L’Arabie saoudite relève le défi des sports électroniques

En septembre 2022, le fonds souverain d’Arabie saoudite a consacré près de quarante milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro) à un nouveau conglomérat visant à transformer le Royaume en un centre mondial pour les jeux et les sports électroniques d’ici à 2030. (Shutterstock)
En septembre 2022, le fonds souverain d’Arabie saoudite a consacré près de quarante milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro) à un nouveau conglomérat visant à transformer le Royaume en un centre mondial pour les jeux et les sports électroniques d’ici à 2030. (Shutterstock)
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Publié le Dimanche 30 juillet 2023

L’Arabie saoudite relève le défi des sports électroniques

  • La croissance du sport électronique ne se limite pas à l’Arabie saoudite ou au Moyen-Orient
  • L’année dernière, PwC avait prédit qu’en 2026, l’industrie mondiale du jeu générerait 320 milliards de dollars, soit deux fois plus qu’en 2019

RIYAD: Avec le recrutement de grands noms du football et un remaniement du circuit international de golf, l’Arabie saoudite fait plus que jamais parler d’elle dans le monde du sport.

Pourtant, ce n’est pas seulement dans le football ou le golf que le Royaume cherche à devenir un leader mondial mais également dans les jeux sur console.

En septembre 2022, le fonds souverain d’Arabie saoudite a consacré près de quarante milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro) à un nouveau conglomérat visant à transformer le Royaume en un centre mondial pour les jeux et les sports électroniques d’ici à 2030. Par ailleurs, cette décision commence déjà à porter ses fruits.

Selon Vlad Belyanin, cofondateur de True Gamers, un réseau mondial de clubs de sports électroniques qui fera ses débuts au Royaume en septembre, «tous les yeux sont rivés sur l’Arabie saoudite».

Dans un entretien accordé à Arab News, il déclare: «Après le recrutement de Ronaldo par Al-Nasr et l’offre de 600 millions d’euros proposée par Al-Hilal à Lionel Messi, nous pouvons nous attendre à ce que l’Arabie saoudite intègre de grands noms des sports électroniques dans les sports traditionnels.»

«Je n’exclus pas que quelqu’un rassemble la meilleure équipe mixte du monde, en prenant des joueurs notables des esports et des sports traditionnels.»

L’investissement du fonds souverain fait partie de la stratégie nationale des jeux et des sports électroniques du Royaume pour améliorer la qualité de vie des joueurs en améliorant leur expérience, en proposant de nouvelles possibilités de divertissement et en contribuant à hauteur de 50 milliards de riyals saoudiens (13,33 milliards de dollars) au produit intérieur brut du Royaume d’ici à 2030.

La stratégie devrait conduire à la création de 39 000 nouvelles possibilités d’emploi d’ici à 2030.

Le fonds en question aurait investi plus de trois milliards de dollars dans l’industrie l’année dernière, dans le cadre de l’engagement de 38 milliards de dollars mis à la disposition de sa société Savvy Games Group.

Environ un tiers du montant annoncé sera dépensé pour l’achat d’un grand éditeur de jeux et les fonds restants seront utilisés pour acquérir des participations minoritaires dans d’autres sociétés de jeux.

Jusqu’à présent, les acquisitions ont inclu ESL et FACEIT pour 1,5 milliard de dollars en janvier 2022, Embracer Group pour un milliard de dollars en juin 2022, VSPO pour 265 millions de dollars en mars 2023, ainsi que Scopely pour 4,9 milliards de dollars en avril 2023.

Brian Ward, PDG de Savvy Games Group, explique à Arab News comment l’acquisition et la fusion du groupe ESL FACEIT ont permis la création d’une force capable d’établir la norme d’excellence en matière de compétitions d’esports et d’événements de l’industrie du jeu.

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«Le Moyen-Orient est un acteur clé de l’industrie mondiale du jeu, avec un taux de pénétration impressionnant et un engagement solide des gouvernements à investir dans le secteur.»

Alexander Schudey, directeur général et associé chez BCG

L’investissement du fonds souverain fait partie de la stratégie nationale des jeux et des sports électroniques du Royaume pour améliorer la qualité de vie des joueurs en améliorant leur expérience, en proposant de nouvelles possibilités de divertissement et en contribuant à hauteur de 50 milliards de riyals saoudiens (13,33 milliards de dollars) au produit intérieur brut du Royaume d’ici à 2030.

La stratégie devrait conduire à la création de 39 000 nouvelles possibilités d’emploi d’ici à 2030.

Le fonds en question aurait investi plus de trois milliards de dollars dans l’industrie l’année dernière, dans le cadre de l’engagement de 38 milliards de dollars mis à la disposition de sa société Savvy Games Group.

Environ un tiers du montant annoncé sera dépensé pour l’achat d’un grand éditeur de jeux et les fonds restants seront utilisés pour acquérir des participations minoritaires dans d’autres sociétés de jeux.

Jusqu’à présent, les acquisitions ont inclu ESL et FACEIT pour 1,5 milliard de dollars en janvier 2022, Embracer Group pour un milliard de dollars en juin 2022, VSPO pour 265 millions de dollars en mars 2023, ainsi que Scopely pour 4,9 milliards de dollars en avril 2023.

Brian Ward, PDG de Savvy Games Group, explique à Arab News comment l’acquisition et la fusion du groupe ESL FACEIT ont permis la création d’une force capable d’établir la norme d’excellence en matière de compétitions d’esports et d’événements de l’industrie du jeu.

L’Arabie saoudite attire l’attention du monde entier dans le secteur grâce à ses investissements et acquisitions dans les sports électroniques. (Photo fournie)
L’Arabie saoudite attire l’attention du monde entier dans le secteur grâce à ses investissements et acquisitions dans les sports électroniques. (Photo fournie)

«L’Arabie saoudite est très importante pour Savvy», soutient M. Ward. «C’est un marché très prometteur et en croissance rapide. C’est le 19e plus grand marché au monde et il y a plus de 21 millions de joueurs en Arabie saoudite, soit 70% de la population, sachant que plus de 40% sont des femmes ».

M. Ward insiste sur l’objectif de Savvy de faire de l’Arabie saoudite un centre mondial du jeu. La société est déterminée à le faire en renforçant ses capacités et en réalisant des investissements internationaux et locaux dans les jeux.

«Nous sommes convaincus que Savvy aura une incidence économique bénéfique significative en Arabie saoudite, à la fois au moyen de sa contribution directe et indirecte au PIB, de la création d’emplois et du développement des compétences», ajoute-t-il.

La croissance du sport électronique ne se limite pas à l’Arabie saoudite ou au Moyen-Orient. L’année dernière, PwC avait prédit qu’en 2026, l’industrie mondiale du jeu générerait 320 milliards de dollars, soit deux fois plus qu’en 2019.

Pourtant, malgré sa taille mondiale, le Moyen-Orient est considéré comme l’un des pôles de cette industrie en pleine croissance.

Selon un rapport du Boston Consulting Group publié en juin, plus de 60% de la population du Moyen-Orient sont des passionnés de jeux, ce qui se traduit par l’une des parts les plus élevées de téléchargements d’applications mobiles de jeux – 50% par rapport à la moyenne mondiale de 40%.

«Le Moyen-Orient est un acteur clé de l’industrie mondiale du jeu, avec un taux de pénétration impressionnant et un engagement solide des gouvernements à investir dans le secteur», déclare Alexander Schudey, directeur général et associé chez BCG dans un communiqué.


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«Des investissements record suscitent de grandes attentes. Les entrepreneurs qui veulent gagner de l’argent envisagent maintenant d’entrer sur le marché saoudien »

 

Vlad Belyanin, cofondateur de True Gamers

Il ajoute : « L’accent mis par la région sur les jeux et la création de centres de jeux dédiés en font une destination attrayante pour les sociétés de jeux mondiales ».

« La population jeune et dotée de compétences numériques, en particulier en Arabie saoudite, où 70% de la population a moins de trente ans, ainsi que les revenus disponibles plus élevés et la préférence pour les activités d’intérieur en raison des grandes chaleurs, contribuent davantage à l’essor de l’écosystème du jeu dans la région ».

Le dernier rapport du BCG a identifié quatre grandes tendances qui auront probablement la plus grande incidence sur l’avenir de l’industrie.

Il s’agit notamment de la croissance de l’audience et des changements démographiques, au moyen desquels la croissance de l’industrie du jeu élargit sa portée démographique, attirant non seulement la génération Y, qui a grandi en jouant aux jeux vidéo mais aussi ceux qui entrent dans la trentaine. L’âge moyen des joueurs est de 31 ans.

Une autre tendance est l’innovation des joueurs. En effet, les communautés de consommateurs jouent un rôle important dans la mise en place du changement au sein de l’industrie, tandis que les activités de fusions et d’acquisitions renforcent le secteur alors que les grands éditeurs, les entreprises de médias et les entreprises technologiques achètent des studios et actifs liés au jeu à l’échelle mondiale.

 

EN BREF

• La stratégie nationale des jeux et des sports électroniques de l’Arabie saoudite contribuera à hauteur de 13 milliards de dollars au produit intérieur brut du Royaume d’ici à 2030.

• Selon PwC, l’industrie mondiale du jeu générerait 320 milliards de dollars en 2026.

 

La dernière tendance identifiée par le rapport du BCG concerne les nouveaux cas d’utilisation, où l’industrie du jeu assiste à l’émergence du Métavers en tant que concept qui révolutionne les expériences numériques.

Le Royaume devient rapidement un centre mondial pour les jeux grâce aux investissements et au lancement de nouveaux produits et technologies reflétant les tendances ci-dessus.

Ce ne sont pas seulement les participants qui stimulent la croissance du secteur, mais ceux qui souhaitent regarder le sport électronique.

Selon la Consumer Technology Association, l’audience des sports électroniques sera de 519 millions de spectateurs d’ici à 2024.

La technologie et l’innovation jouent un rôle majeur dans l’industrie du sport électronique et les entrepreneurs, en particulier en Arabie saoudite, capitalisent sur ces avancées pour stimuler la croissance du secteur.


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«Nous sommes convaincus que Savvy aura une incidence économique bénéfique significative en Arabie saoudite, à la fois au moyen de sa contribution directe et indirecte au PIB, de la création d’emplois et du développement des compétences »

 

Brian Ward, PDG de Savvy Games Group

«Le sport électronique devient un terrain d’expérimentation pour l’intelligence artificielle, les puces, la visualisation et les technologies de mégadonnées», confie M. Belyanin à Arab News.

Il ajoute: «Les jeux deviennent plus accessibles. La popularité croissante des jeux sur smartphones et tablettes par rapport aux systèmes de jeu sur PC pousse les fabricants à sortir des jeux sur différentes plates-formes ».

« Les solutions de jeu multiplateformes et basées sur le cloud favorisent les jeux indépendants du matériel, alors que l’intelligence artificielle garantit un gameplay équitable. Les jeux sociaux et les sports électroniques offrent une plate-forme aux développeurs et aux joueurs pour créer des communautés de jeu saines et améliorer la portée de la marque ».

Le parrainage et la mise en place d'événements et de compétitions dans le domaine permettent aux développeurs de renforcer la notoriété de la marque et d'attirer de nouveaux joueurs, dit-il, notant comment True Gamers développe et met en œuvre de nouvelles technologies dans ses centres de cybersports.

Par exemple, True Gamers est le premier au monde à utiliser des chiens robotisés comme serveurs dans les clubs. Trois assistants mécaniques apparaîtront dans différents clubs à Dubaï et, d’ici la fin de 2024, leur nombre passera à environ vingt. La production de la technologie de test coûte 100 000 dollars, ainsi qu’une moyenne de 10 000 dollars par mois pour les mises à jour et les modifications des robots.

L’Arabie saoudite, souligne M. Belyanin, attire l’attention du monde entier dans le secteur grâce à ses investissements et acquisitions dans les sports électroniques.

«Les investissements record génèrent de grandes attentes», ajoute-t-il. « Les entrepreneurs qui veulent gagner de l’argent pensent maintenant à entrer sur le marché saoudien ».

« Ils se disent qu’il y a beaucoup d’investissements, donc beaucoup de profits. Par conséquent, ils veulent entrer sur le marché ».     

M. Belyanin poursuit: «Je pense différemment. S’il y a beaucoup d’investissements, la nouvelle culture du jeu commencera à se développer là-bas et donc il est intéressant d’y travailler ».

« C’est un travail de longue haleine, qui apportera bien plus que des gains rapides. Les tâches à grande échelle ne nous font pas peur. Nous tenons à forger l’avenir du jeu de nos propres mains ».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Abbas appelle le Hamas à libérer les otages à Gaza, frappes israéliennes meurtrières

Le président palestinien Mahmoud Abbas a appelé mercredi le Hamas à libérer les derniers otages retenus à Gaza, où des frappes israéliennes ont fait 25 morts, selon les secours, laissant des "corps calcinés" et des victimes ensevelies sous les décombres. (AFP)
Le président palestinien Mahmoud Abbas a appelé mercredi le Hamas à libérer les derniers otages retenus à Gaza, où des frappes israéliennes ont fait 25 morts, selon les secours, laissant des "corps calcinés" et des victimes ensevelies sous les décombres. (AFP)
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  • Le président palestinien a affirmé mercredi depuis Ramallah, en Cisjordanie occupée, que le Hamas avait fourni à Israël "des prétextes pour commettre ses crimes dans la bande de Gaza, le plus flagrant (de ces prétextes) étant la détention d'otages"
  • "C'est moi qui en paie le prix, notre peuple en paie le prix, pas Israël (...) Libérez-les", a déclaré Mahmoud Abbas, qui n'exerce plus d'autorité sur Gaza depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007

GAZA: Le président palestinien Mahmoud Abbas a appelé mercredi le Hamas à libérer les derniers otages retenus à Gaza, où des frappes israéliennes ont fait 25 morts, selon les secours, laissant des "corps calcinés" et des victimes ensevelies sous les décombres.

Rompant une trêve de deux mois, Israël a repris le 18 mars son offensive sur le territoire palestinien, affirmant vouloir contraindre le mouvement islamiste à libérer les otages qu'il retient depuis l'attaque du 7 octobre 2023.

Le président palestinien a affirmé mercredi depuis Ramallah, en Cisjordanie occupée, que le Hamas avait fourni à Israël "des prétextes pour commettre ses crimes dans la bande de Gaza, le plus flagrant (de ces prétextes) étant la détention d'otages".

"C'est moi qui en paie le prix, notre peuple en paie le prix, pas Israël (...) Libérez-les", a déclaré Mahmoud Abbas, qui n'exerce plus d'autorité sur Gaza depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007.

Après plus de 18 mois de guerre, l'ONU a fait état de cas de "malnutrition aiguë sévère" parmi les 2,4 millions d'habitants du territoire, dont la plupart ont été déplacés par les combats.

Selon un responsable du mouvement, une délégation du Hamas se trouve actuellement au Caire pour discuter avec les médiateurs de "nouvelles idées" visant à rétablir un cessez-le-feu.

"Vivre comme les autres" 

Mercredi, la frappe israélienne la plus meurtrière a détruit une école qui abritait des déplacés dans la ville de Gaza, dans le nord, faisant onze morts et 17 blessés, "y compris des femmes et des enfants", a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile palestinienne, Mahmoud Bassal.

"Le bombardement a provoqué un incendie massif dans le bâtiment et plusieurs corps calcinés ont été retrouvés", a-t-il dit.

Au total, 25 personnes ont été tuées dans les frappes qui ont visé plusieurs secteurs du nord de Gaza ainsi que Khan Younès, dans le sud, selon la Défense civile.

"Nous avons reçu des appels de détresse signalant plusieurs personnes disparues sous les décombres dans différentes zones de la bande de Gaza ", a affirmé Mahmoud Bassal.

Plusieurs corps enveloppés dans des linceuls blancs ont été transportés à l'hôpital al-Chifa, où se recueillaient des femmes éplorées.

"Nous ne voulons rien d'autre que la fin de la guerre pour pouvoir vivre comme le font les gens dans le reste du monde", s'exclamait Walid Al Najjar, un habitant de Khan Younès.

Selon Mahmoud Bassal, les secouristes manquent "des outils et équipements nécessaires pour les opérations de sauvetage et pour récupérer les corps".

L'armée israélienne n'a pas commenté dans l'immédiat.

Mardi, elle avait dit avoir détruit environ "40 engins du génie utilisés à des fins terroristes, y compris lors du massacre du 7 octobre".

Elle affirme que le Hamas utilise ces engins "pour poser des explosifs, creuser des tunnels souterrains, percer des clôtures de sécurité et dégager les gravats pour retrouver des armes et du matériel militaire".

Mesure "intolérable" 

Selon le ministère de la Santé du Hamas, 1.928 Palestiniens ont été tués depuis le 18 mars, portant à 51.305 le nombre de morts à Gaza depuis le début de l'offensive de représailles israélienne.

La guerre a été déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées, 58 sont toujours otages à Gaza dont 34 sont mortes, selon l'armée israélienne.

La situation est aggravée par le blocage de l'aide humanitaire imposé par Israël depuis le 2 mars.

Les ministres des Affaires étrangères français, britannique et allemand ont conjointement exhorté mercredi Israël à cesser ce blocage, y voyant une mesure "intolérable" qui expose les civils à "la famine, des épidémies et la mort".

"Plusieurs personnes souffrant de malnutrition aiguë sévère à Gaza ont été admises à l'hôpital cette semaine", a indiqué mardi le bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), ajoutant que ces cas étaient "en augmentation".

"Malgré des approvisionnements extrêmement faibles, environ 180 cuisines communautaires continuent de fonctionner chaque jour. Cependant, beaucoup d'entre elles sont sur le point de fermer car les stocks s'épuisent", a-t-il prévenu.

 


Turquie: puissant séisme de magnitude 6,2 au large d'Istanbul

Un puissant séisme de magnitude 6,2, dont l'épicentre est situé en mer de Marmara, a secoué mercredi Istanbul, sans faire de victime ni de dégât, selon les autorités turques. (AFP)
Un puissant séisme de magnitude 6,2, dont l'épicentre est situé en mer de Marmara, a secoué mercredi Istanbul, sans faire de victime ni de dégât, selon les autorités turques. (AFP)
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  • Deux secousses au moins, à une fraction de seconde d'intervalle, ont été fortement ressenties dans tous les quartiers de l'immense ville de 16 millions d'habitants située sur le Bosphore et la Mer de Marmara
  • Des milliers de personnes se sont jetées dans les rues en proie à la panique

ISTANBUL: Un puissant séisme de magnitude 6,2, dont l'épicentre est situé en mer de Marmara, a secoué mercredi Istanbul, sans faire de victime ni de dégât, selon les autorités turques.

Selon l'Agence nationale de la gestion des catastrophes AFAD et le ministre de l'Intérieur Ali Yerlikaya, "un séisme de 6,2 s'est produit au large de Silivri, en mer de Marmara" peu avant 13H00 (10H00 GMT).

Deux secousses au moins, à une fraction de seconde d'intervalle, ont été fortement ressenties dans tous les quartiers de l'immense ville de 16 millions d'habitants située sur le Bosphore et la Mer de Marmara.

Des milliers de personnes se sont jetées dans les rues en proie à la panique, ont constaté les journalistes de l'AFP.

"J'ai senti la secousse je me suis jeté dehors" confie un peintre, rencontré près de la Tour de Galata après avoir dévalé ses quatre étages.

Les autorités n'ont pas fait état de victimes ni de dégâts.

Le président Recep Tayyip Erdogan a indiqué "suivre les développements de près".

"Tous nos services d'urgence sont en état d'alerte. Aucun bâtiment ne s'est effondré selon les informations dont nous  disposons à ce stade. Nous poursuivons les recherches", a indiqué le gouvernorat d'Istanbul qui appelle "les citoyens à ne pas s'approcher de bâtiments endommagés".

La municipalité indique elle aussi suivre la situation, précisant qu'"aucun cas grave n'a été sigalé jusqu'à présent".

La hantise du "Big one" 

Outre le séisme principal, l'AFAD précise avoir enregistré trois autres secousses de magnitude 3.9 à 4.9 dans la même zone.

La Turquie est traversée par deux failles qui ont causé de nombreux drames par le passé.

Istanbul vit dans la hantise du "Big one": elle est située à 20 km de la faille nord-anatolienne et les plus pessimistes des experts prévoient un séime de magnitude 7 au moins d'ici à 2030, qui provoquerait l'effondrement partiel ou total de centaines de milliers d'édifices.

Le sud-est du pays a subi un violent tremblement de terre en février 2023 qui a fait au moins 53.000 morts et dévasté la cité antique d'Antakya, l'ex Antioche.

Le district de Silivri abrite notamment l'une des principales prisons du pays, où se trouvent notamment incarcérés le maire d'oppposition d'Istanbul Ekrem Imamoglu et le mécène et philanthrope Osman Kavala.

C'est également là qu'ont été conduits de très nombreux manifestants interpellés lors de la vague de contestation qui a suivi l'arrestation de M. Imamgolu le 19 mars, incarcéré à Silivri six jours plus tard.

Le réseau d'entraide des parents des jeunes détenus a affirmé sur X que l'établissement n'avait pas subi de dégâts.

 


1978 - Les Accords de Camp David: Un chemin trompeur vers la paix

Anouar el-Sadate (gauche) serre la main de Menahem Begin en présence du président américain Jimmy Carter. (AFP)
Anouar el-Sadate (gauche) serre la main de Menahem Begin en présence du président américain Jimmy Carter. (AFP)
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  • Si les accords ont valu à Sadate et Begin le prix Nobel, ils n'ont que peu contribué à l'établissement d'une paix durable au Moyen-Orient
  • En 1978, la population de colons ne comptait que 75,000 personnes. En 1990, elle avait triplé pour atteindre 228,000. Aujourd'hui, plus d'un demi-million de colons israéliens occupent au moins 370 colonies

CHICAGO — En se rendant à Jérusalem, le président égyptien Anouar el-Sadate poursuivait une vision ambitieuse: prévenir tout nouveau conflit et résoudre la crise israélo-arabe par voie diplomatique. Sa démarche reposait sur la conviction profonde qu'une paix véritable ne pourrait être fragmentaire. Elle devait, selon lui, englober non seulement l'Égypte et ses voisins arabes — Jordanie, Syrie et Liban — mais s'articuler essentiellement autour d'un engagement formel d'Israël à se retirer des territoires occupés et à permettre l'émergence d'un État palestinien souverain.

Face aux parlementaires israéliens réunis à la Knesset, Sadate a prononcé un discours-fleuve dont l'une des déclarations les plus marquantes résonne encore aujourd'hui : "Mon voyage n'a pas pour objectif un accord bilatéral isolant l'Égypte... Car même si tous les États du front parvenaient à un accord avec Israël, cette paix resterait fragile et illusoire tant qu'une solution équitable à la question palestinienne ne sera pas trouvée. C'est cette paix juste et pérenne que la communauté internationale appelle unanimement de ses vœux."

Sadate n'aura pas vécu assez longtemps pour constater à quel point il avait raison:  l'obstination israélienne à maintenir son emprise sur les territoires occupés allait effectivement déclencher un engrenage fatal. Cette politique d'occupation a progressivement nourri les courants extrémistes, multipliés les cycles de violence, fragilisée la stabilité de l'Égypte elle-même, et fait voler en éclats tout espoir d'une réconciliation durable dans la région.

L'objectif unique du Premier ministre israélien Menahem Begin était d'éliminer la menace militaire égyptienne, de diviser les "États du front" arabes et de bloquer les revendications en faveur d'un État palestinien.

Sadate fut naïf de faire confiance à Begin, l'un des terroristes les plus impitoyables du Moyen-Orient. Begin avait orchestré certaines des atrocités civiles les plus odieuses durant le conflit israélo-arabe de 1947-1948, notamment le massacre de près de 100 civils dans le petit village palestinien de Deir Yassine. 

Légende: La une du journal relatait l'avancement des accords, notant que le sommet avait atteint "une étape décisive".
Légende: La une du journal relatait l'avancement des accords, notant que le sommet avait atteint "une étape décisive".

Ce massacre, au cours duquel des femmes enceintes furent sauvagement assassinées et leurs corps jetés dans le puits du village, a profondément choqué la population arabe de Palestine, provoquant un exode massif de réfugiés terrorisés. Avant son discours à la Knesset, Sadate avait visité le mémorial de l'Holocauste Yad Vashem qui, ironie du sort, est édifié sur les vestiges de Deir Yassine.

Déroulé tapis rouge par Israël et les États-Unis, Sadate se vit propulsé au rang de chef d'État modèle pour son audace pacificatrice. Sa tournée américaine de 1978 prit des allures de triomphe: banquets somptueux et réceptions officielles dans les métropoles du pays. À Chicago, pourtant, un autre accueil l'attendait. J'étais là, mêlé à une foule de 500 Américains d'origine arabe, scandant notre opposition à ce que nous considérions comme une véritable reddition diplomatique.

Les Accords de Camp David ont valu à Sadate et Begin le Prix Nobel de la paix 1978, mais aussi l'opprobre du monde arabe. La Ligue arabe réagit en excluant l'Égypte et en transférant le siège de l'organisation du Caire à Tunis.

La stratégie d'Israël était transparente pour tous, sauf pour Sadate. Il signa les accords après 12 jours d'intenses négociations en 1978, du 5 au 17 septembre. Mais quelques semaines auparavant, Begin avait inauguré la colonie d'Ariel, sur des terres confisquées en Cisjordanie à plus de 16 kilomètres à l'est de la Ligne verte, devenue depuis un symbole de la guerre continue d'Israël contre l'État palestinien et le centre de l'expansion des colonies israéliennes.

Malgré cette réalité troublante sur le terrain, Sadate signa un traité de paix formel avec Israël à la Maison Blanche le 26 mars 1979, mettant officiellement fin au conflit entre les deux pays.

Dates clés

14 février 1977
Le président américain Jimmy Carter écrit à son homologue égyptien Anouar el-Sadate et au Premier ministre israélien Yitzhak Rabin pour exprimer son engagement à trouver "un règlement de paix durable au Moyen-Orient".

 21 octobre 1977
Dans une lettre manuscrite, Carter fait appel à Sadate: "Le moment est venu d'avancer, et votre soutien public précoce à notre approche est extrêmement important — peut-être vital".

 11 novembre 1977
Après l'annonce par Sadate de son intention de visiter Israël, le nouveau Premier ministre israélien, Menahem Begin, s'adresse au peuple égyptien depuis Jérusalem en plaidant pour "plus de guerres, plus d'effusion de sang".

3 août 1978
Carter adresse des lettres confidentielles à Sadate et Begin, leur proposant une rencontre.

5 septembre 1978
Sadate et Begin arrivent à Camp David pour dix jours de pourparlers.

17 septembre 1978
À 21h37, Carter, Begin et Sadate embarquent à bord de l'hélicoptère présidentiel Marine 1 et s'envolent du Maryland vers la Maison Blanche. À 22h31, Begin et Sadate signent un cadre pour la paix.

27 octobre 1978
Sadate et Begin reçoivent conjointement le Prix Nobel de la paix.

26 mars 1979
Sadate et Begin signent le traité de paix égypto israélien à Washington.

6 octobre 1981
Sadate est assassiné au Caire par des extrémistes islamiques opposés au traité de paix.

Si l'on examine les cinq fondements de l'accord, seuls deux ont franchi le cap de la concrétisation. L'Égypte a récupéré le Sinaï, sous conditions de démilitarisation, et la normalisation diplomatique formelle entre Le Caire et Tel-Aviv, mettant officiellement un terme à l'état de belligérance.
 
Les trois autres engagements sont restés lettre morte: les négociations pour résoudre la question palestinienne, avec la participation jordanienne, ont stagné; l'introduction de l'autonomie palestinienne en Cisjordanie et à Gaza dans un délai de cinq ans a échoué; et la fin des colonies israéliennes n'a même jamais été amorcée.

Les accords n'ont jamais été autorisés à entraver les plans visant à renforcer l'emprise d'Israël sur les territoires occupés. Lorsque le président américain Jimmy Carter a perdu sa réélection le 4 novembre 1980, et que Sadate a été assassiné lors d'un défilé militaire le 6 octobre 1981, Begin a reçu carte blanche pour enterrer définitivement le "rêve" de Sadate.

Malgré leurs divergences politiques, le président américain Ronald Reagan tenta de poursuivre la vision de paix au Moyen-Orient portée par Carter et proposa, en août 1982, un "gel" des colonies, exhortant Israël à accorder aux Palestiniens une "autonomie" comme étape vers un État. 

Le Premier ministre israélien Menahem Begin (gauche) et le président égyptien Anouar el-Sadate conversent et plaisantent lors d'une rencontre en juillet 1979 à Alexandrie. AFP
Le Premier ministre israélien Menahem Begin (gauche) et le président égyptien Anouar el-Sadate conversent et plaisantent lors d'une rencontre en juillet 1979 à Alexandrie. AFP

La réaction de Begin fut immédiate. Le 2 septembre 1982, avec Carter et Sadate hors-jeu, il conduisit une initiative à la Knesset pour consolider l'emprise d'Israël sur la Cisjordanie, Jérusalem Est et le plateau du Golan, augmentant la population de colons juifs. Israël, déclara le Cabinet, "se réserve le droit d'appliquer sa souveraineté sur les territoires à l'issue de la période de transition de cinq ans" vers "l'autonomie" palestinienne explicitement envisagée dans les Accords de Camp David.

En 1978, la population de colons ne comptait que 75,000 personnes. En 1990, elle avait triplé pour atteindre 228,000. Aujourd'hui, plus d'un demi-million de colons israéliens occupent au moins 370 colonies ou "avant-postes" en Cisjordanie et à Jérusalem Est.

Cette année, le 20 janvier, premier jour de son second mandat, le président américain Donald Trump a levé les sanctions imposées par l'administration Biden sur des groupes de colons d'extrême droite accusés de violences contre les Palestiniens.

Ironie du sort, alors que les accords de Camp David devaient créer un climat d'espoir et d'optimisme, leur progression limitée au seul retour du Sinaï a engendré un sentiment de fatalisme nourrissant l'extrémisme, comme en témoignent de façon dramatique les attaques meurtrières du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Si le cessez-le-feu entre Le Caire et Tel-Aviv tient toujours, l'incapacité chronique à résoudre la question palestinienne a considérablement affaibli la portée historique des accords. Ce qui devait incarner une paix globale s'est progressivement dégradé en un simple pacte de non-agression formalisé. Aujourd'hui, les relations égypto-israéliennes se résument essentiellement à une collaboration sécuritaire.

Ray Hanania est un ancien journaliste politique primé de la mairie de Chicago. Il est chroniqueur pour Arab News et anime l'émission de radio Ray Hanania. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com