BEYROUTH: C’est une colère sourde qui a éclaté hier dans l’une des rues de la capitale libanaise Beyrouth, et plus précisément dans la rue dite «des banques», à Badaro. Des citoyens se sont en effet massés devant plusieurs établissements bancaires, prenant d’assaut leur devanture. Plusieurs banques ont ainsi été saccagées et incendiées, alors que celles-ci observent une grève ouverte depuis deux semaines.
Par un communiqué, les banques libanaises ont en effet annoncé mercredi le maintien de leur grève générale à la suite d’une procédure judiciaire gagnée par deux déposants devant la Cour de cassation.
Mais le dollar dont le taux de change face à la livre libanaise donne désormais le tournis a atteint de nouveaux sommets aujourd’hui, à 80 000 livres libanaises pour 1 dollar américain (1 dollar = 0,93 euro), provoquant une nouvelle réaction chez des citoyens plus que désespérés par un pouvoir d’achat qui disparaît au fil des jours.
Le ministre de l'Economie annonce la dollarisation des biens de consommation
Dans l'après-midi, le ministre libanais de l'Economie Amine Salam a annoncé avoir donné l'autorisation aux supermarchés de fixer leur prix en dollars "en raison de la hausse vertigineuse" des prix, a précisé le ministre. Il a également déclaré que les supermarchés pouvaient désormais adopter le taux de change " du marché", ajoutant qu'il ne pouvait recommander aux commerçants de s'appuyer sur telle ou telle "plateforme de change".
Tous les biens de consommation voient donc désormais leur prix affichés en dollars, "exception faite du pain" libanais, a indiqué le ministre.
Les images qui ont circulé sur les réseaux sociaux et plusieurs médias locaux montrent un déchaînement de violence contre les établissements bancaires. Selon des informations données par les médias locaux, les manifestants se seraient ensuite dirigés vers le domicile du président de l’association des banques, Sélim Sfeir.
Depuis le début de la crise économique sans précédent déclenchée en 2019, la monnaie nationale a perdu plus de 95% de sa valeur par rapport au billet vert.
La livre s'échangeait donc aujourd’hui à plus de 80 000 livres pour un billet vert selon des sites surveillant le taux de change et des cambistes, alors qu’au début du mois de février, elle s'échangeait autour de 60 000 livres libanaises pour 1 dollar.
Cette nouvelle chute s'est traduite par une hausse des prix de l'essence, le prix d'un bidon de vingt litres valant près d'un tiers du salaire d'un policier, dans un pays où plus 80% de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon l’Organisation des nations unies (ONU).
Depuis 2021, les autorités ont levé les subventions sur le carburant et les produits essentiels tels que la farine et les médicaments.