PARIS: Quarante-trois ans après l'attentat à la bombe contre la synagogue de la rue Copernic à Paris, qui a fait quatre morts et des dizaines de blessés en octobre 1980, le procès s'est ouvert lundi matin, en l'absence de l'unique accusé.
Hassan Diab, un Libano-Canadien de 69 ans qui a toujours clamé son innocence, avait déjà fait savoir à la cour d'assises spéciale qu'il ne se présenterait pas à l'audience, chargeant ses avocats de l'y représenter.
Quatre décennies de procédure en cinq dates-clés
Entre l'attentat contre la synagogue de la rue Copernic à Paris, le 3 octobre 1980, et le procès de son auteur présumé, plus de quatre décennies se seront écoulées.
Retour sur l'une des plus longues procédures de l'antiterrorisme français en cinq dates-clés.
3 octobre 1980, l'attentat
Ce vendredi, soir de shabbat, 320 personnes sont réunies à l'intérieur de la synagogue de la rue Copernic, dans le cossu XVIe arrondissement de Paris. Il est environ 18H35 quand une bombe posée sur une moto garée à proximité de l'entrée de la synagogue explose.
C'est le premier attentat mortel ayant frappé la communauté juive en France depuis la Libération. Quatre personnes sont tuées: un étudiant qui se rendait en moto chez sa petite amie, le chauffeur d'une fidèle de la synagogue, une journaliste israélienne sortie faire une course et un voisin sur le pas de sa porte avec son fils de quatre ans. Une quarantaine d'autres sont blessées.
Les enquêteurs creusent d'abord la piste de l'extrême droite, en écartent d'autres aussi infructueuses, puis se concentrent sur celle du terrorisme palestinien. L'attentat, non revendiqué, est attribué à un groupe dissident du Front populaire de libération de la Palestine, le FPLP-OS.
19 avril 1999, les renseignements
C'est à cette date, 19 ans après les faits, qu'apparaît pour la première fois le nom de Hassan Diab dans le dossier.
Un rapport de la Direction de la surveillance du territoire (DST, devenue plus tard la DGSI) transmis à l'autorité judiciaire sur les membres présumés du commando l'identifie comme l'homme qui aurait confectionné la bombe dans sa chambre d'hôtel et l'aurait placée sur la moto utilisée pour l'attentat.
Ce ressortissant libanais installé aux Etats-Unis correspondrait aux portraits-robots réalisés pendant l'enquête, et surtout, selon un autre renseignement fourni au contre-espionnage français, un passeport à son nom avait été saisi en 1981 à Rome dans les effets d'un membre présumé du FPLP-OS.
Ce passeport, avec des tampons d'entrée et de sortie d'Espagne, pays d'où serait parti le commando, deviendra la pièce maîtresse de l'accusation.
13 novembre 2008, l'arrestation
Hassan Diab, qui réside depuis une dizaine d'années au Canada où il a été naturalisé, et qui enseigne alors la sociologie à l'université d'Ottawa, est arrêté en vertu d'un mandat d'arrêt délivré à son encontre le 5 novembre 2008.
Un an plus tôt, différents articles de journaux révélaient son nom et son implication présumée. Dans une interview au Figaro, publiée le 24 octobre 2007, Hassan Diab se dit "victime d'une regrettable homonymie".
Avec son arrestation le 13 novembre 2008 commence une longue procédure d'extradition, qui aboutira six ans plus tard, jour pour jour.
Mis en examen et écroué en France, Hassan Diab se mure d'abord dans le silence, avant de s'expliquer face aux juges d'instruction.
Il assure qu'il était à Beyrouth au moment de l'attentat, en pleine période d'examens à l'université. D'anciens étudiants et son ex-épouse corroboreront ses déclarations.
12 janvier 2018, le non-lieu
Plus de 37 ans après les faits, les juges d'instruction signent une ordonnance de non-lieu, estimant que "les charges pouvant être retenues contre Hassan Diab ne sont pas suffisamment probantes".
Pour motiver leur décision, les magistrats relèvent la difficile appréciation de la "fiabilité" des renseignements ayant désigné Hassan Diab comme le poseur de la bombe, et jugent "vraisemblable" qu'il se trouvait au Liban à l'époque des faits.
Hassan Diab est immédiatement remis en liberté, après plus de trois ans de détention, et repart au Canada.
Le parquet de Paris fait appel.
27 janvier 2021, le renvoi aux assises
La chambre de l'instruction, après avoir suspendu sa décision aux conclusions d'une énième expertise graphologique dans cette affaire, infirme le non-lieu accordé trois ans plus tôt à Hassan Diab, estimant que les éléments pris dans leur ensemble "constituent des charges suffisantes contre l'intéressé d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés".
La Cour de cassation rejette le 19 mai 2021 l'ultime recours de Hassan Diab (69 ans aujourd'hui), validant définitivement son renvoi devant la cour d'assises spéciale.