GENEVE: Le changement climatique et ses effets dévastateurs sont bien réels, a vigoureusement soutenu lundi le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, appelant à lutter contre l'impunité de "ceux qui pillent" la planète.
S'exprimant à l'ouverture de la 54e session du Conseil des droits de l'Homme, qui doit durer cinq semaines, Volker Türk a avant tout tenu à alerter sur l'"horreur environnementale".
"Le futur dystopique est déjà là. Nous avons besoin d'une action urgente, maintenant. Et nous savons ce qu'il faut faire. La vraie question est: qu'est-ce qui nous en empêche?", a-t-il lancé après l'échec au G20 ce week-end d'un appel commun à une sortie des énergies fossiles.
Volker Türk a, lui, plaidé pour une sortie "rapide" des énergies fossiles et salué les efforts sur le globe visant à intégrer l'"écocide" dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
Mais alors que les changements climatiques renforcent les déplacements de populations, il a dénoncé "l'indifférence" face à la tragédie des migrants sur les routes migratoires.
"Je suis choqué par la nonchalance qui se manifeste face aux plus de 2.300 personnes qui ont été déclarées mortes ou disparues en Méditerranée cette année", a-t-il dit, assurant qu'un nombre bien plus important de migrants et de réfugiés périssent ailleurs dans leur monde.
A l'ère des catastrophes climatiques, les réassureurs réduisent la voilure
Face à la multiplication des catastrophes naturelles, la plupart des réassureurs, dont l'activité consiste à assurer les assureurs, ont décidé de moins s'exposer à certains périls. Un choix compréhensible mais qui pose la question de l'assurabilité du changement climatique.
"Certaines entreprises se retiraient déjà du marché de l'assurance en 2022, mais dorénavant même les réassureurs les plus solides se retirent, principalement en resserrant leurs garanties pour limiter leur exposition", ont souligné dans une note les analystes de l'agence de notation Fitch, quelques jours avant les "Rendez-vous de Septembre", où assureurs et réassureurs se réunissent à Monaco jusqu'à mercredi.
"Plus de la moitié des 20 plus gros réassureurs ont maintenu ou réduit leur exposition aux catastrophes naturelles durant la période de renouvellement (des contrats) de janvier 2023, malgré l'augmentation (du prix des contrats) et une hausse de la demande" de la part des assureurs, complètent les analystes de l'agence S&P.
A titre d'exemple, les primes perçues par Axa XL Réassurances, filiale d'Axa dédiée à cette activité, ont reculé de 3% au premier semestre, à 1,7 milliard d'euros, en raison d'une "forte réduction de l'exposition aux catastrophes naturelles", même si la hausse des prix de 6,3% sur la période a en partie compensé ce trou.
Les réassureurs se détournent en particulier des périls dits "secondaires", des sinistres de taille petite ou moyenne dont la fréquence explose avec le changement climatique, mais "offrent toujours d'importantes couvertures contre les sinistres les plus sévères", précisent les auteurs de la note de Fitch.
Il a ainsi pointé du doigt "le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique".
Le Haut-Commissaire a par ailleurs dénoncé "les mensonges et la désinformation" qui, grâce aux nouvelles technologies, "sont produites en masse pour semer le chaos et la confusion, nier la réalité et garantir qu'aucune mesure - qui pourrait mettre en danger les intérêts des élites - ne soit prise".
A cet égard, "le cas le plus évident est le changement climatique", a-t-il dit.
Chine et Iran
Le Haut-Commissaire a également dressé une longue liste des violations des droits de l'Homme à travers le monde, ciblant de nombreux pays, y compris la Chine et l'Iran, tout en déplorant la multiplication des politiques visant à diviser le monde via "la création de conflits artificiels sur le genre, la migration ou d'un choc des civilisations".
A l'égard de la Chine, il a estimé que les "récents défis économiques du pays soulignent la nécessité d'une approche plus participative qui respecte tous les droits de l'Homme - y compris les droits des membres des minorités ethniques, des habitants des communautés rurales, des travailleurs migrants de l'intérieur, des personnes âgées et des personnes handicapées".
Alors qu'il a été récemment critiqué par des ONG sur le suivi du rapport de l'ONU publié il y a an sur de graves violations des droits humains dans la province chinoise du Xinjiang, M. Türk a insisté sur le besoin d'une "action réparatrice forte".
Il s'est par ailleurs dit favorable à une enquête internationale sur l'explosion il y a trois ans dans le port de Beyrouth, en déplorant qu'"aucune responsabilité n'a été établie" dans cette affaire, et s'est dit "profondément choqué par l'escalade de la violence" dans les territoires palestiniens occupés.
Le responsable a également critiqué le projet de loi iranien sur le voile et fait part de sa préoccupation, dans ce contexte, face au "redéploiement de la police des moeurs, une force presque exclusivement destinée à contrôler les femmes et les filles".
Le Haut-Commissaire a très peu abordé la guerre en Ukraine mais il aura l'occasion d'y revenir lorsque la commission d'enquête internationale sur ce dossier s'adressera au Conseil le 25 septembre. La situation des droits humains en Russie sera également discutée lors de la présentation du premier rapport du rapporteur spécial le 21 septembre.
Parmi les autres situations qui doivent être abordées au Conseil figurent la Syrie, la Birmanie, l'Afghanistan, Haïti, le Nicaragua ou encore le Soudan, sur laquelle certains pays pourraient proposer une enquête internationale.