PARIS: Une Française de 28 ans a été condamnée jeudi à Paris à sept ans de prison pour "association de malfaiteurs terroriste", pour avoir gagné la Syrie en 2014 et y avoir vécu plus de six ans au sein de groupes djihadistes.
Benjamine d'une fratrie née de parents sénagalais, Oumou S. a grandi dans la ville des Mureaux (Yvelines), près de Paris. Sa famille musulmane est peu pratiquante, contrairement à elle.
À 19 ans, l'étudiante en BTS enfouit quelques vêtements dans un sac-poubelle et s'envole clandestinement pour la Syrie. Elle sera incarcérée en France en avril 2021 à son retour de Syrie via la Turquie.
"J'étais en manque de repères, de stabilité psychologique et sociale", a-t-elle expliqué, au tribunal correctionnel, robe rouge et noire, et cheveux très courts.
Elle dit avoir insisté pour accompagner Damien Omet, visé aujourd'hui par un mandat d'arrêt européen et international. "On était deux pauvres gamins mal dans leur peau", lâche-t-elle pour expliquer son départ avec celui qu'elle n'avait vu physiquement que "deux ou trois fois seulement".
Lui deviendra "un combattant investi", notamment dans le groupe armé du Jaysh Mohamed, proche du Front Al-Nosra alors allié à Al-Qaïda.
Elle assure s'être cantonnée aux tâches ménagères avant d'avoir deux enfants en 2016 et 2018, dont elle est aujourd'hui sans nouvelle. Ils seraient encore à Idlib, "peut-être ensevelis", après le séisme de lundi, s'est-elle désolée dans un rare moment d'émotion où sa colère et les larmes ont percé.
"Je ne me suis jamais intéressée à la question du djihad", mais "j'étais avide de liberté", dit-elle pour expliquer sa fuite tant de sa famille décrite comme non aimante, que de la katiba du groupe d’Oumar Diaby (alias Omar Omsen), qu'elle avait rejoint dès son arrivée en Syrie. Elle décrit cet ancien délinquant franco-sénégalais - soupçonné d'avoir convaincu de nombreux Français de rejoindre le djihad armé - comme "le fou du village", "un fieffé manipulateur" lubrique abusant des femmes.
Alors qu'elle assure avoir voulu quitter très vite les "hommes abjects" de ce groupe, elle ne prendra attache avec les autorités consulaires françaises qu'en 2020 après avoir été arrêtée, dit-elle, lors d'un repérage sans ses enfants pour franchir la frontière avec la Turquie.
"Son départ interroge sur sa véritable motivation et ses enjeux" et elle "ne pouvait ignorer les activités criminelles de ces groupes djihadistes", a dit le tribunal en rendant sa décision qui comprend également un suivi socio-judiciaire de trois ans. Il a souligné toutefois "sa bonne conduite en détention" et "son évolution positive assez rassurante".
"La vie de cette éternelle incomprise, sans attaches ni personne pour la soutenir, n'est qu'une fuite en avant", avait plaidé son avocat Louis Heloun, qui voit comme "une lueur d'espoir" le fait que le tribunal n'a pas retenue la peine de sûreté de deux tiers demandé par le procureur qui avait requis par ailleurs huit ans de prison.