Syrie: Face à la pauvreté, les parents doivent choisir entre scolariser leurs enfants et la survie

Certains jeunes n'ont d'autre choix que de travailler pour gagner de l'argent et aider leur famille (Photo, AFP).
Certains jeunes n'ont d'autre choix que de travailler pour gagner de l'argent et aider leur famille (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mercredi 04 octobre 2023

Syrie: Face à la pauvreté, les parents doivent choisir entre scolariser leurs enfants et la survie

  • L'effondrement économique a rendu les manuels scolaires, les uniformes et les articles de papeterie inabordables pour de nombreux ménages pauvres
  • Les conflits, les tremblements de terre et les coupes budgétaires détériorent et sous-financent les écoles, ce qui fait craindre l’apparition d’une «génération perdue»

LONDRES: La situation économique désastreuse de la Syrie a contraint les élèves issus de milieux défavorisés à manquer l'école cette année, les familles réduisant leurs dépenses et tentant de consolider leurs revenus en envoyant leurs enfants travailler.

Les écoles des régions syriennes contrôlées par le gouvernement ont rouvert en septembre après les vacances d'été, accueillant environ 3,7 millions d'enfants, selon l'Agence de presse arabe syrienne. Cependant, beaucoup d'autres ne se sont pas présentés.

Parmi les absents, figurent des enfants qui n'ont eu d'autre choix que de travailler pour gagner de l'argent et aider leurs familles à joindre les deux bouts, alors que les Syriens sont confrontés à une crise économique dévastatrice et sans précédent.

Afin d'éviter que les enfants ne soient privés de leur droit à l'éducation et qu'ils ne soient pas contraints à l'exploitation par le travail, des groupes de la société civile ont mis en place des projets destinés à aider les élèves vulnérables à poursuivre leurs études.

Par exemple, Mart Team, une organisation caritative de Damas, a lancé une campagne intitulée «Aqlamouna Amalouna», qui se traduit par «Nos plumes, notre espoir», dans le but de soutenir les élèves de l'école primaire en difficulté.

Pour éviter que les enfants ne soient privés de leur droit à l'éducation, des groupes de la société civile ont mis en place des projets destinés à aider les élèves vulnérables à poursuivre leurs études (Photo, AFP).

«Après avoir mené une étude pour déterminer pourquoi de nombreux élèves de la première à la sixième année n'allaient pas à l'école, nous avons découvert que l'un des principaux facteurs était la flambée des coûts de la papeterie et des fournitures scolaires», a indiqué Marwan Alrez, directeur général de Mart Team, à Arab News.

«Les parents nous ont informé que les écoles exigeaient des frais de scolarité élevés, ce qui a poussé nombre d'entre eux à retirer leurs enfants de l'école et à les forcer à entrer sur le marché du travail afin de contribuer aux revenus familiaux», a-t-il expliqué.

Donya Abou Alzahab, qui enseigne depuis un an dans une classe de deuxième année d'une école primaire de Damas, constate à quel point la situation est devenue désespérée pour nombre de ses jeunes élèves, sans parler de leurs enseignants.

« 'étais ravie de commencer mon premier emploi en tant qu'institutrice», a-t-elle révélé à Arab News. «J'étais loin de me douter qu'il s'agirait d'un défi coûteux et important, étant donné le manque de soutien et d'outils pédagogiques indispensables.»

Certains élèves ayant jusqu'à trois ans de retard sur leurs camarades en termes d'apprentissage, des enseignants comme Alzahab se voient souvent contraints de dépenser une part importante de leurs modestes revenus pour acheter des outils pédagogiques essentiels, notamment des manuels, qui ne sont pas bon marché à une époque où la valeur de la monnaie nationale est tombée à un niveau record.

La situation économique désastreuse de la Syrie a contraint les élèves issus de milieux défavorisés à manquer l'école cette année (Photo, AFP).

Selon Alrez, le coût moyen des fournitures scolaires pour un seul élève de l'école primaire est d'au moins 200 000 livres syriennes (environ 16 dollars) (1 dollar américain = 0,96 euro) ; un sac à dos peut coûter à lui seul 100 000 livres. Si les écoles ne fournissent pas de manuels aux élèves, ceux-ci peuvent coûter 50 000 livres supplémentaires aux parents.

Ces coûts sont de plus en plus hors de portée de nombreux employés du secteur public, dont les salaires mensuels minimums n'ont été augmentés que récemment pour atteindre 185 940 livres syriennes. Parallèlement, le gouvernement a réduit les subventions aux carburants, ce qui a déclenché de rares manifestations dans le sud de la Syrie.

Alzahab, qui est titulaire d'un diplôme en besoins éducatifs spéciaux, explique que les frais de transport à eux seuls peuvent dépasser 80 000 livres syriennes par mois, ce qui équivaut à près de la moitié de son salaire. Elle dépense également 30 000 livres en matériel pédagogique et 15 000 livres pour l'agenda de l'enseignant, qui doit être remplacé tous les mois.

«La seule raison pour laquelle je ne quitterai pas mon poste, ce sont les élèves», a-t-elle souligné. «Si je démissionne, ils resteront longtemps sans remplaçant.»

EN BREF

- En septembre, 3,7 millions d'élèves syriens ont repris le chemin de l'école dans les zones tenues par le gouvernement.

- La crise économique a rendu la scolarité trop coûteuse pour de nombreux ménages.

- Certains enfants sont devenus ouvriers pour aider à subvenir aux besoins de leur famille.

Une telle lacune dans leur éducation serait dévastatrice pour les résultats scolaires de ses élèves qui, dans de nombreux cas, sont déjà en retard. Sur les 30 élèves de sa classe, 20 ne savent ni lire ni écrire.

Un rapport récent de l'Unicef, le Fonds des Nations unies pour l'enfance, intitulé «Chaque jour compte», a révélé qu'en 2022, environ 2,4 millions d'enfants syriens n'étaient pas scolarisés et que 1,6 million d'autres risquaient d'abandonner l'école.

Selon un rapport ultérieur de l'Unicef couvrant la période de janvier à mars de cette année, les chiffres ne se sont pas améliorés. En outre, la part du budget national allouée par le gouvernement syrien à l'éducation a chuté de 7,1% en 2021 à 3,6% en 2022.

L'Unicef estime que la guerre civile syrienne, qui a débuté en 2011, a endommagé ou détruit 7 000 écoles dans le pays. Cette situation a été aggravée par les deux tremblements de terre dévastateurs qui ont frappé des régions du nord de la Syrie et du sud de la Turquie le 6 février de cette année.

L'Unicef estime que la guerre civile syrienne, qui a débuté en 2011, a endommagé ou détruit 7 000 écoles dans le pays (Photo, AFP).

L'agence des Nations unies a mis en garde contre le danger d'une génération de jeunes enfants qui ne sont jamais allés à l'école et qui «auront des difficultés à s'inscrire et à s'adapter à l'enseignement formel lorsqu'ils seront plus âgés».

Toutefois, tant que la crise économique du pays ne sera pas maîtrisée, de nombreux ménages continueront à donner la priorité à leur survie plutôt qu'à la scolarisation de leurs enfants.

 «Les enfants syriens sont souvent confrontés à un dilemme: aider leur famille à survivre ou poursuivre leur éducation», a déclaré à Arab News Hamza Barhameyeh, responsable du plaidoyer et de la communication chez World Vision, une organisation caritative internationale axée sur l'enfance.

«Le conflit syrien a décimé l'infrastructure éducative et le tremblement de terre a aggravé la crise, laissant les écoles dans le besoin de réhabilitation et de fournitures scolaires, ce qui a rendu le choix entre l'éducation et le travail des enfants beaucoup plus facile», a-t-il mentionné.

Alrez a souligné l'importance de soutenir les écoliers, car «cette génération est l'avenir de la Syrie».

Un rapport de l'Unicef indique qu'en 2022, environ 2,4 millions d'enfants syriens n'étaient pas scolarisés (Photo, AFP).

L'initiative de son organisation caritative a jusqu'à présent permis de répondre aux besoins d'environ 300 élèves d'écoles primaires dans certaines zones du Rif Dimachq, notamment Maaraba et Sbeineh dans des quartiers de la Ghouta tels que Zamalka, et dans la périphérie de Damas.

Le gouvernement syrien a déclaré qu'il reconnaissait les difficultés rencontrées par de nombreux écoliers et leurs familles et qu'il essayait de les aider. Le ministère de l'Éducation a exhorté les écoles à faire preuve d'indulgence dans l'application des politiques relatives au port de l'uniforme, par exemple, a rapporté Sana, l’agence étatique d’information.

Le ministère a également appelé les écoles à réduire leurs demandes de fournitures, dans la mesure du possible, afin d'alléger, du moins en partie, la charge des familles pauvres.

Il est toutefois peu probable que des mesures aussi modestes aient un impact significatif, étant donné que 90% de la population syrienne vit aujourd'hui en dessous du seuil de pauvreté. Même les enseignants des zones contrôlées par le gouvernement, comme Alzahab, ont du mal à faire leur travail, même s'ils font preuve d'innovation et d'ingéniosité dans la mesure du possible.

La situation n'est guère meilleure pour les enfants dans les régions de la Syrie qui échappent au contrôle du gouvernement. Les tremblements de terre de février ont largement touché les régions du nord-ouest tenues par l'opposition, où les infrastructures pour les enfants s'étaient déjà détériorées en raison du conflit.

Selon un rapport publié en avril par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies, au moins 450 écoles du nord-ouest ont été «endommagées à des degrés divers» par les tremblements de terre. Des milliers d'autres ont été endommagées ou détruites au cours de plus de douze ans de guerre civile, qui a été particulièrement destructrice dans le nord-ouest du pays.

1,6 million d'enfants syriens risquent d'abandonner l'école, selon l'Unicef (Photo, AFP).

World Vision a actuellement six projets éducatifs en cours dans le nord-ouest de la Syrie, a révélé Barhameyeh, qui se concentrent sur «la rénovation des écoles, les centres éducatifs, l'hivernage des écoles et la formation des enseignants».

«Ces projets comprennent également un programme d'intervention sur les moyens de subsistance qui fournit des colis alimentaires, des kits d'hygiène, des fournitures scolaires et, dans certains cas, des bons d'achat afin de minimiser la nécessité pour les familles d'envoyer leurs enfants au travail», a-t-il ajouté.

Malgré ces mesures, remplir les salles de classe reste une tâche ardue, d'autant plus que plus de 1,7 million d'enfants dans le nord-ouest de la Syrie dépendent de l'aide humanitaire.

«La crise alimentaire et les récentes coupes dans les programmes du Programme alimentaire mondial poussent activement les jeunes garçons à se diriger vers le marché du travail et à abandonner l'école», a soutenu Barhameyeh. «Cela aura certainement un impact dévastateur sur l'avenir des enfants syriens.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


Israël rejette une enquête de l'ONU l'accusant de «génocide» à Gaza

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Short Url
  • "Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué
  • Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens

JERUSALEM: Israël a "rejeté catégoriquement" mardi le rapport d'une commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies qui l'accuse de commettre un "génocide" dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

"Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d'autres responsables israéliens.

En riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste palestinien a pris le pouvoir en 2007.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU et est vivement critiquée par Israël, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produit à Gaza et continue de (s'y) produire", a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

Elle a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

Le ministère des Affaires étrangères israélien a accusé les auteurs du rapport de "servir de relais au Hamas", affirmant qu'ils étaient "connus pour leurs positions ouvertement antisémites — et dont les déclarations horribles à l'égard des Juifs ont été condamnées dans le monde entier."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Short Url
  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

Short Url
  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.