Les dirigeants du G20 – un regroupement des dix-neuf plus grandes économies mondiales et de l’UE – qui se sont rendus à New Delhi pour le sommet de 2023 organisé par l’Inde, représentent près de 67% de la population mondiale, 75% du commerce international et 80% de l’ensemble de la production économique.
Pendant deux jours, les 9 et 10 septembre, le forum se concentrera sur des questions mondiales allant des défis géostratégiques et politiques au changement climatique, en passant par la santé et l’accès à la technologie.
Certes, avec sept des plus grands pays en développement, le G20 est un groupe bien plus inclusif que le G7, qui est entièrement un club de pays riches. Cependant, les treize membres nationaux développés ont eu tendance à dominer jusqu’à présent l’ordre du jour et les résultats des réunions du G20, malgré les tentatives des pays en développement de faire part de leurs préoccupations.
Pendant des décennies, l’Inde s’est considérée à juste titre comme la voix du monde en développement, ou du Sud global dans le nouveau langage. Parfois seule, parfois de concert avec d’autres pays en développement, elle a mené plusieurs batailles, allant des négociations lors du cycle de développement de Doha de l’Organisation mondiale du commerce à la lutte pour la justice et l’équité climatiques dans le cadre des discussions très complexes sur le changement climatique.
Dans ce contexte, la réunion de New Delhi présente une occasion unique pour l’Inde, et même pour l’ensemble du monde en développement, de réaliser des progrès significatifs sur la question de la représentation et de la voix adéquates des pays en développement lors de rassemblements internationaux importants ou au moyen d’organisations comme le G20. Avant même l’ouverture du sommet samedi, l’Inde avait réussi à progresser à ce sujet, en invitant un grand nombre de pays arabes et africains à y participer en tant qu’observateurs.
Lors de la séance inaugurale du sommet, le Premier ministre indien Narendra Modi a déclaré que l’Union africaine avait obtenu le statut de membre permanent du G20. Cela a réussi à combler un vide au sein du bloc, qui manquait d’une seule voix pour représenter les 18% de l’humanité vivant en Afrique. L’admission de l’union contribuera grandement à élargir le groupe et à le rendre beaucoup plus inclusif.
Mais la réunion de New Delhi peut et doit être utilisée par l’Inde, en tant qu’hôte, et par d’autres pays en développement pour exprimer leurs points de vue sur presque tous les défis auxquels le monde est confronté.
Pour ce qui est du changement climatique, par exemple, les pays du Sud devraient saisir l’occasion de présenter leurs revendications de longue date aux nations riches et souligner l’échec répété des pays développés à honorer leurs engagements, qu’il s’agisse de réduire leurs propres émissions de carbone ou de fournir les 1 000 milliards de dollars (1 dollar = 0,93 euro) dont ont besoin chaque année les pays les plus pauvres pour résoudre ce problème.
«L’admission de l’Union africaine, qui représente 18%, contribuera grandement à élargir le G20 et à le rendre beaucoup plus inclusif.»
Ranvir S. Nayar
Il est crucial de noter que la réunion du G20 a lieu à peine huit semaines avant l’ouverture de la COP28 à Dubaï. Ainsi, si le monde en développement parvient à créer une dynamique pour forcer les pays riches à honorer leurs engagements, cela pourrait grandement contribuer au succès de la réunion de novembre.
Une autre question sur laquelle les pays du Sud doivent faire entendre leur voix est la structure financière mondiale, en particulier en ce qui concerne les institutions financières, comme le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, qui sont actuellement sous le contrôle du monde riche. Là encore, l’Inde a eu des discussions préparatoires avec d’autres pays en développement et elle fera probablement pression pour une résolution, ou du moins pour l’inclusion de cette question au sommet.
Les pays en développement devraient également insister sur un autre domaine extrêmement préoccupant: la reprise des négociations commerciales mondiales, qui ont été bloquées ces dernières années par les nations fortunées. Cela comprenait le torpillage de tout accord sur le cycle de développement de Doha, qui visait à ouvrir des marchés plus riches aux pays en développement.
Il y a ensuite les questions de santé mondiale et d’égalité pour lesquelles, là encore, les pays en développement ont besoin d’accéder aux technologies et à une main-d’œuvre qualifiée, ainsi qu’à des financements pour améliorer leurs infrastructures des soins de santé.
Face à tant de questions à résoudre, les pays en développement devraient exposer leur point de vue clairement et parler d’une seule voix à New Delhi. Le risque pour les pays en développement est qu’ils permettent à leurs différences avec d’autres pays en développement, comme les tensions entre l’Inde et la Chine, de conduire à une divergence dans leur approche.
En tant qu’hôte du sommet, l’Inde devra peut-être fournir un effort supplémentaire pour s’assurer que la Chine s’associe de tout cœur aux autres pays en développement pour modifier le discours au sein du G20.
Si, d’autre part, les pays en développement laissent leurs différences les désunir, alors la voix du Sud global risque d’être non seulement fortement affaiblie mais aussi réduite au silence, comme elle l’a été pendant des siècles.
Ranvir S. Nayar est rédacteur en chef de Media India Group.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com