arrivée Antony Blinken, alors que Washington a déjà fourni une aide militaire supplémentaire à son allié.

M. Blinken doit aussi rencontrer vendredi en Jordanie le roi Abdallah II et le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.

Elan de solidarité

Le 7 octobre à l'aube, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, et au dernier jour des fêtes de Souccot, des centaines de combattants du Hamas avaient infiltré Israël depuis la bande de Gaza à bord de véhicules, par les airs et la mer, semant la terreur sous un déluge de roquettes.

Dans les rues, dans les maisons, faisant même irruption dans un festival de musique, ils ont tué plus d'un millier de civils lors de cette attaque d'une violence extrême et d'une ampleur inédite depuis la création d'Israël en 1948.

Israël a riposté en déclarant une guerre pour détruire les capacités du Hamas, pilonnant sans relâche la bande de Gaza et déployant des dizaines de milliers de soldats autour du territoire, dans le sud du pays, et à sa frontière nord avec le Liban, où les échanges de tirs sont fréquents avec le Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas.

Après l'attaque, l'armée a affirmé avoir récupéré les corps de 1.500 combattants du Hamas qui s'étaient infiltrés dans plusieurs localités du sud du pays.

L'offensive du Hamas a déclenché un immense élan de solidarité. "Tout le monde est touché en Israël, au nord, au sud, à Tel-Aviv", confie Joanna Ouisman, une femme de 38 ans cadre dans la finance, en déposant deux énormes sacs remplis de livres pour enfants dans un centre commercial de Tel-Aviv. "Personne", dit-elle, "ne peut assister à cette barbarie et demeurer indifférent".

Les otages menacés

A l'entrée du kibboutz Beeri, à moins de cinq kilomètres de la frontière avec Gaza, une pile de cadavres témoigne de l'ampleur de l'attaque où plus d'une centaine d'habitants ont été tués, selon l'armée.

"La dévastation ici est absolument immense", se désole Doron Spielman, porte-parole de l'armée israélienne. "Et c'est sans compter les nombreux membres du kibboutz qui ont été pris en otage et emmenés dans Gaza", a renchéri un autre porte-parole, Jonathan Cornicus.

Lors de cette offensive, le Hamas a enlevé plusieurs dizaines d'otages israéliens, étrangers et binationaux, qu'il menace d'exécuter.

Le ministre israélien de l'Energie, Israël Katz, a affirmé jeudi que son pays n'autoriserait pas l'entrée de produits de première nécessité ou d'aide humanitaire à Gaza, placée en état de siège, tant que le Hamas n'aurait pas libéré les otages.

"Aucun interrupteur électrique ne sera allumé, aucun robinet d'eau ne sera ouvert et aucun camion de carburant n'entrera tant que les Israéliens enlevés ne seront pas rentrés chez eux", a-t-il dit.

Les autorités israéliennes recensent 150 otages, alors que des centaines de personnes sont encore portées disparues et des corps en cours d'identification.

Parmi ces otages figurent des jeunes capturés pendant un festival de musique où des combattants palestiniens ont fait irruption samedi, tuant 270 personnes d'après les autorités.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a indiqué jeudi qu'il était en contact avec le Hamas pour œuvrer à la libération des otages.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a lui aussi lancé un processus de négociations avec l'organisation islamiste, selon une source officielle.

La bande de Gaza, un territoire pauvre et exigu où s'entassent 2,4 millions de Palestiniens qui subissent un blocus terrestre, aérien et maritime depuis 2007, est désormais privée d'approvisionnements en eau, en électricité et en nourriture, coupés par Israël.

L'unique centrale électrique du territoire est à l'arrêt, faute de carburant.

Fabrizio Carboni, le directeur régional du CICR pour la région Proche et Moyen-Orient, a demandé aux deux camps de "réduire les souffrances des civils", notamment dans la bande de Gaza.

"Sans électricité, les hôpitaux risquent de se transformer en morgues", a-t-il affirmé, disant craindre notamment pour les nouveaux-nés placés dans des incubateurs et les patients sous oxygène ou sous dialyse.

«Une apocalypse»

A Gaza, où plus de 338.000 personnes ont été déplacées par les frappes, selon l'ONU, les bombardements ont touché des dizaines d'immeubles, des usines, des mosquées et des magasins, d'après le Hamas.

"C'est comme une apocalypse ou un tremblement de terre", les Israéliens "sont venus pour détruire, comme si ces gens ne méritaient pas de vivre. Comme s'ils n'étaient pas des humains", a affirmé au milieu des ruines un habitant du quartier de Karama à Gaza.

Les concentrations de troupes à la frontière font craindre une offensive terrestre sur le territoire, dont Israël s'était retiré unilatéralement en 2005 et qui est gouverné par le Hamas depuis 2007.

Une perspective terrifiante de combats au cœur d'une ville à l'extrême densité de population, dans des souterrains et en présence d'otages.

"Quand on rentre dans Gaza, on ne sait jamais dans quel état on en ressortira", affirme à l'AFP le commentateur politique Akiva Eldar.

Plusieurs dizaines d'experts indépendants de l'ONU ont condamné jeudi les "crimes horribles" du Hamas en Israël, mais également la riposte dénoncée comme "une punition collective" de Gaza.

Le président iranien Ebrahim Raïssi a appelé les "pays musulmans et arabes" à "se coordonner" pour "stopper les crimes" d'Israël contre Gaza. L'Iran soutient financièrement et militairement le Hamas, mais insiste sur le fait qu'il n'est pas impliqué dans l'attaque du 7 octobre.


Le Parlement libanais approuve un projet de loi sur le secret bancaire

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
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  • La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise
  • Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière

BEYROUTH: Le Parlement libanais a approuvé jeudi un projet de loi sur la levée du secret bancaire, une réforme clé réclamée par le Fonds monétaire international (FMI), au moment où des responsables libanais rencontrent à Washington des représentants des institutions financières mondiales.

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise imputée à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a désormais besoin de fonds pour la reconstruction.

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière.

Ces organismes pourront avoir accès à des informations telles que les noms des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

Le Liban applique depuis longtemps des règles strictes en matière de confidentialité des comptes bancaires, ce qui, selon les critiques, rend le pays vulnérable au blanchiment d'argent.

En adoptant ce texte, le gouvernement avait précisé qu'il s'appliquerait de manière rétroactive pendant 10 ans. Il couvrira donc le début de la crise économique, lorsque les banquiers ont été accusés d'aider certaines personnalités à transférer d'importantes sommes à l'étranger.

Le feu vert du Parlement coïncide avec une visite à Washington des ministres des Finances, Yassine Jaber, et de l'Economie, Amer Bisat, ainsi que du nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid, pour des réunions avec la Banque mondiale et le FMI.

M. Jaber a estimé cette semaine que l'adoption des amendements donnerait un "coup de pouce" à la délégation libanaise.

En avril 2022, le Liban et le FMI ont conclu un accord sous conditions pour un programme de prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord avec Beyrouth après des discussions avec M. Jaber. Le nouveau gouvernement libanais s'est engagé à mettre en oeuvre d'autres réformes et a également approuvé le 12 avril un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.


Syrie: Londres lève ses sanctions contre les ministères de la Défense et de l'Intérieur

Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
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  • "Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor
  • Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier

LONDRES: Le Royaume-Uni a annoncé jeudi avoir levé ses sanctions contre les ministères syriens de l'Intérieur et de la Défense ainsi que contre des agences de renseignement, qui avaient été imposées sous le régime de Bachar al-Assad.

"Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor.

Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier.

Ces autorités, issues de groupes rebelles islamistes, ont pris le pouvoir le 8 décembre.

Le Royaume-Uni avait début mars déjà levé des sanctions à l'égard de 24 entités syriennes ou liées à la Syrie, dont la Banque centrale.

Plus de trois cents individus restent toutefois soumis à des gels d'avoirs dans ce cadre, ainsi qu'une quarantaine d'entités, selon le communiqué du Trésor.

Les nouvelles autorités syriennes appellent depuis la chute d'Assad en décembre dernier à une levée totale des sanctions pour relancer l'économie et reconstruire le pays, ravagé après 14 années de guerre civile.


1983 – L'attaque contre les Marines américains à Beyrouth

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  • Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines
  • Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang

BEYROUTH: Le 23 octobre 1983, aux alentours de 6h25, une violente déflagration secoue Beyrouth et sa banlieue, jusque dans les hauteurs montagneuses. Le souffle, sourd et diffus, fait d’abord penser à un tremblement de terre.

Mais sept minutes plus tard, une seconde explosion, bien plus puissante, déchire la ville et ses environs, dissipant toute confusion: Beyrouth venait de vivre l’un des attentats les plus meurtriers de son histoire.

Je travaillais alors pour le journal libanais As-Safir en tant que correspondant de guerre. Beyrouth était assiégée, dans sa banlieue sud, dans les montagnes et dans la région du Kharoub, par des affrontements entre le Parti socialiste progressiste et ses alliés d'une part, et les Forces libanaises d'autre part, dans ce que l'on appelait la «guerre des montagnes».

Le sud du pays a également été le théâtre de la résistance armée des combattants libanais contre l'occupation israélienne. Ces combattants étaient liés à des partis de gauche et, auparavant, à des factions palestiniennes.

Des forces multinationales, notamment américaines, françaises et italiennes, avaient été stationnées à Beyrouth après le retrait des dirigeants et des forces de l'Organisation de libération de la Palestine, à la suite de l'agression israélienne contre le Liban et de l'occupation de Beyrouth en 1982.

Quelques minutes après les explosions, la réalité s’impose avec brutalité: le quartier général des Marines américains, situé sur la route de l’aéroport de Beyrouth, ainsi que la base du contingent français dans le quartier de Jnah, ont été ciblés par deux attaques-suicides coordonnées.

Les assaillants, non identifiés, ont lancé des camions piégés – chargés de plusieurs tonnes d’explosifs – contre les deux sites pourtant fortement sécurisés, provoquant un carnage sans précédent.

Comment nous l'avons écrit

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Au lendemain des attentats, Arab News faisait état de 120 morts parmi les Marines et de 20 morts parmi les Français, un chiffre nettement inférieur au décompte final.

L'attaque de la base américaine a tué 241 militaires américains – 220 Marines, 18 marins et trois soldats – et en a blessé des dizaines. Le bombardement du site militaire français a tué 58 parachutistes français et plus de 25 Libanais.

Ces attentats étaient les deuxièmes du genre à Beyrouth; un kamikaze avait pris pour cible l'ambassade des États-Unis à Aïn el-Mreisseh six mois plus tôt, le 18 avril, tuant 63 personnes, dont 17 Américains et 35 Libanais.

Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines. Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang, des morceaux de corps et de la confusion. Voici ce que nous, journalistes, avons pu voir au milieu du chaos qui régnait immédiatement après la catastrophe, et ce qui reste gravé dans ma mémoire plus de 40 ans plus tard.

La nuit précédente, un samedi, les Marines avaient fait la fête, divertis par un groupe de musique qui avait fait le voyage depuis les États-Unis pour se produire devant eux. La plupart dormaient encore lorsque la bombe a explosé.

Aucun groupe n'a revendiqué les attentats ce jour-là, mais quelques jours plus tard, As-Safir a publié une déclaration qu'il avait reçue et dans laquelle le «Mouvement de la révolution islamique» déclare en être responsable.

Environ 48 heures après l’attentat, les autorités américaines pointent du doigt le mouvement Amal, ainsi qu’une faction dissidente dirigée par Hussein al-Moussawi, connue sous le nom d’Amal islamique, comme étant à l’origine de l’attaque.

Selon la presse locale de l’époque, la planification de l’attentat aurait eu lieu à Baalbeck, dans la région de la Békaa, tandis que le camion utilisé aurait été aperçu garé devant l’un des bureaux du mouvement Amal.

Le vice-président américain, George H.W. Bush, s'est rendu au Liban le lendemain de l'attentat et a déclaré: «Nous ne permettrons pas au terrorisme de dicter ou de modifier notre politique étrangère.»

La Syrie, l'Iran et le mouvement Amal ont nié toute implication dans les deux attentats.

En riposte à l’attaque visant leurs soldats, les autorités françaises ont lancé une opération militaire d’envergure: huit avions de chasse ont bombardé la caserne Cheikh Abdallah à Baalbeck, que Paris considérait comme un bastion de présences iraniennes.

À l’époque, les autorités françaises ont affirmé que les frappes avaient fait environ 200 morts.

Un responsable de l'Amal islamique a nié que l'Iran disposait d'un complexe dans la région de Baalbeck. Toutefois, il a reconnu le lien idéologique fort unissant son groupe à Téhéran, déclarant: «L’association de notre mouvement avec la révolution islamique en Iran est celle d’un peuple avec son guide. Et nous nous défendons.»

Le 23 novembre, le cabinet libanais a décidé de rompre les relations avec l'Iran et la Libye. Le ministre libanais des Affaires étrangères, Elie Salem, a déclaré que la décision «a été prise après que l'Iran et la Libye ont admis qu'ils avaient des forces dans la Békaa».

Un rapport d'As-Safir cite une source diplomatique: «Les relations avec l'Iran se sont détériorées en raison des interventions, pratiques et activités illégales qu'il a menées sur la scène libanaise, malgré de nombreux avertissements.»

Les attentats du 23 octobre étaient jusqu'alors le signe le plus évident de l'évolution de l'équilibre des forces régionales et internationales au Liban et de l'émergence d'un rôle iranien de plus en plus important dans la guerre civile.

Le chercheur Walid Noueihed m'a expliqué qu'avant 1982, Beyrouth avait accueilli toutes les formes d'opposition, y compris l'élite éduquée, appelée «opposition de velours», et l'opposition armée, dont les membres étaient formés dans des camps ou des centres d'entraînement palestiniens dans la vallée de la Békaa et au Liban-Sud.

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Vue aérienne de l'ambassade américaine à Beyrouth après l'explosion qui a fait 63 morts, dont 46 Libanais et 17 Américains. (AFP)

Il a indiqué que l'opposition iranienne au chah était présente parmi ces groupes et a décrit Beyrouth comme une oasis pour les mouvements d'opposition jusqu'en 1982. Toutefois, cette dynamique a changé lorsqu'Israël a envahi le Liban et assiégé Beyrouth, ce qui a entraîné le départ de l'OLP en vertu d'un accord international qui exigeait en échange qu'Israël s'abstienne de pénétrer dans Beyrouth.

Si les factions palestiniennes ont quitté le Liban, ce n'est pas le cas des combattants libanais associés à l'OLP, pour la plupart des chiites qui constituaient la base des partis de gauche libanais.

Les attaques contre les bases militaires américaines et françaises ont entraîné le retrait des forces internationales du Liban, explique M. Noueihed, laissant une fois de plus Beyrouth sans protection. Les opérations de résistance se sont multipliées, influencées par des idéologies distinctes de celles de la gauche traditionnelle, des groupes comme l'Amal islamique affichant ouvertement des slogans prônant la confrontation avec Israël.

En 1985, le Hezbollah est officiellement créé en tant qu'«organisation djihadiste menant une révolution pour une république islamique». Il s'est attiré le soutien des partis de gauche libanais et palestiniens, en particulier après l'effondrement de l'Union soviétique.

Selon M. Noueihed, l'émergence du Hezbollah a coïncidé avec le déclin des symboles existants de la résistance nationale, ce qui semble indiquer une intention d'exclure toutes les autres forces du pays du mouvement de résistance, laissant le Hezbollah comme parti dominant.

L'influence iranienne au Liban est devenue évidente lors des violents affrontements entre le Hezbollah et Amal, qui ont fait des dizaines de victimes et se sont terminés par la consolidation du contrôle du Hezbollah au milieu de la présence des forces militaires syriennes.

Beyrouth se vide peu à peu de son élite intellectuelle, a souligné M. Noueihed. Des centaines d’écrivains, d’intellectuels, de chercheurs et de professionnels des médias ont fui vers l’Europe, redoutant pour leur sécurité, laissant derrière eux une ville désertée par ceux qui faisaient autrefois vibrer sa vie culturelle et académique.

Najia Houssari est rédactrice pour Arab News, basée à Beyrouth. Elle était correspondante de guerre pour le journal libanais As-Safir au moment du bombardement de la caserne des Marines américains.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com