Sanaa : Des dizaines de prisonniers de guerre, dont des Saoudiens, ont été libérés samedi dans le cadre d'un échange transfrontalier entre une coalition militaire dirigée par l'Arabie saoudite et la milice Houthi soutenue par l'Iran, a déclaré le Comité international de la Croix-Rouge.
Les vols reliant l'Arabie saoudite et le territoire tenu par les Houthis au Yémen faisaient partie d'un transfert de plusieurs jours, impliquant près de 900 détenus, qui intervient au milieu de pourparlers de paix qui ont fait naître l'espoir de mettre fin à la guerre de huit ans au Yémen.
Le premier vol de la journée a décollé de la ville d'Abha, dans le sud de l'Arabie saoudite, avant 09h00 (06h00 GMT), à destination de Sanaa, la capitale du Yémen tenue par les Houthis, avec 120 prisonniers de la milice houthie, a déclaré Jessica Moussan, conseillère aux affaires publiques et aux médias du CICR.
Il a été suivi d'un vol en provenance de Sanaa transportant 20 anciens détenus, dont 16 Saoudiens et trois Soudanais.
Le Soudan fait partie de la coalition dirigée par l'Arabie saoudite et a fourni des troupes au sol pour les combats.
En outre, 100 Houthis devaient être transportés sur trois vols vers Sanaa depuis Mokha sur la côte de la mer Rouge, une ville détenue par le gouvernement yéménite soutenu par la coalition.
Un journaliste de l'AFP à Abha a déclaré qu'au moins trois bus avaient amené les prisonniers sur le tarmac de l'aéroport d'Abha, qui avait déjà été attaqué par des drones et des missiles houthis.
Des fauteuils roulants ont été placés près des bus pour emmener certains des prisonniers à l'avion.
Vendredi, 318 prisonniers ont été transportés sur quatre vols entre Aden et Sanaa, contrôlés par le gouvernement, pour retrouver leurs familles avant la semaine prochaine, la fête musulmane de l'Aïd Al-Fitr.
Le nombre total de prisonniers de guerre des deux côtés est inconnu.
L'échange en cours est une mesure de renforcement de la confiance qui coïncide avec une activité diplomatique intense pour mettre fin à la guerre du Yémen, qui a fait des centaines de milliers de morts dans les combats ainsi que des effets conséquents comme l'insécurité alimentaire et le manque d'accès aux soins de santé.
Selon les analystes, huit ans après avoir mobilisé une coalition pour écraser les Houthis, les Saoudiens ont accepté le fait que cet objectif ne sera pas atteint et cherchent à réduire leur engagement militaire.
Le prince héritier Mohammed ben Salmane, qui était ministre de la Défense, âgé de 29 ans au début de la guerre, est depuis devenu le dirigeant de facto du royaume et tient à se concentrer sur son vaste programme de réformes intérieures "Vision 2030".
La stratégie de sortie saoudienne semble avoir pris un nouvel élan grâce à un accord de rapprochement historique annoncé avec l'Iran le mois dernier.
L'accord négocié par la Chine appelle les poids lourds du Moyen-Orient à rétablir pleinement les relations diplomatiques après une rupture de sept ans, et a le potentiel de rétablir les relations régionales.
L'Arabie saoudite fait également pression pour la réintégration dans la Ligue arabe de l'allié syrien de l'Iran, plus d'une décennie après sa suspension suite à la répression brutale du président des manifestations pro-démocratie par Bachar Assad.
Vendredi, le royaume, qui s'était autrefois ouvertement fait le champion de l'éviction d'Assad, a accueilli des diplomates de haut niveau de huit autres pays arabes dans la ville de Djedda, sur la mer Rouge, pour des pourparlers sur la Syrie, à l'issue de laquelle il a publié une déclaration soulignant «l'importance d'avoir un rôle de leadership arabe dans les efforts pour mettre fin à la crise.
Au Yémen, les combats actifs ont diminué au cours de l'année écoulée à la suite d'une trêve négociée par l'ONU qui a officiellement expiré en octobre mais qui a largement tenu.
Il y a une semaine, une délégation saoudienne s'est rendue à Sanaa, tenue par les Houthis depuis 2014, pour des pourparlers visant à relancer la trêve et à jeter les bases d'un cessez-le-feu plus durable.
La délégation, conduite par l'ambassadeur Mohammed Al-Jaber, a quitté Sanaa jeudi soir sans une trêve finalisée mais avec des plans pour de nouvelles discussions, selon des sources houthies et gouvernementales yéménites.
Même si l'Arabie saoudite parvient à négocier une sortie de guerre, les combats pourraient reprendre entre les différentes factions yéménites.
"L'Arabie saoudite a du mal à réduire son implication militaire au Yémen et (...) cherche une paix durable à long terme qui lui permettra de se concentrer sur ses priorités économiques", a déclaré Sanam Vakil, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Chatham. Maison, a déclaré à l'AFP.
"Pourtant, malgré cette intention, elle sera le courtier, l'investisseur et le garant du conflit de longue date du Yémen."