France/retraites: nouvelle mobilisation dans un contexte crispé

La secrétaire générale du syndicat français CGT, Sophie Binet (à gauche), à côté de la déléguée générale de l'Union syndicale Solidaires (SUD), Murielle Guilbert (à gauche), Le secrétaire général de Force ouvrière (FO) Frédéric Souillot (R) et le secrétaire général de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) Laurent Berger (C) lors d'une conférence de presse à l'issue des entretiens entre le Premier ministre français et les représentants intersyndicaux à l'hôtel de Matignon à Paris, le 5 avril 2023, après qu'une réforme des retraites a été imposée au Parlement par le gouvernement français sans vote, en recourant à l'article 49. 3 de la Constitution. (Photo, AFP)
La secrétaire générale du syndicat français CGT, Sophie Binet (à gauche), à côté de la déléguée générale de l'Union syndicale Solidaires (SUD), Murielle Guilbert (à gauche), Le secrétaire général de Force ouvrière (FO) Frédéric Souillot (R) et le secrétaire général de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) Laurent Berger (C) lors d'une conférence de presse à l'issue des entretiens entre le Premier ministre français et les représentants intersyndicaux à l'hôtel de Matignon à Paris, le 5 avril 2023, après qu'une réforme des retraites a été imposée au Parlement par le gouvernement français sans vote, en recourant à l'article 49. 3 de la Constitution. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 06 avril 2023

France/retraites: nouvelle mobilisation dans un contexte crispé

  • Les autorités prévoient de leur côté une mobilisation moins massive, avec entre 600 000 et 800 000 personnes, dont 60 000 à 90 000 à Paris. Au total, 11 500 policiers et gendarmes seront mobilisés
  • Le projet phare du second mandat d'Emmanuel Macron est sur les rails après avoir été adopté au forceps le 20 mars à l'issue de semaines de manifestations et de tractations stériles à l'Assemblée nationale

PARIS: Une nouvelle journée d'action contre la réforme des retraites d'Emmanuel Macron, la 11e depuis janvier, a débuté jeudi en France dans un climat de plus en plus crispé entre les organisations syndicales et l'exécutif, qui parie sur un essoufflement du mouvement.

Les perturbations et le nombre de grévistes s'annoncent d'ores et déjà moins importants que lors des précédentes journées d'action, notamment dans les transports, plus fluides, et dans l'éducation, où le ministère a recensé moins de 8% d'enseignants grévistes.

Mais les syndicats tablent sur une mobilisation massive dans les cortèges organisés dans la journée en France contre le relèvement de 62 à 64 ans de l'âge de départ à la retraite. "Il y a une grosse contestation" contre cette réforme qui "ne passe toujours pas", a souligné le patron du syndicat réformiste CFDT, Laurent Berger.

Les autorités prévoient de leur côté une mobilisation moins massive, avec entre 600 000 et 800 000 personnes, dont 60 000 à 90 000 à Paris. Au total, 11 500 policiers et gendarmes seront mobilisés, alors que les derniers cortèges ont été émaillés de tensions.

Des blocages de lycées et de sites universitaires se sont produits jeudi matin à Lyon (est), Rennes (ouest), Lille (nord) ou Paris, dont celui de la prestigieuse université de la Sorbonne.

Des actions de blocages aux portes de grandes villes ont par ailleurs provoqué des embouteillages.

En dépit de l'essoufflement des grèves après bientôt trois mois de bras de fer, des manifestants affichent toujours une détermination à toute épreuve, à l'image de Davy Chrétien, à Marseille (sud): "Nous n'avons toujours pas lâché et nous n'allons pas le faire", prévient ce fonctionnaire territorial de 50 ans.

Conseil constitutionnel

De son côté, le gouvernement fait le dos rond en attendant la décision du Conseil constitutionnel, qui se prononcera le 14 avril sur la constitutionnalité de cette réforme très impopulaire. Cette haute juridiction peut censurer la loi, la valider totalement ou partiellement.

Le projet phare du second mandat d'Emmanuel Macron est sur les rails après avoir été adopté au forceps le 20 mars à l'issue de semaines de manifestations et de tractations stériles à l'Assemblée nationale.

L'utilisation d'un mécanisme constitutionnel permettant une adoption sans vote au Parlement n'a pas fait désarmer l'opposition et les syndicats. Au contraire, les relations entre le chef de l'Etat et les partenaires sociaux, en particulier la centrale réformiste CFDT, tournent à l'aigre.

Une rencontre mercredi entre la Première ministre Elisabeth Borne et l'instersyndicale -comptant 8 organisations- a tourné court, les syndicats parlant d'"échec", la CGT parlant même d'un "gouvernement obtus, radicalisé et déconnecté".

"Provocation" 

Depuis la Chine, Emmanuel Macron a pour sa part répliqué via son entourage en insistant sur un projet "porté démocratiquement" et en rejetant la responsabilité de l'échec du dialogue sur les syndicats, notamment la CFDT, qui n'a "pas voulu entrer dans un compromis".

"Je dis 'stop à la provocation'. Ça n'a pas de sens, on n'est pas sur un ring. Ce n'est pas moi le problème", a rétorqué jeudi le patron de la CFDT, Laurent Berger, sur la radio RTL, estimant que M. Macron avait "la solution entre les mains".

"On est en désaccord, pas en guerre", a pour sa part assuré le ministre du Travail Olivier Dussopt.

Une intersyndicale est prévue dans la soirée pour décider d'une nouvelle journée de mobilisation avant la décision du Conseil constitutionnel.

Laurent Berger espère que les Sages censureront "l'ensemble de la loi" le 14 avril. Le Conseil peut valider le projet, le censurer partiellement ou en totalité.

Politiquement, le conflit semble tourner à l'avantage de l'extrême droite de Marine Le Pen, opposée à la réforme mais discrète depuis le début du conflit.

Selon un sondage publié mercredi, 47% des Français considèrent que la dirigeante du Rassemblement national "a la stature d'une présidente de la république", en hausse de 5 points en un an, et qu'elle est "capable de réformer le pays" (51%, + 8 points).

Retraites: la relation s'envenime un peu plus entre Macron et Berger

Mise en scène, conflit personnel ou preuve d'un dialogue social brisé ? Près de trois mois après le début de la mobilisation contre la réforme des retraites, le ton monte encore entre Emmanuel Macron et le patron du premier syndicat de France, Laurent Berger.

8.000 kilomètres séparent le président, en visite d'Etat en Chine, et le leader de la CFDT, qui participe jeudi à Paris à la onzième journée de mobilisation contre le texte. Mais les deux hommes se livrent à distance une guerre des mots.

"On est chez les fous!", s'est emporté jeudi Laurent Berger sur RTL après avoir appelé, la veille, le chef de l'Etat à "garder ses nerfs" à la suite de plusieurs attaques du président ou de son entourage visant l'attitude du premier syndicat français dans le conflit sur les retraites.

Mercredi, informé en temps quasi réel de ce qui se passe à Paris, Emmanuel Macron a pris connaissance de "l'échec" de la réunion à Matignon entre Elisabeth Borne et l'intersyndicale et surtout de la déclaration à la sortie de Laurent Berger qui a évoqué une "crise démocratique".

Remonté, une fois de plus, contre les syndicats, et particulièrement contre la CFDT, le chef de l'Etat ne se prive alors pas de faire connaître son état d'esprit, même si officiellement il ne souhaite pas réagir depuis la Chine aux soubresauts de la vie politique nationale.

Selon lui, "pour la première fois de son histoire contemporaine, la CFDT n'a pas proposé un autre projet", "la réponse c'était: rien".

Mais Laurent Berger ne se montre pas dupe sur ces propos: "L'entourage d'Emmanuel Macron, c'est Emmanuel Macron. On va être très clair". "Arrêter les petites phrases", "stop à la provocation!", s'emporte-t-il sur BFMTV.

"Faire durer la pièce" 

Pour le chef de l'Etat, les propos sur la "crise démocratique" ne passent pas. Le patron de la CFDT se défend d'avoir lancé "une attaque personnelle" contre le président, tout en observant que la situation actuelle "profite malheureusement à l’extrême droite".

Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a justifié jeudi sur France Inter l'intervention d'Emmanuel Macron, soulignant l'importance de "remettre l'église au milieu du village" face à des syndicats "qui confondent conflit social et crise démocratique".

Il ne s'est pas privé non plus de lancer une charge supplémentaire contre le patron de la CFDT: "Le connaissant un peu, je pense qu'il n'est pas au fond d'accord lui-même avec ce qu'il dit".

Chez Renaissance, on reproche à Laurent Berger de vouloir réduire la réforme des retraites à un problème personnel avec le président: "Vouloir recentrer l'attention sur des questions interpersonnelles, ça nous empêche de parler des vrais sujets", estime à l'AFP un cadre du parti.

Malgré ces vifs échanges, le politologue Dominique Andolfatto, auteur du livre "Anatomie du syndicalisme", refuse d'être "alarmiste".

"Il y a de la dramatisation, de la théâtralisation, mais c'est le propre d'un mouvement social", explique-t-il. "Et il faut faire durer la pièce en attendant que le Conseil constitutionnel se prononce", le 14 avril, sur la réforme.

Il reconnaît toutefois "des contentieux individuels anciens" entre Emmanuel Macron et Laurent Berger qui "ne semblent pas s'apprécier".

Mais, pour Stéphane Sirot, historien spécialiste du syndicalisme, le chef de l'Etat "met en difficulté le syndicalisme qu’a promu Berger depuis qu’il est à la tête de la CFDT, un syndicalisme qui se veut de partenariat social".

Le pouvoir actuel n’a "jamais voulu de partenaire qu’il soit syndical ou autre", considérant "qu’il n’y a pas d’espace entre lui et le peuple", estime l'historien.

Jeudi, le président devrait s'abstenir de commenter la nouvelle journée de manifestations en France: il rencontrait toute la journée les dirigeants chinois et n'avait pas prévu de répondre aux questions de la presse.

La veille, il avait fait connaître son avis sur la mobilisation.

"Regardons avec un peu de recul les conflits sociaux sur les retraites qu’on a connus", a dit son entourage. "On a eu beaucoup plus de gens dans les manifestations qu’on a là. Beaucoup plus. Quel est le taux gréviste depuis 15 jours ? Il est a un niveau historiquement très faible". Le pays n'est pas "à l'arrêt".


Première mission du porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle aux Philippines

Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
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  • L'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.
  • La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

SUBIC BAY FREEPORT ZONE PHILIPPINES : Le porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle a effectué sa première mission aux Philippines, où l'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.

« Compte tenu de la montée des tensions, il est d’autant plus important de défendre le droit international et la liberté de navigation, que ce soit en mer ou dans les airs », a déclaré l'ambassadrice Marie Fontanel sur le pont du porte-avions, dans la baie de Subic, au nord de Manille.

Le groupe aéronaval a rejoint la marine des Philippines vendredi pour ces exercices.

Constitué de quelque 3 000 marins, il avait quitté le port de Brest en novembre pour une mission de plusieurs mois en mer Rouge, dans l'océan Indien et dans le Pacifique, durant laquelle il doit intégrer régulièrement des frégates ou des sous-marins de pays étrangers.

La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

Les Philippines cherchent pour leur part à renforcer leurs relations avec leurs alliés face aux confrontations régulières entre Manille et Pékin concernant la mer de Chine méridionale. Pékin y revendique en effet la majeure partie de cette voie navigable stratégique.

En novembre, Manille avait annoncé l'achat à la France de 40 vedettes rapides de patrouille dans le cadre d'un accord de 440 millions de dollars (environ 420 millions d'euros).


L'écrivain Boualem Sansal a entamé une grève de la faim, a déclaré son avocat

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  • « Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.
  • Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

PARIS : L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré en Algérie depuis mi-novembre, a entamé lundi une grève de la faim, a indiqué son avocat dimanche à l'AFP, précisant tenir cette information d'une source judiciaire.

« Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.

Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

« Ni la pondération dans l'expression de sa défense, ni la retenue face à la campagne abjecte que j'ai subie dans certains médias algériens, ni le respect du cadre judiciaire de ce pays ne semblent avoir été appréciés par un régime qui persiste à me refuser le visa sans raison valable, privant Boualem Sansal de la défense de son choix », a martelé l'avocat.

Ce dernier a également affirmé que le protocole de soin suivi par Boualem Sansal avait été interrompu, alors que l'écrivain souffrirait d'un cancer, d'après des informations de presse.

Boualem Sansal est poursuivi en vertu de l'article 87 bis du Code pénal algérien, qui sanctionne comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions.

Selon le quotidien français Le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris les déclarations de Boualem Sansal au média français Frontières, réputé d'extrême droite, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire de ce dernier pays aurait été amputé sous la colonisation française au profit de l'Algérie.

Son incarcération a provoqué les protestations de nombreux intellectuels et écrivains, qui estiment les poursuites sans aucun fondement.

Boualem Sansal a longtemps affirmé être né en 1949, ce qui lui donnerait aujourd'hui 75 ans. En décembre, son éditeur Antoine Gallimard avait pour sa part indiqué qu'il était en vérité né en 1944 et avait donc 80 ans.


Immigration : un conseil interministériel se réunit mercredi

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.
  • Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

PARIS : Le gouvernement français réunira un conseil interministériel de contrôle de l'immigration mercredi, alors qu'une attaque au couteau, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière, a fait un mort samedi à Mulhouse, a assuré dimanche le ministre des Affaires étrangères.

Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.

Au cours de l'entretien, le ministre a été interrogé sur les discussions avec ses homologues algériens concernant les obligations de quitter le territoire français (OQTF).

« Cette attaque terroriste nous appelle à amplifier encore la mobilisation qui est la nôtre pour mieux contenir et prévenir les conséquences de la présence de ce terroriste islamiste sur le territoire national », a estimé le ministre avant d'évoquer le conseil interministériel.

Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

Le Premier ministre, François Bayrou, a d'ailleurs convoqué un conseil interministériel de contrôle de l'immigration ce mercredi. « Nous devons faire plus et nous devons faire mieux », a-t-il déclaré.

M. Barrot a également affirmé avoir demandé « aux 19 ambassadeurs, dans les pays où nous rencontrons le plus de difficultés pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière, à me faire un rapport circonstanciel dont je présenterai les résultats ce mercredi au Premier ministre pour que nous puissions prendre des mesures fortes ».

« Il y a des pays vis-à-vis desquels il nous faut effectivement prendre des mesures fortes. Il y en a d'autres où, au contraire, il nous faut des mesures d'accompagnement », a-t-il ajouté.