PARI: "Une honte", "choquant, "une défaillance": le ministre de l’Éducation et la Première ministre n'ont pas eu de mots assez durs samedi pour qualifier la teneur d'une lettre du rectorat de Versailles à la famille d'un lycéen de Poissy (Yvelines), qui se plaignait de harcèlement scolaire et qui s'est suicidé cette rentrée.
"Ce courrier est une honte, une honte", a déclaré Gabriel Attal sur le perron de son ministère, après la diffusion par BFMTV d'échanges de courriers entre la famille, le proviseur de son lycée et le rectorat de Versailles au printemps 2023, quelques mois avant le suicide de l'adolescent le 5 septembre.
Peu avant cette intervention, la Première ministre Élisabeth Borne avait qualifié de "choquant" le ton de la missive envoyée par le rectorat de Versailles le 4 mai dernier aux parents du lycéen.
Le rectorat qualifiait d'"inacceptables" des propos des parents qui auraient "remis en cause" l'attitude des personnels de l'établissement scolaire, selon cette lettre mise en ligne sur le site de BFMTV samedi. Enjoignant aux parents d'adopter une "attitude constructive et respectueuse" à leur égard, le courrier du rectorat leur rappelait par ailleurs les risques pénaux d'une dénonciation calomnieuse.
Pour Élisabeth Borne, "il y a eu manifestement défaillance sur le type de réponse adressé à des parents qui étaient extrêmement inquiets". "Évidemment c'est choquant", a-t-elle ajouté.
Gabriel Attal, qui était aux côtés de la famille vendredi pour les obsèques de l'adolescent mort à l'âge de 15 ans, a rappelé avoir diligenté une enquête administrative. "Ses inspecteurs ont démarré leurs travaux, ils me remettront leurs conclusions sous quinze jours", a-t-il dit.
"J'en tirerai toutes les conclusions, y compris en matière de sanctions", a dit le ministre, entré en fonction en juillet dernier.
"J’ai fait de la lutte contre le harcèlement la priorité absolue" mais "nous ne sommes toujours pas à la hauteur", a encore déclaré le ministre de l’Éducation.
Il réunira "dès lundi l'ensemble des rectrices et des recteurs, pour un audit dans l'ensemble des rectorats sur toutes les situations de harcèlement signalées aux rectorats sur l'année passée".
Les parents du lycéen harcelé à Poissy "outrés et effarés" par le courrier du rectorat
Les parents de l'adolescent qui s'est suicidé à la rentrée à Poissy (Yvelines), après s'être plaint l'année précédente de harcèlement, ont été "outrés et effarés de recevoir" des courriers de l'administration qui jugeaient leur attitude "inacceptable", a déclaré à l'AFP la mère du jeune homme.
"Nous avons été outrés et effarés de recevoir de telles lettres", dans lesquelles le rectorat évoquait les risques pénaux d'une dénonciation inexacte, a assuré la mère de Nicolas, Béatrice, qui a précisé ne pas avoir encore décidé si elle allait porter plainte.
« Défendre les élèves »
"Mon rôle, ce n'est pas défendre à tout prix une institution, c'est de défendre à tout prix la protection de nos élèves et de nos enfants et c'est comme ça que je continuerai à avancer", a-t-il conclu.
Scolarisé en classe de troisième au lycée professionnel des métiers Adrienne-Bolland à Poissy, l'adolescent avait signalé des faits de harcèlement en décembre 2022.
Selon les échanges de courriers révélés par BFMTV, les parents avaient rencontré le proviseur de l'établissement le 10 mars 2023 afin de "faire part de la détresse de notre fils quant au harcèlement qu'il subit depuis le mois d'octobre", selon leur lettre au proviseur. Ils y regrettaient que cette rencontre n'ait pas été suivie d'effets concrets selon eux.
"Une main courante a été déposée au commissariat de Poissy" et "il est incompréhensible que vous puissiez laisser un adolescent subir une telle violence verbale et psychologique sans réagir", écrivaient-ils au responsable.
Le proviseur avait répondu dans une longue lettre le 20 avril, en indiquant qu'il fallait bien "cerner la situation pour décider du mode opératoire à mettre en œuvre".
C'est la lettre du rectorat de Versailles, du 4 mai, qui a suscité l'indignation de Gabriel Attal.
Le jeune homme avait effectué sa rentrée dans un autre établissement le 4 septembre, à Paris. Il s'est pendu le lendemain.