PARIS: Les responsables du culte naviguent entre satisfaction et scepticisme quant au projet de loi «confortant les principes républicains», qui va être présenté en Conseil des ministres mercredi.
Ils portent un regard différent en particulier sur la disposition, technique mais importante, qui entend inciter les associations cultuelles sous le régime association loi 1901, comme le sont les mosquées, à passer sous le régime de la loi 1905, plus contraignant et transparent, en contrepartie d'avantages.
Conseil français du culte musulman (CFCM)
«Le culte musulman va pouvoir s'inscrire dans le paysage cultuel français, dans le même cadre que les autres», assure à l'AFP son président Mohammed Moussaoui.
«Il y aura plus de rigueur dans la gestion des associations, ce sera plus contraignant mais au final ce sera bénéfique et il y aura moins de suspicion vis-à-vis des dons», assure-t-il.
Le projet de loi autorise par ailleurs les cultes à pouvoir tirer des revenus de biens immobiliers qu'ils auraient reçus à titre gratuit. Mais ces derniers sont rares chez les musulmans. M. Moussaoui demande donc que le législateur aille plus loin en autorisant les fidèles d'une association à pouvoir acquérir eux-mêmes de tels biens, de sorte de pouvoir financer, par exemple, le salaire de l'imam de cette association. «Il faut aller dans ce sens, si on veut qu'il y ait une émancipation du culte musulman vis-à-vis des pays étrangers», avance-t-il.
Conférence des évêques de France (CEF):
«Nous n'étions pas demandeurs de ce projet de loi car cela fait 100 ans que les relations entre l'Etat et l'Eglise se déploient, en bonne intelligence», déclare Hugues de Woillemont, porte-parole de la CEF. «Jamais ces dernières années l'Etat ne nous a dit 'vos statuts ne sont pas conformes'».
«Mais on comprend bien la volonté de l'Etat de combattre l'islamisme et le radicalisme», ajoute-t-il.
Parmi les «points d'attention», figurent les dispositions sur l'école hors contrat et à domicile: «Il y a des raisons assez variées pour des parents de ne pas mettre leurs enfants à l'école, cela peut être pour des questions parfois pas du tout religieuses, ça peut être pour des raisons pédagogiques».
Fédération protestante de France:
«Notre société doit avancer avec sagesse et discernement sur le sujet du séparatisme. Mais la loi doit être équitable et là, elle ne l'est pas vraiment», affirme François Clavairoly, son président.
«Ce projet va avoir en effet des dégâts collatéraux sur les autres cultes, en particulier les protestants», s'inquiète-t-il. Il juge ainsi que les associations protestantes (qui sont sous le régime 1905) vont être soumises à «davantage de contraintes, sur le plan du contrôle administratif et financier». Et le projet de loi n'est pas suffisamment incitatif pour les associations loi 1901, estime-t-il.
Il craint également «une intrusion de l'Etat sur les modes de désignation des ministres du culte», qui découlerait indirectement de la disposition «anti-putch» visant à éviter toute prise de contrôle d'une mosquée par des extrémistes. «La nomination d'un pasteur dans une église locale, c'est la liberté interne d'organisation du culte», dit-il, rappelant que la loi de 1905 est «une loi de séparation des Eglises et de l'Etat».
Grand rabbin de France:
«On a un texte qui rappelle l'importance de porter les valeurs de la République partout, dans tous les espaces, y compris les espaces religieux», se félicite Haim Korsia. «On va avoir des outils juridiques pour faire ce qu'on ne pouvait pas faire avant».