BEIT LAHIA: Au pied de sa maison aplatie la semaine dernière par une frappe israélienne, Najah Nabhane s'interroge sur son avenir et celui de sa famille qui dort désormais dans les décombres de sa maison, dans le nord de la bande de Gaza.
Au terme de cinq jours d'hostilités meurtrières entre des mouvements armés palestiniens et Israël, Najah Nabhane, 56 ans, tente tant bien que mal de s'occuper de ses enfants et petits-enfants, dont plusieurs sont atteints de handicaps physiques.
"J'emprunte des vêtements aux voisins pour eux. Je n'ai rien pris avec moi, j'ai à peine eu le temps de descendre dans la rue et la maison a été bombardée", dit-elle à l'AFP, à Beit Lahia.
Citant des responsables locaux, les Nations unies ont indiqué que plus de 100 maisons avaient été complètement détruites et 140 gravement endommagées en cinq jours d'affrontements.
Ceux-ci ont débuté le 9 mai lorsque l'armée israélienne a lancé des frappes meurtrières contre des commandants du Jihad islamique, mouvement palestinien qualifié de "terroriste" tant par les Etats-Unis et l'Union européenne que par Israël.
Des groupes armés à Gaza ont ensuite tiré près de 1.470 roquettes vers Israël, dont plus de 430 ont été interceptées par le système de défense anti-aérien, jusqu'à l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu samedi soir.
Les affrontements ont coûté la vie à 34 Palestiniens, dont un tué par une roquette palestinienne sur le territoire israélien. Côté israélien, une personne est morte, selon les services de secours israéliens.
Contactée par l'AFP, l'armée israélienne n'a pas expliqué pourquoi le domicile des Nabhane avait été visé.
La famille dit avoir été avertie par téléphone par les autorités israéliennes de l'imminence d'une frappe.
Sans-abris
"Les gens criaient et nous nous sommes enfuis", raconte à l'AFP Bilal Nabhane, 35 ans.
"Maintenant, 45 personnes sont ici (à la rue), où iront-elles? Elles ont besoin d'un abri", dit l'homme qui gagne environ 10 shekels (2,50 euros) par jour en vendant du persil au marché.
A travers la bande de Gaza, mince bande de terre où vivent entassés 2,3 millions de Palestiniens, sous blocus israélien depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007, les différentes guerres avec Israël ont laissé leurs traces.
A Deir al-Balah, dans le centre de Gaza, un quartier a de nouveau été défiguré la semaine dernière.
Aujourd'hui, des enfants grimpent sur des tas de béton, d'où sortent des tiges métalliques, vestiges d'habitations.
Celle de Mohammed Zidane, 29 ans, a échappé à un raid, mais l'explosion d'un autre immeuble a été si puissante qu'elle a défoncé les murs. Depuis, il dort avec sa famille dans la rue.
"Pour cibler une seule personne, on n'a pas besoin de détruire tout un complexe d'appartements", s'indigne-t-il. "Je vis chez moi, avec mes enfants. Je suis occupé par mon travail. Qu'est-ce j'ai fait pour mériter ça?"
Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne n'a pas expliqué pourquoi elle avait ciblé ce quartier.
Durant son opération, elle a accusé des membres du Jihad islamique de se cacher délibérément dans des zones résidentielles et assuré faire le maximum pour éviter les pertes civiles.
La dernière escalade meurtrière entre le Jihad islamique à Gaza et Israël datait d'août 2022, et une guerre de 11 jours avait opposé en mai 2021 des mouvements palestiniens de Gaza et Israël.
«Rêves»
Dans la bande de Gaza, où le taux de chômage atteint les 53% selon le Bureau palestinien des statistiques, reconstruire sa maison est un défi pour de nombreux habitants.
"J'espère pouvoir réaliser mon rêve: celui d'offrir une maison à mes enfants ... Je dois les emmener maintenant chez les voisins pour se laver et emprunter des vêtements", se désole Najah Nabhane.
Une de ses filles, handicapée, se tient près d'elle.
"Je suis assise dans un fauteuil roulant qui m'a été donné, le mien est cassé, sous les décombres", explique Hanine Nabhane à l'AFP.
Dans les décombres se trouvaient aussi ses rêves, dit la jeune femme. "Et mes rêves ont disparu."