TURMUS‘AYYA: Bâtons en main et le visage enroulé dans des keffiehs, de jeunes Palestiniens sont postés à l'entrée de leur village de Cisjordanie occupée, pour le défendre en cas d'attaque de colons israéliens vivant à proximité.
Chaque nuit, ces habitants de Turmus'ayya veillent et patrouillent, prêts à donner l'alerte.
"Nous ne voulons attaquer personne, mais seulement défendre notre peuple, notre village, nos maisons, notre terre et notre honneur", dit l'un d'entre eux, souhaitant taire son nom par peur d'être arrêté par les forces israéliennes.
"Ce sont nos armes, nous n'avons rien d'autre pour nous défendre", explique-t-il, un bout de bois dans une main et une lampe de poche dans l'autre.
Sur les collines surplombant la vallée, certains de déplacent en quad, d'autres brandissent des battes de baseball ou des masses.
Dans ce secteur nord de la Cisjordanie occupée, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, les violences sont fréquentes.
Dimanche dernier, des centaines d'Israéliens sont entrés dans Huwara où ils ont incendié des maisons et des voitures, plusieurs heures après que deux colons eurent été tués dans cette petite ville palestinienne. Dans un village à proximité, un Palestinien a été tué par des tirs israéliens.
Après ces incidents, le ministre de la Défense israélien Yova Gallant avait dénoncé une situation "intolérable" et affirmé qu'Israël "ne pourra pas tolérer que des civils se fassent justice".
La police avait arrêté une poignée de suspects de ces exactions.
"Après ce qu'il s'est passé à Huwara, nous devons être encore plus vigilants", estime un garde, le visage dissimulé.
Ces rondes de nuit ont commencé l'an passé lorsque les tensions se sont accrues dans la région, sur fond de raids de plus en plus fréquents de l'armée israélienne à la recherche, selon elle, de suspects.
Elles ont pris de l'importance ces derniers mois, après des violences qui ont éclaté à Turmus'ayya, un village de 4.000 habitants.
En janvier, une maison et un véhicule y ont été incendiés. Un responsable de la sécurité israélien a indiqué à l'AFP que les auteurs présumés étaient des extrémistes juifs.
"Le village est entouré d'avant-postes de colonies et toutes les deux semaines, il y a une attaque", raconte un autre garde de Turmus'ayya.
Quelque 475 000 Israéliens vivent dans des colonies en Cisjordanie, illégales au regard du droit international. Environ 2,9 millions de Palestiniens résident également dans ce territoire.
Les habitants de Turmus'ayya soutiennent l'initiative. Par une froide nuit d'hiver, Abdul Karim al-Zaghloul, un Palestino-américain en visite auprès de sa famille, a apporté des tasses de thé aux jeunes gardes.
"Tout le monde se fiche de ce que nous vivons à cause des colons et des forces israéliennes chaque jour", déplore-t-il.
Selon des habitants, un groupe de colons s'est récemment approché du village mais a rebroussé chemin en voyant la patrouille.
"Nous sommes prêts pour toute attaque, si Dieu le veut", assure un membre de la troupe.