BUENOS AIRES: Le Sénat argentin, après la Chambre des députés, a voté vendredi une loi instituant un impôt extraordinaire sur les grands fortunes, concernant quelque 12 000 personnes, afin de lutter contre l'épidémie de coronavirus et aider les plus démunis et les petites entreprises.
Cet impôt défendu par la majorité soutenant le président Alberto Fernandez est censé rapporter quelque trois milliards de dollars.
« Personne ne devra vendre des machines ou des terres », a assuré la directrice de l'autorité fiscale argentine, Mercedes Marco del Pont, dans un pays où la richesse est avant tout celle des grands producteurs agricoles.
L'impôt ne concernera que près de 12 000 contribuables, détenteurs de liquidités supérieures à 25 fois le montant cette taxe, selon Mme Marco del Pont. Ce nouvel impôt a toutefois été vivement critiqué par l'opposition libérale du mouvement Juntos por el Cambio (Ensemble pour le changement) de l'ancien président Mauricio Macri, qui le considère comme « confiscatoire ».
Quelque 40,9% des 44 millions d'Argentins vivent sous le seuil de pauvreté, le taux de chômage dépasse les 10% et l'économie est en récession depuis 2018. Le produit intérieur brut (PIB) argentin devrait chuter de 11% cette année, selon la Banque centrale, en raison notamment de l'épidémie qui a fait plus de 39.000 morts et 1,5 millions de personnes contaminées.
Quelque 20% du produit de cet impôt viendra en aide au système de santé, 20% à l'aide aux petites et moyennes entreprises, 15% à des aides sociales, 20% à des bourses pour les étudiants et 25% à des entreprises dans le secteur du gaz naturel.
Le plus important organisme patronal d'Argentine, l'Association argentine des entrepreneurs (AEA), a critiqué la mesure qui, a-t-elle déclaré, « affecte la propriété privée, frappe l'investissement, la production et l'emploi et suscite un grand découragement ».
Le président de la puissante Société rurale argentine, qui représente les producteurs agricoles, a dit redouter que cette taxe "extraordinaire » ne devienne permanente.
« On veut présenter (cet impôt) comme une contribution des plus riches, mais nous savons ce qui se passe avec ces taxes uniques, elles sont là pour toujours », a-t-il déclaré.
Mais pour Hernan Letcher, directeur du Centre d'études de politique économique (Cepa), cette taxe n'a rien de spécifique à l'Argentine quand « au moins 11 pays d'Europe et d'Amérique latine », assure-t-il, cherchent à réduire les inégalités par l'impôt.