Pourquoi un conflit entre deux dirigeants militaires soudanais a pris le monde par surprise

Le général Abdel Fattah al-Burhan, à droite, et Mohammed Hamdan Dagalo, à gauche, assistant à une cérémonie à Khartoum le 17 août 2019, au cours de laquelle ils ont signé une «déclaration constitutionnelle» qui a ouvert la voie à une transition vers un régime civil (Photo, AFP).
Le général Abdel Fattah al-Burhan, à droite, et Mohammed Hamdan Dagalo, à gauche, assistant à une cérémonie à Khartoum le 17 août 2019, au cours de laquelle ils ont signé une «déclaration constitutionnelle» qui a ouvert la voie à une transition vers un régime civil (Photo, AFP).
Quatre ans après la signature par le dirigeant militaire d’une part et le dirigeant de la protestation de l’autre d’une «déclaration constitutionnelle» qui a ouvert la voie à une transition vers un régime civil, le Soudan est en proie à des troubles causés par des affrontements entre les forces armées et paramilitaires du pays (Photo, AFP).
Quatre ans après la signature par le dirigeant militaire d’une part et le dirigeant de la protestation de l’autre d’une «déclaration constitutionnelle» qui a ouvert la voie à une transition vers un régime civil, le Soudan est en proie à des troubles causés par des affrontements entre les forces armées et paramilitaires du pays (Photo, AFP).
Cette photo satellite prise le 28 avril 2023 et diffusée par Maxar Technologies, montre un point de passage important à la frontière soudanaise d'Argeen avec l'Égypte, alors que des bus font la queue pour évacuer les passagers vers l'Égypte (Photo, AFP).
Cette photo satellite prise le 28 avril 2023 et diffusée par Maxar Technologies, montre un point de passage important à la frontière soudanaise d'Argeen avec l'Égypte, alors que des bus font la queue pour évacuer les passagers vers l'Égypte (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 01 mai 2023

Pourquoi un conflit entre deux dirigeants militaires soudanais a pris le monde par surprise

  • Des tensions couvaient entre Al-Burhan et Hemedti, mais peu de personnes extérieures avaient perçu la profondeur de leur méfiance réciproque
  • Certains Soudanais pensent que la communauté internationale et les agences d'aide auraient dû anticiper les conséquences de ce conflit

ROME: Bien que le Soudan soit en proie à des troubles politiques depuis que le dirigeant autoritaire Omar al-Bachir a été renversé en 2019, l’explosion soudaine de la violence qui a commencé le 15 avril semble avoir pris le monde par surprise.

Les explosions et les fusillades dans la capitale Khartoum et ailleurs à travers le pays, au mépris des tentatives répétées de négocier un cessez-le-feu, ont forcé les nations à évacuer à la hâte le personnel des ambassades et les citoyens qui risquaient d’être pris dans les tirs croisés.

Toutefois, pour de nombreux Soudanais contraints de décider s’ils doivent rester chez eux, privés des services de base, alors que la nourriture et les médicaments se font rares, ou risquer leur vie en empruntant l’une des routes de plus en plus anarchiques pour quitter le pays, les signes de la crise à venir n’étaient que trop évidents.

Les affrontements entre les forces armées soudanaises, dirigées par le dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhan, et un groupe paramilitaire, les Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par Mohammed Hamdan Dagalo, également connu sous le nom de Hemedti, découlent de projets visant à incorporer ces dernières dans l’armée régulière.

Les tensions entre les deux hommes au sujet du plan, qui s’inscrit dans le cadre de la transition démocratique, n’ont cessé de croître depuis des mois, mais de nombreux membres de la communauté internationale ne semblent pas avoir perçu la profondeur de leur méfiance mutuelle – et ont donc été pris au dépourvu.

«C’est le pire des scénarios», a déclaré Volker Perthes, le représentant spécial des Nations unies au Soudan, à ses collègues lors d’une réunion virtuelle peu après le début des violences. «Nous avons tenté une diplomatie de la dernière chance... et avons échoué.»

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Le général Abdel Fattah Al-Burhan, à gauche, et son grand rival, le général Mohamed Hamdan Dagalo (photos AFP).

Ces derniers jours, les avions de combat soudanais ont continué à pilonner les positions paramilitaires à Khartoum, tandis que des combats meurtriers et des pillages ont éclaté dans la région troublée du Darfour, bien que l’armée et les forces de sécurité soudanaises aient accepté de prolonger l’accord de cessez-le-feu.

Selon l’Organisation internationale pour les migrations des Nations unies, plus de 75 000 personnes ont fui leur domicile pour échapper aux combats, tandis que des dizaines de milliers d’autres ont gagné les pays voisins, notamment le Tchad, l’Égypte, l’Éthiopie et le Sud-Soudan.

Beaucoup de Soudanais estiment que les puissances étrangères et les agences d’aide internationales auraient dû être bien mieux préparées à l’éventualité que la querelle entre les deux généraux dégénère en conflit armé et à l’urgence humanitaire qui en résulterait.

«Hemedti et Al-Burhan sont prêts à se battre jusqu’à la mort», a déclaré Khaled Albaih, caricaturiste politique et écrivain soudanais.

Albaih, qui a défendu la cause des artistes et des créateurs au Soudan, pense que les Soudanais ont senti ces derniers mois que la situation atteignait un point de rupture.

«Tout le monde l’a vu venir. Tout le monde savait que quelque chose allait bientôt se produire», a-t-il déclaré à Arab News. «L’armée construisait des défenses et le chef des Janjawids (Hemedti) entrait dans la ville. On pouvait sentir la tension. Il n’y avait pas d’argent dans le pays, à l’exception de celui qui se trouvait entre les mains de Hemedti.»

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Khaled Albaih (Photo, Fournie).

Albaih qualifie ce qui se passe actuellement de «guerre retardée».

«Les organisations d’aide internationale allaient de l’avant, opposant les deux parties plus pour la stabilité du pays que pour la démocratie proprement dite», a-t-il déclaré.

«C’est ce qui est troublant. Nous (le public soudanais) luttons pour la paix depuis des années et nous n’avons toujours pas trouvé de place à la table. Il semble que le message ait été de se procurer une arme et de s’asseoir à la table.»

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Des militants soudanais pro-démocratie avaient manifesté pour la réintégration d'Abdalla Hamdok, le Premier ministre évincé lors du coup d'État militaire d'octobre 2021, en vain (Photo, AFP).

Le contre-argument est bien sûr qu’il n’y a pas eu de «signes avant-coureurs» d’une rupture dramatique et violente. Les partisans de cette théorie affirment que si une escalade était toujours possible, voire inévitable, la communauté internationale a été complètement prise au dépourvu par l’ampleur et la férocité de la querelle.

«Je pense que la critique est déplacée», a déclaré à Arab News Martin Plaut, chercheur principal à l’Institute of Commonwealth Studies. «Oui, il y a eu des tensions entre Al-Burhan et Hemedti, mais elles auraient pu encore durer dix-huit mois et s’éteindre, ou elles auraient pu exploser, et c’est exactement ce qui s’est passé. Mais il est impossible de prédire quand cela se produira.»

Le vrai problème, selon Plaut, «c’est que Hemedti disposait de forces suffisamment importantes pour contrer directement l’armée soudanaise, et que celle-ci en était consciente. Comme le dit le proverbe africain, on ne peut pas avoir deux balles sur le terrain. Le monopole de la force, qui est censé être le droit de l’armée, n’allait tout simplement plus tenir.»

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Martin Plaut (Photo, Fournie).

Cependant, au moins un diplomate éminent a reconnu que les puissances étrangères pourraient avoir contribué à la crise en accordant la légitimité à Al-Burhan et à Hemedti, tout en ignorant leur antipathie non voilée l’un envers l’autre et leur réticence à coopérer.

Dans une tribune publiée dans le Washington Post, Jeffrey Feltman, ancien envoyé des États-Unis pour la Corne de l’Afrique, a qualifié le conflit de «tristement prévisible», compte tenu de la volonté de l’Occident de se plier aux exigences des deux hommes forts soudanais.

«Nous avons évité de tirer les conséquences des actes répétés d’impunité qui auraient pu forcer un changement de calcul», a-t-il écrit. «Nous avons plutôt, par réflexe, apaisé et accommodé les deux seigneurs de guerre. Nous nous sommes considérés comme pragmatiques. Avec le recul, un vœu pieux serait une plus juste description.»

Al-Burhan et Hemedti ont tous deux commencé leur carrière dans les champs de bataille du Darfour, où une rébellion tribale a dégénéré en nettoyage ethnique au début des années 2000.

Après la chute d’Al-Bachir en 2019, suite à des mois de troubles, le pays s’était engagé sur la voie d’une transition démocratique. Le processus a toutefois été interrompu en 2021, lorsque Al-Burhan et Hemedti ont uni leurs forces pour organiser un coup d’État contre le gouvernement de transition d’Abdallah Hamdok.

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L'ancien Premier ministre soudanais Abdalla Hamdok (à droite), avec les généraux Abdel Fattah Al-Burhan (au milieu) et Mohamed Hamdan Dagalo (à gauche) lors d'une cérémonie de signature à Khartoum pour rétablir la transition vers un régime civil (Photo, AFP).

Bien qu’un nouveau cadre soutenu par les Nations unies et les États-Unis ait finalement été élaboré à la fin de 2022 pour faciliter la transition vers un régime civil et mettre en œuvre une réforme de la sécurité, beaucoup pensaient qu’une épreuve de force entre Al-Burhan et Hemedti était inévitable.

En effet, leur relation s’est manifestement transformée en une antipathie mutuelle, culminant dans de violents affrontements qui menacent maintenant de dégénérer en une véritable guerre civile.

Dans un article d’opinion cinglant paru la semaine dernière dans le Wall Street Journal, le chroniqueur américain Walter Russell Mead, soulignant que le Soudan a connu 17 tentatives de coups d’État, deux guerres civiles et un conflit génocidaire depuis son indépendance en 1956, a déclaré: «Un hamster aveugle a plus de chances de construire un sous-marin nucléaire que le Département d’État d’orchestrer une transition démocratique à Khartoum.»

La question qui se pose aujourd’hui à la communauté internationale est de savoir si elle porte une responsabilité morale dans les efforts diplomatiques qui, rétrospectivement, ont renforcé les mains d’Al-Burhan et d’Hemedti, et si elle n’a pas donné la priorité à la construction de la paix et à la résolution du conflit lorsqu’elle en avait l’occasion.

Le consensus général semble être qu'à mesure que l'ordre économique et politique occidental s’estompe au Moyen-Orient et en Afrique, Al-Burhan et Hemedti devraient être considérés pour ce qu’ils sont: de puissants commandants régionaux désireux de saisir les opportunités économiques et de s’enraciner, et non des démocrates en herbe désireux de partager le pouvoir avec la société civile.

Entre-temps, le Programme alimentaire mondial a averti que les violences pourraient plonger des millions de personnes supplémentaires dans la famine au Soudan, un pays où 15 millions de personnes – un tiers de la population – ont déjà besoin d’une aide pour éviter la famine.

Selon les chiffres du ministère de la Santé, jusqu’à vendredi, au moins 512 personnes ont été tuées et 4 193 blessées dans les combats, bien que le bilan réel soit probablement beaucoup plus élevé. Le syndicat des médecins soudanais a prévenu que l’effondrement du système de santé était «imminent».

Les appels lancés par le chef de l’ONU, Antonio Guterres, aux deux généraux soudanais belligérants pour qu’ils «placent les intérêts de leur peuple au premier plan et fassent taire les armes» ont jusqu’à présent été en vain.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


L'émir du Koweït demande au nouveau gouvernement de mener des réformes

L’émir du Koweït, le cheikh Mechaal al-Ahmed al-Jaber al-Sabah. (AFP)
L’émir du Koweït, le cheikh Mechaal al-Ahmed al-Jaber al-Sabah. (AFP)
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  • L’émir du Koweït, le cheikh Mechaal al-Ahmed al-Jaber al-Sabah, s’est entretenu mercredi avec le nouveau Premier ministre et son gouvernement
  • Le cheikh Mechaal a nommé le cheikh Ahmed Abdallah al-Ahmed al-Sabah au poste de Premier ministre en avril

RIYAD: L’émir du Koweït, le cheikh Mechaal al-Ahmed al-Jaber al-Sabah, s’est entretenu mercredi avec le nouveau Premier ministre et son gouvernement.

Selon l’agence de presse du Koweït, le cheikh Mechaal a déclaré: «Nous entamons une nouvelle phase de réformes, ce qui signifie que des mesures sérieuses doivent être prises.»

Il a ajouté que les ministres devraient «accélérer la mise en œuvre des projets de développement tant attendus, s’occuper des dossiers nécessaires et travailler sur les projets d’infrastructure, améliorer les soins de santé et le système éducatif et veiller à la transparence et à la préservation des fonds publics».

Le cheikh Mechaal a nommé le cheikh Ahmed Abdallah al-Ahmed al-Sabah au poste de Premier ministre en avril et il a dissous le Parlement vendredi dernier lors d’un discours télévisé.

Il a exhorté les ministres à faire en sorte que le Koweït dispose d’une économie forte et durable en investissant dans le capital humain et en assurant la promotion de l’innovation et de la recherche scientifique.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L’université du prince Sultan organise une table ronde sur l’exploration spatiale

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  • L’avenir des missions humaines dans l’espace a été évoqué lors de la table ronde organisée à l’université du prince Sultan
  • Le PDG de l’Agence spatiale saoudienne, Mohammed al-Tamimi, et l’ambassadeur des États-Unis au Royaume, Michael Ratney, étaient présents à la table ronde

RIYAD: Mardi, des délégations de la Nasa et de l’Agence spatiale saoudienne se sont rendues à l’université du prince Sultan afin de discuter avec les étudiants de l’avenir des missions humaines dans l’espace.

Une table ronde intitulée «Au-delà de la Terre: voyages vers les étoiles» a réuni l’administrateur de la Nasa, Bill Nelson, et les astronautes saoudiens Rayannah Barnawi, Ali al-Ghamdi et Mariam Fardous, qui ont partagé leurs propres expériences dans l’espace.

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Le président de l’Agence spatiale saoudienne, Abdallah al-Swaha, s’est récemment entretenu avec l’administrateur de la Nasa, Bill Nelson. (Photo fournie)

Ils ont par ailleurs évoqué l’avenir des missions humaines dans l’espace et ont encouragé les étudiants de l’université à participer aux aspirations du Royaume dans le domaine spatial.

Le PDG de l’Agence spatiale saoudienne, Mohammed al-Tamimi, et l’ambassadeur des États-Unis au Royaume, Michael Ratney, étaient également présents à cette table ronde. 

 


Tunisie: le bâtonnier dénonce des «abus de pouvoir» après l'arrestation d'avocats

L'avocat tunisien Hatem Meziou (au centre) s'adresse aux journalistes lors d'une conférence de presse au siège du barreau de Tunis à la suite d'une descente de police quelques jours plus tôt, le 14 mai 2024 (Photo, AFP).
L'avocat tunisien Hatem Meziou (au centre) s'adresse aux journalistes lors d'une conférence de presse au siège du barreau de Tunis à la suite d'une descente de police quelques jours plus tôt, le 14 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Les deux avocats ont été emmenés de force par des policiers alors qu'ils se trouvaient à la Maison de l'avocat
  • Depuis que le président Saied s'est emparé des pleins pouvoirs à l'été 2021, plusieurs ONG ont déploré une régression des droits et libertés

TUNIS: Le bâtonnier de l'Ordre des avocats en Tunisie a appelé mardi à mettre fin aux "abus de pouvoir" après l'intervention musclée de la police à deux reprises dans des locaux professionnels pour arrêter des avocats.

Lors d'une conférence de presse, Hatem Meziou a demandé au président tunisien Kais Saïed d'"intervenir en urgence", réclamant "une justice indépendante et équitable, sans abus de pouvoir ni recours à la violence".

Depuis que le président Saied s'est emparé des pleins pouvoirs à l'été 2021, plusieurs ONG ont déploré une régression des droits et libertés dans le pays berceau du Printemps arabe.

Le bâtonnier a critiqué "des actes criminels graves" commis selon lui par des policiers lors des arrestations mouvementées samedi de l'avocate et chroniqueuse Sonia Dahmani, et lundi soir de leur confrère Mehdi Zagrouba.

"Ils nous ont traités comme des criminels ou des barbares. Nous ne sommes pas des hors-la-loi", a protesté le bâtonnier, soulignant que toute arrestation d'avocat nécessite des autorisations de la corporation.

Les deux avocats ont été emmenés de force par des policiers alors qu'ils se trouvaient à la Maison de l'avocat, siège de  l'Ordre, ce qui reflète "un manque de respect pour la profession", a ajouté M. Meziou.