Réalisé par Mounia Meddour, le film Papicha, accueilli par une standing ovation lors de sa projection dans la section « Un certain regard » au dernier festival de Cannes, raconte l’histoire de Nedjma, une jeune étudiante passionnée de stylisme et de mode, dans l’Algérie des années 1990.
L’héroïne, interprétée par Lyna Khoudri, est un personnage pétri de contradictions. Vulnérable d’un côté, forte, motivée et déterminée de l’autre, elle confectionne des robes pour les papichas (« coquettes » en dialecte algérien), des jeunes femmes qui, durant cette période sombre, défiaient l’intolérance des islamistes.
Dans ce contexte oppressant, Nedjma, éprise de liberté, décide de ne pas renoncer à ses rêves. Au péril de sa vie, elle organise un défilé de robes cousues avec des haïks en soie, un vêtement traditionnel du Maghreb. « C’est une interprétation puissante et juste. Le film nous plonge dans un contexte dramatique avec une touche d’humour et de légèreté. Ces jeunes femmes sont résilientes et libres. Nedjma est captivante, sa soif de liberté et son esprit créatif lui ont permis de résister aux douleurs et aux pressions. Le défilé qu’elle organise est fort en symboles. On remarque que ces jeunes étudiantes ne renoncent pas à leurs traditions, elles les adaptent à leur époque », explique Nadia, cadre dans une maison de haute couture, lors la projection du film en avant-première à Paris.
Les autres personnages féminins, interprétés par Shirine Boutella (Wassila), Amira Hilda Douaouda (Samira), Zahra Doumandji (Kahina) et Meryem Medjkane (Linda), des résidentes d’une cité universitaire, sont tout aussi audacieux. Les jeunes femmes contournent les obstacles et racontent leurs tourments avec philosophie et délicatesse, ce qui laisse à penser qu’en dépit de toutes les contraintes, la vie reprend toujours le dessus. « Les actrices sont belles et talentueuses. On peut penser que le personnage de Papicha fait le lien entre le passé et le présent car il fait écho à cette jeunesse, qui, aujourd’hui encore, aspire à une Algérie meilleure. Elle ne craint pas les obstacles, elle respire la vie, avec ses joies et ses peines », nous confie Houda, doctorante en architecture à l’Université de Grenoble.
Récompensé par trois valois au festival du film francophone d'Angoulême 2019 (prix du public, du scénario et de l’actrice pour Lyna Khoudri), le long-métrage a aussi été distingué à deux reprises lors de la 45e cérémonie des Césars 2020 : meilleur premier film pour Mounia Meddour et meilleur espoir féminin pour Lyna Khoudri. Le film a aussi été sélectionné pour représenter l’Algérie aux Oscars dans la catégorie « meilleur film étranger ». Cependant, l’avant-première du film et sa sortie en salle avaient été annulées en Algérie ; or, pour concourir aux Oscars, un film doit en principe être officiellement sorti dans son pays d’origine.
Prix internationaux
- Prix « Humaritarian Award », 24e Satellite Awards, International Press Academy, Los Angeles, février 2020
- Prix « Best Arab Narrative Film », El Gouna Film Festival, Egypte, 2019
- Prix « Pilar Prize for best New Director », 64th Valladolid International Film Festival – Seminci (Espagne, 2019)