ANKARA: L’annonce par Recep Tayyip Erdogan de la mort du chef de Daech la semaine dernière met en évidence le rôle de premier plan que joue la Turquie concernant la sécurité régionale et elle renforce les affirmations du président à faire preuve de sévérité vis-à-vis des terroristes dans les jours précédant les élections, déclarent des analystes.
Le président turc a déclaré le 30 avril que des agents des services de renseignement turcs (MIT) avaient tué Abou Hussein al-Qourachi en Syrie la veille, sans donner aucun autre détail. Reuters rapporte que, selon des sources locales et de sécurité, il serait mort lors d’un raid dans la ville de Jandaris, dans le nord du pays, qui est contrôlé par des groupes rebelles soutenus par la Turquie.
M. Erdogan s’engage à «poursuivre notre lutte contre les organisations terroristes».
L’ancien chef de Daech, Abu Ibrahim al-Qourachi, est mort en février de l’année dernière lors d’un raid américain contre son repaire dans le nord de la Syrie. Son prédécesseur, Abu Bakr al-Baghdadi, a été tué près d’Idlib en octobre 2019 lors d’un autre raid américain.
Abu Hussein al- Qourachi a été nommé chef de Daech en novembre 2022.
«Le rythme opérationnel des frappes américaines contre les dirigeants de Daech signifie que nous connaissons à peine l’identité de ces individus. En réalité, nous ne connaissons que leur nom de guerre», déclare Colin P. Clarke, directeur de recherche au groupe Soufan, dans un entretien accordé à Arab News.
«Les derniers califes de l’État islamique (Daech) n’ont presque laissé aucune trace sur les réseaux sociaux, car ils étaient trop occupés à essayer de rester en vie.»
De même, les Turcs sont «désormais en mesure de suivre de près ces dirigeants de Daech et d’agir. Ainsi, Daech en Syrie est sous le choc des éliminations ciblées répétées contre ses cadres supérieurs», soutient-il.
M. Clarke s’attend à ce que ces opérations soient programmées de manière à ce que M. Erdogan puisse en tirer un profit électoral maximal.
«Il s’est toujours imposé comme figure forte et il s’efforce de créer ce contraste lors de cette élection avec le chef de l’opposition, Kemal Kilicdaroglu», indique-t-il.
«Le président Erdogan a nourri cette image d’homme fort au cours de son mandat. Vanter les mérites des opérations antiterroristes de haut niveau lui permettra de défendre cette cause.»
Le MIT a déjà arrêté un collecteur de fonds de Daech, Kasim Guler, également connu sous le nom d’«Abu Usama al-Turki», alors qu’il tentait d’entrer en Turquie en juin 2021 avec des armes et des explosifs.
Il aurait planifié l'assassinat d'hommes politiques, dont Kemal Kilicdaroglu.
Les services en question ont également détenu des personnalités de premier plan de Daech qui avaient dirigé plusieurs attentats-suicides en Turquie.
La Turquie a désigné Daech comme groupe terroriste en 2013. Ce dernier a programmé une série d’opérations depuis, dont un attentat-suicide en octobre 2015 lors d’une marche pour la paix à Ankara qui a tué cent neuf personnes.
Les forces de sécurité turques ont mené une répression intense contre le groupe dans les mois qui ont précédé les élections du 14 mai dans le pays. Neuf ressortissants étrangers ont été arrêtés lors d’une opération anti-Daech à Ankara la semaine dernière, portant à trente-cinq le nombre total d’arrestations en Turquie depuis le début de l'année.
Nihat Ali Ozcan, analyste de sécurité au sein du groupe de réflexion Tepav basé à Ankara, affirme que l’opération contre le chef de Daech le mois dernier en Syrie était également un message pour l’Occident.
«Cela prouve que la Turquie a joué un rôle actif dans la lutte contre tous les groupes terroristes radicaux», précise-t-il à Arab News.
«La Turquie participe toujours activement à cet effort régional de lutte contre le terrorisme et elle cherche à montrer qu’elle ne cible pas seulement le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), mais aussi Daech», explique M. Ozcan.
Dans le même temps, les forces turques poursuivent leur opération contre le PKK dans le nord de l’Irak en menant des frappes aériennes contre des repaires.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com