Retraites: le report de l'âge de départ à 64 ans «n'est plus négociable»

La Première ministre française Elisabeth Borne fait des gestes lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 17 janvier 2023. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
La Première ministre française Elisabeth Borne fait des gestes lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 17 janvier 2023. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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Publié le Dimanche 29 janvier 2023

Retraites: le report de l'âge de départ à 64 ans «n'est plus négociable»

  • Borne se montre ouverte à une discussion au Parlement sur une meilleure utilisation des trimestres «éducation» et «maternité» obtenus par les femmes au cours de leurs carrières
  • Les syndicats appellent à de nouvelles manifestations partout en France mardi et menacent de grèves en février

PARIS: Le report de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans, contesté par les syndicats et l'essentiel des oppositions, "n'est plus négociable", a affirmé Elisabeth Borne dimanche, à la veille du début de l'examen du projet en commission à l'Assemblée.

"Ca n'est plus négociable, la retraite à 64 ans et l'accélération (de l'allongement de la durée de cotisation, ndlr) de la réforme Touraine", a affirmé sur franceinfo la Première ministre: "C'est le compromis que nous avons proposé après avoir entendu les organisations patronales et syndicales, après avoir échangé avec les différents groupes parlementaires (...) C'est nécessaire pour assurer l'équilibre du système".

"Si on n'avait qu'un seul paramètre, alors ça ne serait pas 43 ans de cotisation et 64 ans pour pouvoir partir à la retraite, ça pourrait être 45 ans de durée de cotisation, ce qui nous semble impossible de demander aux Français", plaide-t-elle dans cet entretien réalisé samedi, en marge d'un déplacement dans la circonscription du Calvados dont elle a été élue députée.

Retraites: de retour dans la rue mardi, les syndicats veulent frapper plus fort

Galvanisés par le succès de leur première mobilisation contre la réforme des retraites, les syndicats appellent à de nouvelles manifestations partout en France mardi et menacent de grèves en février, mais la Première ministre s'est montrée ferme dimanche sur le report de l'âge de départ à 64 ans: il n'est "plus négociable".

La jauge fera-t-elle la loi ? Après leur tour de force du 19 janvier (1,12 million de manifestants selon Beauvau, plus de deux millions d'après les organisateurs) les huit principaux syndicats français ont appelé "à se mobiliser encore plus massivement le 31".

«Barre placée haut»

Un effet de masse espéré pour venir à bout d'une "réforme injuste" et de sa mesure-phare: le report de l'âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans.

Mais après cette première journée réussie, "la barre a été placée haut", note le politologue Dominique Adolfatto, et les syndicats "ne peuvent pas se permettre un faux pas".

Ces derniers se montrent plutôt confiants. "Nous sommes bien partis pour être plus nombreux", assure ainsi Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT. Espoir conforté par des sondages attestant d'un rejet croissant de la réforme dans l'opinion.

"La population est très défavorable au projet et cet avis tend à prendre de l'ampleur", constate aussi le numéro un de la CFDT, Laurent Berger. Qui met en garde l'exécutif: ne pas tenir compte des mobilisations "serait une faute".

En réponse à cette défiance grandissante, la majorité tente de faire de la "pédagogie".

Dans sa circonscription du Calvados, la Première ministre Elisabeth Borne a déploré la "désinformation", tandis que la secrétaire d'Etat Marlène Schiappa et la cheffe de file des députés Renaissance, Aurore Bergé ont défendu dans le JDD une réforme qui "apporte des réponses utiles" aux femmes précaires.

Dans un entretien à franceinfo diffusé dimanche matin, la cheffe du gouvernement se montre ouverte à une discussion sur une meilleure utilisation des trimestres "éducation" et "maternité" obtenus par les femmes au cours de leurs carrières.

Pour autant, le report de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans "n'est plus négociable", insiste-t-elle.

Si le LFI Jean-Luc Mélenchon a suggéré samedi aux syndicats d'organiser prochainement une "très grande marche" un weekend, c'est dès ce mardi que la participation sera scrutée dans les nombreux rassemblements (plus de 200) prévus. A Paris, le parcours doit cette fois-ci s'achever aux Invalides, tout près de l'Assemblée nationale, où l'examen du projet de loi aura débuté lundi en commission.

Grèves à répétition 

Plus de 7.000 amendements ont été déposés, essentiellement par la gauche qui entend faire durer les débats, tandis que la droite cherche à faire monter les enchères, consciente que ses voix seront cruciales pour adopter la réforme. Le gouvernement doit en outre composer avec sa propre majorité, où beaucoup réclament des améliorations et certains renâclent à voter le texte.

Des tensions exacerbées par le risque de grèves à répétition. Mardi, des perturbations sont attendues dans les transports en commun, en particulier à la SNCF et à la RATP.

Des fermetures de classes, voire d'écoles, sont aussi à prévoir, le taux de grévistes chez les enseignants de primaire devant être connu lundi.

Mais la suite du mouvement reste incertaine. Du côté de la CGT, certaines fédérations poussent pour un durcissement. De nouvelles grèves sont déjà annoncées dans les ports, raffineries et centrales électriques à partir du 6 février.

Chez les cheminots, ce sera le 7 et le 8, prélude à un préavis reconductible "dès la mi-février", ont prévenu la CGT et SUD. En plein pendant les vacances d'hiver et son grand weekend de chassé-croisé du 18-19.

Mais la CFDT préfère "garder l'opinion" de son côté. "Le niveau d'efficacité syndicale ne se mesure pas au niveau d'emmerdements concrets pour les citoyens", explique M. Berger, qui ne veut pas non plus multiplier les journées d'action "car de nombreux travailleurs ne peuvent pas tenir sur un rythme aussi intense".

"Une ou deux démonstrations de force" supplémentaires suffiront selon lui à faire entendre raison à l'exécutif. Reste à en convaincre les autres leaders syndicaux, qui se réuniront mardi soir au siège de Force ouvrière.

La cheffe du gouvernement se montre ouverte, en revanche, à une discussion au Parlement sur une meilleure utilisation des trimestres "éducation" et "maternité" obtenus par les femmes au cours de leurs carrières.

"Dès aujourd'hui, il y a beaucoup de femmes qui ne peuvent pas les utiliser à plein, on est en train d'analyser la situation de ces femmes qui (...) pourraient ne pas les utiliser à plein demain, donc cette analyse est en cours.

Retraites: la réforme percutée par les promesses déçues de la «valeur travail»

"En profiter le plus longtemps possible". Au travers du profond attachement que les opposants à la réforme vouent au temps de la retraite se dessine en creux la relation abîmée qu'entretiennent les Français avec la "valeur travail", jugent des sociologues, experts et travailleurs.

Une opposition à la réforme qui grandit selon les sondages et un gouvernement qui patine sur sa "pédagogie", avant le 2e round organisé dans la rue par les syndicats, l'exécutif n'a pas encore trouvé la formule magique pour convaincre les Français du bien-fondé de son projet.

Mission impossible? Avec le report de deux ans de l'âge légal, la réforme vient heurter le droit à "une retraite avant l'arthrite" comme le proclamaient les pancartes du 19 janvier, au nom d'une "valeur travail" promue par Emmanuel Macron, à laquelle un nombre croissant de Français paraît ne plus donner crédit.

"Nous sommes en présence d'une dynamique collective qui dépasse de beaucoup la simple question des retraites et qui traduit une crise politique plus générale - défiance vis-à-vis des gouvernements, sentiment général d'injustice - sans doute accompagnée d'une forme d'anesthésie par rapport à la situation des finances publiques", analysait l'Institut Montaigne, un think tank d'inspiration libérale, mi-janvier.

Pour le politologue Jérôme Fourquet, Emmanuel Macron "n'est plus en phase" avec une partie des Français dont le rapport au travail a changé.

"Les Français passent moins de temps au travail dans l'année, les 35 heures sont passées par là (...) Et le rapport que les Français entretiennent avec ce monde du travail a aussi évolué: plus de pression, un management très descendant, une perte de sens...", décryptait M. Fourquet sur France Inter à la veille de la première journée de mobilisation.

Selon l'Ifop si, en 1990, 60% des sondés répondaient que le travail était "très important" dans leur vie, ils ne sont plus que 24% aujourd'hui à faire cette réponse, soit un recul de 36 points en 30 ans.

"Rendre le travail soutenable est un préalable indispensable à toute réforme des retraites", juge la sociologue Dominique Méda dans Le Monde, samedi.

Au travail, "les Français connaissent beaucoup de déceptions et de frustrations", observe la directrice de recherche au CNRS Danièle Linhart. Une souffrance au travail à laquelle contribue l'individualisation de la gestion des salariés, selon la sociologue.

la liberté, un horizon de la retraite

La dégradation des conditions de travail s'explique aussi, selon le sociologue Marc Loriol, par l'intensification du travail, la mise en avant de critères de rentabilité, l'accroissement de la pénibilité, autant de critères produisant un "sentiment de perte de sens".

A l'inverse, la retraite reste fantasmée pour beaucoup comme un moment de "liberté", complète M. Loriol. Mais si s'inventer une nouvelle vie n'est déjà pas accessible pour tous, "avec le recul de l'âge de la retraite à 64 ans, ça sera encore plus difficile", explique le sociologue, qui mentionne l'isolement, les problèmes de santé et la précarité comme autant d'obstacles à une meilleure qualité de vie au moment de la retraite.

En écho, dans les cortèges du 19 janvier, Gonzalo Martinez, 26 ans, évoquait ses collègues d'usine de 62 ans: "Qu'est-ce qu'il leur reste, de retraite? Ils sont physiquement cassés, mentalement cassés…"

"Tout a changé, je ne crois plus à ce que je fais, j'étais enthousiaste quand je suis rentré dedans mais je ne le suis plus", déplorait Olivier, 61 ans, directeur d'école dans les Yvelines.

"Pour moi la retraite, c'est le repos! Ne plus avoir d'impératifs", espérait Alain, 54 ans, métallier-soudeur qui rentre dans la catégorie "carrière longue". "Au bout de 43, 44 ans où toute la vie tourne autour du travail, il faut que ça s'arrête."

Selon une enquête du service statistique des ministères sociaux de 2022, une part toujours plus importante des nouveaux retraités (8 sur 10) y affirmaient que leur motivation N°1 au moment de faire valoir leurs droits était de "profiter de la retraite le plus longtemps possible".

Interrogés sur les motifs de départ liés au travail, un peu plus d'un tiers avançaient des problèmes de santé rendant le travail difficile, et la même proportion invoquaient des "conditions de travail non satisfaisantes".

Les députés s'emparent lundi en commission du très contesté projet de réforme des retraites, pour un galop d'essai sur 7.000 amendements, sous l'oeil des opposants qui organisent mardi un temps fort de mobilisation dans la rue.

Dans un entretien au Parisien samedi, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin dénonce "le profond mépris de la valeur travail" d'une partie de la gauche, qu'il accuse de chercher "à bordéliser le pays".


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.