HANGZHOU: Le président syrien Bachar al-Assad entame jeudi une visite officielle en Chine, la première dans ce pays en près de 20 ans, destinée à obtenir davantage de soutien financier de Pékin pour la reconstruction.
La guerre en Syrie a entraîné des destructions massives d'infrastructures et a réduit à néant plusieurs secteurs cruciaux pour l'économie, dont celui du pétrole, tandis que le pouvoir syrien est soumis à de lourdes sanctions internationales.
La Chine fait partie des alliés du président Assad et lui a notamment apporté son soutien au Conseil de sécurité de l'ONU, s'abstenant régulièrement lors du vote de résolutions contrariant le pouvoir syrien.
La dernière visite de Bachar al-Assad en Chine remonte à 2004 et il s'agissait de la toute première d'un dirigeant syrien depuis l'établissement des relations diplomatiques avec Pékin en 1956.
Le président syrien est arrivé en Chine à bord d'un avion Air China, qui s'est posé à 13H15 locales (07H15 GMT), selon des images en direct de la télévision d'Etat CCTV à l'aéroport de Hangzhou (est).
M. Assad doit y assister samedi à la cérémonie d'ouverture des Jeux asiatiques, où le président chinois Xi Jinping rencontrera d'autres dirigeants étrangers, selon la chaîne.
Interrogée mercredi sur l'importance que revêt ce déplacement, la diplomatie chinoise n'a fait aucun commentaire.
"Cette visite représente une rupture importante de l'isolement diplomatique" de la Syrie, déclare à l'AFP depuis Damas le politologue Oussama Dannoura.
Objectif légitimité
Le pouvoir Assad a amorcé en 2023 un rapprochement avec de nombreux pays arabes, après des années d'isolement consécutif à la guerre dans son pays.
Cette normalisation des relations a été consacrée en mai par le retour de Damas au sein de la Ligue arabe, et la participation du président syrien à un sommet en Arabie saoudite.
"Assad a l'intention de conférer une certaine légitimité internationale à son régime et de donner l'image d'un soutien imminent de la Chine à la reconstruction en Syrie", prévient Lina Khatib, directrice du programme Moyen-Orient à l'institut SOAS à l'Université de Londres.
Le moment est d'autant plus important après des manifestations à Soueida, dans le sud de la Syrie, appelant au départ de Bachar al-Assad.
En traitant avec des pays comme la Syrie que Washington cherche à isoler, "la Chine brise les tabous occidentaux", affirme M. Dannoura.
Le président vénézuélien Nicolas Maduro, dont le pays est placé sous sanctions américaines, était ainsi à Pékin la semaine dernière, tandis qu'une délégation du gouvernement taliban se trouve actuellement en Chine.
Plus tôt cette année, Pékin avait déroulé le tapis rouge au président bélarusse Alexandre Loukachenko et à l'Iranien Ebrahim Raïssi.
De hauts responsables russes ont également été reçus, avant une visite de Vladimir Poutine en Chine le mois prochain.
«Enormes capacités»
Pékin joue au Moyen-Orient un rôle grandissant, à l'image du spectaculaire rapprochement qu'il a permis en début d'année entre l'Iran et l'Arabie saoudite.
La Chine, très active dans une région historiquement stratégique pour les Etats-Unis, y promeut son ambitieux projet des Routes de la soie, qui consiste en des investissements massifs dans les infrastructures pour améliorer les liaisons commerciales entre l'Asie, l'Europe et l'Afrique.
La Syrie a rejoint le projet en janvier 2022 et espérait d'importantes retombées économiques.
Mais cela ne s'est "toujours pas concrétisé" et les investissements chinois restent marginaux, relève l'analyste syrien Haid Haid, du cercle de réflexion Chatham House.
Le déplacement du président Assad à Pékin vise "à convaincre" la Chine de participer à la reconstruction de la Syrie en dépit de "réticences" notamment du point de vue sécuritaire, souligne l'expert.
Les forces du pouvoir syrien ont repris la majeure partie du territoire syrien grâce à l'aide militaire cruciale de ses alliés russe et iranien, mais le pays a besoin d'investissements pour la reconstruction.
La Chine s'était engagée en 2017 à investir 2 milliards de dollars en Syrie.
"La Chine dispose d'énormes capacités pour la reconstruction et pourrait très rapidement achever (les travaux d') infrastructures", souligne Oussama Dannoura.