KHARKIV: Le président ukrainien estime que la Russie va bientôt chercher comme l'an dernier à "détruire" les installations électriques de son pays où une frappe russe a provoqué vendredi dans le nord-est la mort d'un enfant de 10 ans, au lendemain de l'une des attaques les plus meurtrières de la guerre pour les civils.
"Cet hiver, les terroristes russes tenteront à nouveau de détruire notre système électrique", a mis en garde dans la soirée Volodymyr Zelensky, qui avait affirmé la veille avoir reçu des "accords clairs" des Européens pour obtenir de nouveaux systèmes de défense antiaérienne, que Kiev réclame depuis des mois.
Fin 2022, les forces russes avaient systématiquement bombardé pendant des mois les infrastructures essentielles de l'Ukraine, causant des coupures massives de courant qui avaient plongé des millions de personnes dans le froid et le noir.
Vendredi, à la suite d'une frappe sur Kharkiv, "le corps d'un enfant de 10 ans a été retrouvé dans les décombres", a de son côté annoncé le ministre ukrainien de l'Intérieur Igor Klymenko, ajoutant que sa grand-mère avait également péri.
Le gouverneur régional, Oleg Synegoubov, a quant à lui fait état d'au moins 28 blessés, dont un bébé de onze mois membre de la famille des deux personnes tuées.
Deux immeubles ont été endommagés et un bâtiment d'habitation de trois étages a été détruit, la police expliquant que deux missiles balistiques Iskander ont atteint ces édifices.
Un photographe de l'AFP a vu ce qui semble être le fragment de l'un de ces engins au fond d'un gros cratère creusé dans une rue du centre-ville. De nombreux débris jonchent les artères où des véhicules civils sont renversés ou calcinés.
Un corps sans tête
Plus tard, M. Synegoubov a déclaré qu'un immeuble résidentiel avait été bombardé à Vovchansk, une cité proche de la frontière russe que les militaires ukrainiens ont reprise il y a un an. Un homme âgé a subi de "graves brûlures" et deux femmes ont été blessées.
La veille, au moins 52 personnes, dont un enfant de six ans, avaient été tuées dans la région de Kharkiv, dans le bombardement en plein jour du village de Groza, selon un nouveau bilan du gouverneur.
Un magasin et un café situés dans le même bâtiment et où se trouvaient une soixantaine de personnes avaient été réduits en ruines.
Vendredi matin, des pompiers déblayaient les gravats, armés de pelles et de pelleteuses.
Dans le cimetière à l'entrée du village, Oleksiï est présent avec des membres de sa famille pour délimiter l'emplacement des tombes où seront inhumés son frère et sa belle-soeur, qui ont perdu la vie dans la frappe.
"Je ne sais pas quand on pourra les enterrer. Le corps de mon frère était entier mais celui de sa femme n'avait pas de tête", dit-il à l'AFP.
Dans une allée, la sépulture du soldat Andriï Kozyr est couverte de fleurs et surmontée d'un drapeau ukrainien.
Les habitants qui avaient participé à ses obsèques s'étaient rassemblés dans le café qui a été pulvérisé.
"Tous ceux qui étaient aux funérailles sont morts. Ça s'est passé juste après que les gens sont rentrés dans le café", raconte Valentina Koziïenko, 73 ans, qui habite en face.
Et de s'interroger : "Comment les Russes ont-ils su qu'il y avait autant de gens là ? Peut-être que quelqu'un leur a dit".
«Crimes de guerre»
La frappe sur Groza a été dénoncée par la communauté internationale, qui a appelé à cesser les attaques contre les civils.
Selon l'ONU, "tout porte à croire" que c'est bien un missile russe qui a frappé ce village de 330 âmes avant le drame.
Interrogé sur l'attaque, le Kremlin a affirmé vendredi ne frapper que des "cibles militaires".
Pour le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba, ces "atrocités prouvent que le soutien mondial à l'Ukraine doit être maintenu et renforcé". "L'affaiblir ne ferait qu'entraîner davantage de crimes de guerre de ce type", a-t-il averti vendredi.
La question de l'aide à l'Ukraine est brûlante : en raison d'une crise politique à Washington, le flot de fonds et d'armes en provenance des Etats-Unis pourrait se tarir.
Essaims de drones
L'armée russe a en outre envoyé dans la nuit de jeudi à vendredi de nouveaux essaims de drones d'attaque pour frapper le centre, le nord-est et le sud de l'Ukraine.
Les Ukrainiens ont affirmé avoir abattu 25 de ces 33 Shahed 131/136 de fabrication iranienne.
Le gouverneur de la région d'Odessa (sud), Oleg Kiper, a dit que des drones avaient endommagé un grenier à grains dans le port d'Izmaïl et mis le feu à neuf camions.
Ce port du Danube, régulièrement visé par les Russes, est important pour l'Ukraine car il sert aux exportations de produits agricoles, notamment de blé.
La Russie procède toutes les nuits à des frappes contre l'Ukraine, usant de drones et de missiles.