Libye: après l'«apocalypse», les rescapés de Derna veulent des réponses

Des gens se rassemblent pour une manifestation devant la mosquée Al-Sahaba, dans la ville de Derna, dans l'est de la Libye, le 18 septembre 2023, pour protester contre la négligence du gouvernement à l'égard des deux barrages qui se sont rompus et ont conduit aux crues éclair meurtrières qui ont frappé la ville la semaine précédente. (Photo, AFP)
Des gens se rassemblent pour une manifestation devant la mosquée Al-Sahaba, dans la ville de Derna, dans l'est de la Libye, le 18 septembre 2023, pour protester contre la négligence du gouvernement à l'égard des deux barrages qui se sont rompus et ont conduit aux crues éclair meurtrières qui ont frappé la ville la semaine précédente. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Mardi 19 septembre 2023

Libye: après l'«apocalypse», les rescapés de Derna veulent des réponses

  • "Il y a deux ans, il y avait déjà eu des fuites sur le grand barrage alors qu'il n'était rempli qu'à moitié. On avait prévenu la municipalité et réclamé des réparations", raconte Abdelqader al-Omrani depuis son lit d'hôpital à Benghazi
  • "Après tous ces morts chez nous, le pays est enfin uni, tout le monde est venu pour nous aider", se félicite M. Omrani, qui veut croire que Derna deviendra "une cause à défendre"

BENGHAZI: Une semaine après les inondations meurtrières en Libye, les rescapés de Derna veulent des réponses: pourquoi les demandes de réparations des barrages sont-elles restées lettres mortes et qui va les aider face au risque d'épidémies?

"Il y a deux ans, il y avait déjà eu des fuites sur le grand barrage alors qu'il n'était rempli qu'à moitié. On avait prévenu la municipalité et réclamé des réparations", raconte à l'AFP Abdelqader al-Omrani depuis son lit d'hôpital à Benghazi, la grande ville de l'Est.

Pour ce Libyen de 48 ans, qui a vu passer sous ses yeux les corps sans vie de six proches emportés par les flots dans sa ville dévastée, les milliers de morts auraient pu être évités. Les responsables qui n'ont pas effectué les réparations "ont nos morts sur la conscience", dit-il.

Après une manifestation de centaines d'habitants, le chef de l'exécutif dans l'Est de la Libye, Oussama Hamad, a dissout lundi le conseil municipal de Derna, contre lequel il a aussi ordonné l'ouverture d'une enquête.

Ezzedine Miftah, 32 ans, pointe également du doigt les autorités locales, derrière son masque à oxygène en soins intensifs.

Pour cet employé du secteur privé dont la famille a survécu aux inondations, "c'est la faute des responsables qui n'ont pas fait leur travail et ont laissé les barrages s'effondrer".

Le raz-de-marée qui s'en est suivi a réduit le coeur de la ville de 100.000 habitants en un tas de boue qui sèche au soleil, ratissé par les secouristes pour sortir des corps ou les bulldozers pour creuser des fosses communes.

«Il faut un Etat»
"Après tous ces morts chez nous, le pays est enfin uni, tout le monde est venu pour nous aider", se félicite M. Omrani, qui veut croire que Derna deviendra "une cause à défendre".

Mais pour cela, renchérit son voisin de lit souhaitant rester anonyme et encore tremblant quand il raconte s'être "littéralement cogné la tête contre le plafond lorsque l'eau a rempli tout le salon", "il faut un Etat".

Il faut "des milliards, un nouveau réseau de tout-à-l'égout", énumère à l'AFP ce père de famille de 53 ans qui n'en finit pas de remercier "la société civile".

Une intervention de l'Etat? Une gageure en Libye rongée par les divisions depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011 et gouvernée par deux administrations rivales: l'une à Tripoli (ouest), reconnue par l'ONU et dirigée par le Premier ministre Abdelhamid Dbeibah, l'autre dans l'Est, affilié au camp du puissant maréchal Khalifa Haftar.

"La Libye est allée de problèmes en problèmes, mais maintenant, il nous faut un Etat car Derna est sinistrée et il y a encore 70.000 personnes menacées par les épidémies là-bas", lance-t-il, lunettes à épaisses montures relevées sur le front.

"Les gens ne peuvent ni boire ni se laver avec l'eau, comment vont-ils faire?", ajoute-t-il, lui- même en attente d'une opération après avoir été atteint par des infections qui ont proliféré sur ses fractures aux mains et aux pieds à force de nager dans les eaux usées.

«Tout se mélangeait»
Car, poursuit-il, personne n'imaginait "le tsunami" qui a ravagé Derna.

Dans la soirée, "on a reçu une alerte disant que le niveau de la mer allait augmenter, j'ai mis ma femme et mes quatre enfants à l'abri chez ma belle-famille dans les montagnes qui surplombent la ville".

De retour seul à Derna, il dit avoir demandé conseil aux autorités locales qui lui ont assuré que sa maison n'était pas dans la zone menacée.

Après, tout est allé très vite, raconte M. Omrani: "les morts, les disparus, la destruction de Derna, tout ça s'est produit entre 03H00 et 04H30 du matin".

D'un seul coup, sa maison, proche d'un des deux barrages qui ont cédé, a été submergée. Lui a pu sauter du toit-terrasse, escalader un arbre puis gagner la montagne.

Quand l'eau s'est finalement retirée, il n'y avait "ni bâtiment ni arbre, plus que la montagne et aucune âme qui vive: j'ai vécu l'apocalypse, sans exagération", raconte-t-il à l'AFP, en marquant une pause pour ne pas pleurer.

Son voisin aussi dit avoir survécu à "la pire horreur du monde". Quand il a enfin retrouvé sa famille après une heure et demie de marche entre débris et cadavres, "ils ont cru voir un fantôme, ils étaient sûrs que j'étais mort", raconte-t-il.

M. Omrani, lui, a l'impression de revivre "les films américains qu'on voyait avant, avec tout le monde qui meurt dedans". "Je vous parle et je ne réalise même pas pourquoi je suis là dans un hôpital", lâche-t-il.


L'émir du Qatar est le premier dirigeant arabe à se rendre en Syrie depuis la chute d'Assad

L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani, et Ahmed Al-Sharaa, le président intérimaire de la Syrie. (QNA)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani, et Ahmed Al-Sharaa, le président intérimaire de la Syrie. (QNA)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani, est arrivé à Damas, en Syrie. (QNA)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani, est arrivé à Damas, en Syrie. (QNA)
Ahmed Al-Sharaa a été déclaré président intérimaire de la Syrie lors d'une conférence tenue cette semaine. (QNA)
Ahmed Al-Sharaa a été déclaré président intérimaire de la Syrie lors d'une conférence tenue cette semaine. (QNA)
Short Url
  • Le président intérimaire de la Syrie, Ahmed Al-Sharaa, accueille le cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani à l'aéroport de Damas
  • Cette visite marque une reprise significative des relations entre le Qatar et la Syrie, le Qatar étant appelé à jouer un rôle majeur dans la reconstruction

LONDRES : L'émir du Qatar, le cheikh Tamim bin Hamad Al-Thani, est arrivé à Damas jeudi, devenant ainsi le premier dirigeant arabe à se rendre en Syrie depuis l'effondrement du régime de Bachar Assad.

Ahmed Al-Sharaa, déclaré président intérimaire de la Syrie lors d'une conférence mercredi soir, a accueilli le cheikh Tamim à son arrivée à l'aéroport international de Damas.

Le premier ministre syrien Mohammed Al-Bashir, le ministre des affaires étrangères Asaad Al-Shaibani et le ministre de la défense Murhaf Abu Qasra étaient également présents.

Le Qatar a soutenu les factions de l'opposition syrienne pendant les 13 années de guerre civile qu'a connues le pays avant que M. Assad ne quitte Damas pour Moscou au début du mois de décembre.

La visite du cheikh Tamim marque une reprise significative des relations entre le Qatar et la Syrie, le Qatar devant jouer un rôle majeur dans la reconstruction, selon l'agence de presse du Qatar.

L'analyste politique et auteur Khaled Walid Mahmoud a déclaré à la QNA que la visite de Cheikh Tamim était "hautement symbolique et historiquement significative, étant la première d'un dirigeant arabe depuis la chute de l'ancien régime".

La visite pourrait rouvrir les canaux diplomatiques et soutenir une résolution politique durable à Damas, en soulignant les liens étroits du Qatar avec les États-Unis et la Turquie, ainsi que son rôle de médiateur de confiance en Syrie et au Moyen-Orient, a-t-il ajouté.

Le Qatar jouera un rôle crucial dans la reconstruction de la Syrie, en particulier dans des secteurs clés tels que l'énergie, les transports et le logement, qui ont été dévastés par la guerre civile.

Ahmed Qassim Hussein, chercheur au Centre arabe de recherche et d'études politiques, a déclaré à la QNA que la visite de l'émir était le signe d'une évolution du rôle du Qatar dans les sphères politique, économique et sécuritaire de la Syrie.

Le soutien du Qatar aux nouveaux dirigeants syriens dirigés par le président Al-Sharaa, devenu insurgé, s'est manifesté par sa décision de rouvrir l'ambassade à Damas après sa fermeture en 2011.

Il a déclaré que "la visite reflète l'engagement du Qatar à rétablir les relations diplomatiques et à favoriser la coopération avec la Syrie", ajoutant que Doha aide les dirigeants syriens à traverser la phase de transition de la Syrie et à favoriser la stabilité à long terme.


Les Émirats arabes unis inaugurent leur premier avion de combat Rafale de fabrication française à Paris

Le ministère de la défense des Émirats arabes unis a inauguré à Paris son premier avion de combat Rafale de fabrication française. (Capture d'écran/WAM)
Le ministère de la défense des Émirats arabes unis a inauguré à Paris son premier avion de combat Rafale de fabrication française. (Capture d'écran/WAM)
Short Url
  • L'accord entre la France et les Émirats arabes unis représente un accord de défense clé entre les deux alliés
  • Les Émirats arabes unis souhaitent renforcer leurs capacités de défense en modernisant leur flotte aérienne

LONDRES : Le ministère de la défense des Émirats arabes unis a inauguré son premier avion de combat Rafale de fabrication française, marquant ainsi un renforcement significatif des capacités des forces armées émiraties.

Le ministère a déclaré jeudi que cette initiative s'inscrivait dans le cadre d'un accord signé avec l'entreprise aérospatiale française Dassault Aviation, soulignant ainsi le solide partenariat stratégique entre Paris et Abou Dhabi.

Le Rafale, de fabrication française, est considéré comme l'un des avions de combat multirôles les plus avancés au monde.

Les Émirats arabes unis entendent renforcer leurs capacités de défense en modernisant la flotte de l'armée de l'air grâce à l'acquisition d'avions de combat Rafale, afin de relever les défis régionaux et mondiaux en matière de sécurité, a rapporté l'agence de presse Emirates News Agency.

La cérémonie de lancement a eu lieu à Paris en présence de Mohamed bin Mubarak Fadhel Al-Mazrouei, ministre d'État des Émirats arabes unis chargé des affaires de défense, et de Sébastien Lecornu, ministre français de la défense.

M. Al-Mazrouei a déclaré que la "stratégie des Émirats arabes unis est axée sur l'acquisition des armes et des systèmes les plus avancés, qui s'adaptent à la nature évolutive de la guerre moderne et aux progrès technologiques, améliorant ainsi l'efficacité de combat globale de notre système de défense national".

L'accord avec Rafale comprendra un programme de formation pour qualifier les pilotes et les techniciens émiratis, garantissant ainsi le niveau de préparation du personnel national, a ajouté WAM.

Le général de brigade Mohamed Salem Ali Al-Hameli, de l'armée de l'air et de la défense aérienne des Émirats arabes unis, a déclaré que l'avion Rafale était doté de technologies avancées pour la reconnaissance et les attaques précises sur des cibles terrestres et maritimes, ce qui en fait un ajout précieux à l'armée de l'air des Émirats arabes unis.

L'accord de 16,6 milliards d'euros (17,3 milliards de dollars) entre les Émirats arabes unis et Dassault Aviation est un accord de défense clé dans les relations franco-émiraties, qui prévoit la production de 80 avions de combat avancés dotés de technologies de pointe.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Algérie : Une experte de l'ONU «profondément déçue» du traitement des défenseurs des droits

 La rapporteure spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme s'est dite "profondément déçue" par le traitement réservé aux défenseurs des droits humains en Algérie, citant nommément plusieurs cas dont celui du journaliste indépendant Merzoug Touati. (AFP)
La rapporteure spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme s'est dite "profondément déçue" par le traitement réservé aux défenseurs des droits humains en Algérie, citant nommément plusieurs cas dont celui du journaliste indépendant Merzoug Touati. (AFP)
Short Url
  • Mary Lawlor s'insurge, dans un communiqué, que les défenseurs des droits humains "continuent d’être arrêtés arbitrairement, harcelés par la justice, intimidés et criminalisés en raison de leurs activités pacifiques"
  • L'experte, mandatée par le Conseil des droits de l'homme et qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a indiqué être "en contact avec le Gouvernement de l’Algérie"

GENEVE: La rapporteure spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme s'est dite "profondément déçue" par le traitement réservé aux défenseurs des droits humains en Algérie, citant nommément plusieurs cas dont celui du journaliste indépendant Merzoug Touati.

Mary Lawlor s'insurge, dans un communiqué, que les défenseurs des droits humains "continuent d’être arrêtés arbitrairement, harcelés par la justice, intimidés et criminalisés en raison de leurs activités pacifiques en vertu de dispositions pénales formulées en termes vagues, telles que 'porter atteinte à la sécurité nationale'".

L'experte, mandatée par le Conseil des droits de l'homme et qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a indiqué être "en contact avec le Gouvernement de l’Algérie".

Elle a mis en exergue le cas de Merzoug Touati "l’un des cas les plus alarmants que j’ai récemment examinés", a souligné Lawlor, qui s'est rendue en Algérie fin 2023.

Selon l'experte, M. Touati a été détenu à trois reprises depuis 2024.

"Lors de sa dernière arrestation en août 2024, sa famille aurait été victime de mauvais traitement. Il aurait ensuite subi des tortures physiques et psychologiques durant sa garde à vue pendant cinq jours. Il continue d’être harcelé par la justice, même après sa libération", écrit Mme Lawlor.

Elle juge "tout aussi préoccupante" l’arrestation de trois avocats de défense des droits humains et d’un jeune lanceur d’alerte entre février et juillet 2024 Toufik Belala, Soufiane Ouali et Omar Boussag ainsi que Yuba Manguellet.

Lawlor a également attiré l’attention sur le cas du Collectif des Familles de Disparu(e)s, une organisation créée pendant la guerre civile algérienne des années 1990 pour faire la lumière sur les disparitions forcées.

Selon l'experte, les membres de l’association, dont beaucoup sont des mères de personnes disparues, ainsi que leur avocate, "auraient été malmenés et sommés de quitter les lieux à ces occasions".

"Je tiens à répéter que j’ai rencontré presque tous ces défenseurs des droits de l’homme", a déclaré la Rapporteure spéciale.

"Aucun d’entre eux ne s’engageait de quelque manière que ce soit dans des actes de violence. Ils doivent tous être traités conformément au droit international des droits de l’homme, que l’Algérie est tenue de respecter", insiste t-elle.