PARIS: Pas de "happy end" pour 2020: fin prêts à rouvrir le 15 décembre, cinémas, théâtres et musées enragent de n'avoir désormais plus de perspective précise de réouverture avant le 7 janvier, au moins.
Le secteur culturel, dont les salles sont fermées depuis fin octobre, n'a plus qu'une seule certitude: aucune réouverture n'est à espérer avant cette date.
Face au virus et à une épidémie "qui dure plus qu'on ne l'aurait voulu", il n'était pas question d'accroître "les flux, les concentrations, les brassages de public", a martelé le Premier ministre Jean Castex.
Ni de prendre le risque de voir empirer la situation sanitaire en janvier et décaler "d'autant les perspectives d'un retour à la normale".
Et pour la suite, rien n'est sûr: "nous réexaminerons la possibilité" de rouvrir à partir du 7 janvier, "en fonction de la situation sanitaire à cette échéance" et de la façon dont se seront passées les fêtes, s'est borné à préciser le chef du gouvernement.
Le président de la République avait évoqué fin novembre une possible réouverture des lieux culturels le 15 décembre, mais seulement si la situation sanitaire le permettait. Une condition qui n'avait pas empêché artistes et exploitants de salle de tout mettre en oeuvre pour rouvrir à cette date.
Conscient de la colère à venir du monde de la culture, qui s'est déjà senti à plusieurs reprises oublié des pouvoirs publics depuis le début de la pandémie, le Premier ministre a assuré savoir "combien ces décisions sont difficiles à accepter". Et promis de poursuivre son soutien économique.
"Prendre cette décision (...) nous a été particulièrement douloureux, croyez le bien", a-t-il ajouté: "Je sais à quel point le secteur culturel s'était préparé, que les artistes ont répété, que toutes les filières étaient mobilisées, que tout était prêt pour que les rideaux se lèvent et les écrans s'illuminent".
Consternation et incompréhension
Des mots qui n'ont pas suffi à apaiser: "la culture est donc une fois de plus sacrifiée", a déploré sur les réseaux sociaux le violoncelliste Gautier Capuçon, résumant un sentiment répandu depuis les grands musées jusqu'aux cinémas et théâtres.
"Combien d’artistes ne survivront pas ? Combien d’acteurs de l’écosystème culturel ne s’en relèveront définitivement pas ? Combien de jeunes vont abandonner leur rêve ? ", a-t-il ajouté.
Sur le terrain, "c'est la catastrophe !", illustre Arnaud Vialle, propriétaire du cinéma Rex à Sarlat, fin prêt pour rouvrir avec sapin de Noël et séances réservées aux enfants des écoles de cette ville de Dordogne, avant les vacances.
"Je suis effondré pour les spectateurs, qui avaient besoin d'avoir de la joie dans leur cœur pour sortir de ce marasme", ajoute-t-il, "sans compter les distributeurs et les producteurs qui ont investi pour sortir leurs films".
"Nous sommes consternés et révoltés", a renchéri le délégué général de la Fédération nationale des cinémas français, Marc-Olivier Sebbag, qui crie au deux poids, deux mesures.
"On laisse ouverts sans changement sauf le couvre-feu des lieux qui ont favorisé le brassage et les éventuelles contaminations comme les commerces et les transports, sans distanciation sociale", pointe-t-il.
"Par contre, ceux qui ont des protocoles hyper-stricts on ne les ouvre pas alors qu'il n'y a aucun risque. C’est incompréhensible, c'est une immense injustice", s'indigne-t-il, promettant de "mobiliser tout le secteur de la culture" et d'examiner "toutes les voies de recours".
Car le désarroi est le même partout : "aucune concertation n'a été menée avec nous", se désole Nicolas Dubourg, président du Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac) qui regroupe 400 scènes nationales et centres dramatiques subventionnés. Lui non plus ne "comprend pas" cette décision.
Au théâtre de Chaillot, le directeur Didier Deschamps, qui réceptionnait le matin même le décor du prochain ballet d'Angelin Preljocaj, fait part de son "immense déception".
"La classe politique en général gagnerait beaucoup à fréquenter les lieux de culture. Ils mesureraient peut-être qu'on est aussi vital que le commerce du coin, ou la possibilité d'aller à la messe", lâche-t-il.