PARIS: Le gouvernement a annoncé "maintenir" mercredi son projet de permettre la vente de carburant à perte, malgré l'opposition des enseignes de la grande distribution, qui gèrent environ la moitié des stations-service en France.
Carrefour ne "vendra pas à perte" de carburant, a annoncé son PDG Alexandre Bompard lors d'une audition dans la matinée devant la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale.
L'interdiction "de la revente à perte est un principe très important du commerce depuis 1963", a estimé M. Bompard, qui est par ailleurs président de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) qui représente une grande partie du secteur.
"Il ne faut pas ouvrir cette boîte de Pandore au risque de fragiliser à la fois l’équilibre des filières et l’équité territoriale entre les consommateurs", selon le dirigeant.
Même son de cloche chez E.Leclerc et Intermarché, également auditionnés dans le cadre de tables rondes préparatoires à l'examen du projet de loi sur les négociations commerciales annoncé par le gouvernement, dont les représentants ont annoncé dans la foulée de Carrefour qu'ils ne "feront pas" non plus de vente à perte.
Dominique Schelcher, PDG du 4e acteur du secteur Système U, a aussi indiqué ne pas prévoir d'opérations de vente à perte.
Les dirigeant de Leclerc, Carrefour, Intermarché, Système U, Casino et Auchan avaient déjà été convoqués mardi matin à Bercy par le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
Bercy a pour sa part indiqué que, lors de cette réunion avec les patrons de la distribution, "Bruno Le Maire a aussi rappelé que les stations indépendantes bénéficieront de compensations" et qu'elles seront "accompagnées par un plan de transformation pluriannuel visant à leur permettre d'offrir de nouveaux services tels que les bornes de recharge rapides".
TotalEnergies opposé
Les grandes surfaces gèrent environ la moitié des stations-service de France et sont concernés en priorité par la mesure.
Du côté de TotalEnergies - qui gère un tiers des stations du pays mais à qui le projet gouvernemental de revente à perte n'était pas destiné - son patron Patrick Pouyanné a dit mardi soir qu'il ne comptait pas descendre en dessous du plafond de 1,99 euro le litre de carburant qu'il a instauré cette année.
Par la voix de son ministre des Comptes publics Thomas Cazenave, le gouvernement a affirmé mercredi matin "maintenir" son projet d'autoriser la vente à perte.
Cette possibilité, destinée à lutter contre l'envol des prix du carburant, "n'est pas une obligation", a relevé le ministre sur Sud Radio, expliquant que le projet de loi auquel réfléchit le gouvernement pour une entrée en vigueur voulue en décembre revenait à dire "chiche!" aux distributeurs qui avaient récemment assuré ne pas pouvoir baisser beaucoup les prix du carburant faute d'être autorisés à vendre à perte.
"Je préfère négocier avec les distributeurs que de demander au contribuable de financer une ristourne qui couterait 12 milliards d'euros", a lancé M. Cazenave.
Un fonds, d'un montant encore à l'étude, serait déboursé par l'Etat pour venir en aide aux petits distributeurs qui seraient très affectés par une concurrence qui vendrait à perte.
Samedi, la Première ministre Elisabeth Borne avait levé un vieux tabou en annonçant que les carburants pourraient être vendus à perte. Cette mesure, qui fera l'objet d'un projet de loi, devrait entrer en vigueur début décembre pour une durée de six mois.