TUNIS: C’est une sorte de cadeau de Noël du gouvernement aux investisseurs tunisiens et étrangers. Le 28 décembre 2022, le conseil des ministres a adopté une Stratégie nationale pour l’amélioration du climat des affaires et la relance de l’initiative et de l’investissement. Malgré une reprise en 2018, année de la promulgation du dernier code destiné aux investissements, ces derniers sont en baisse depuis quatre ans.
Aussi le nouveau texte multiplie-t-il les bonus pour les investisseurs tunisiens et étrangers, à qui les autorités proposent deux avantages. D’abord, «des incitations provisoires – pour les cinq années à venir (2023-2028) – et orientées» qui consistent en l’exonération d’impôt sur les bénéfices et les revenus de l’exportation et «la déduction des revenus et des bénéfices réinvestis dans la souscription au capital ou son augmentation ou dans la société». Ensuite, «l’adoption du contrôle a posteriori en lieu et place des contrôles a priori et parallèles «qui entravaient l’investissement».
«D’importantes garanties»
À l’investisseur étranger, on promet «d’importantes garanties», en l’occurrence «la liberté de posséder des biens fonciers – sauf agricoles –, toutes les parts et actions (dans le respect des dispositions spécifiques relatives à certaines activités)», et le fait de pouvoir transférer «sans autorisation préalable tous les fonds qui lui reviennent au titre d’opérations courantes ou de bénéfices après règlement des montants dus au titre de l’impôt ou du salariat».
Toujours dans le but d’améliorer l’environnement des affaires, le gouvernement envisage également de modifier le cadre institutionnel de l’investissement. Le premier changement concerne l’Instance nationale de l’investissement, créée en 2017 sous la tutelle du ministère du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale – aujourd’hui sous celle de l’Économie et de la Planification. Cet organisme va se voir confier «de nouvelles missions et prérogatives»: suivi du climat de l’investissement, mise en place d’une veille de l’investissement, élaboration d’études sectorielles et comparatives avec les autres pays «afin d’améliorer le climat de l’investissement».
La nouvelle stratégie de développement de l’investissement n’apporte rien de révolutionnaire. Elle reste fidèle à l’approche tunisienne, qui repose principalement sur les incitations et néglige l’aspect le plus important pour l’investisseur: la sécurité de son investissement.
Enfin, la création d’une banque de données «nationale et mise à jour […] qui servira pour la prise de décision et la modification des orientations» est envisagée.
Mais il y a sans doute plus important encore que toutes ces annonces: les autorités admettent enfin ce que l’ensemble des enquêtes et des rapports – notamment ceux des chambres de commerce mixte – disent depuis très longtemps: la Tunisie est loin d’être un paradis pour les investisseurs.
En effet, dans un passage intitulé «Une liberté d’investissement réelle et non un slogan», le document du ministère de l’Économie et de la Planification reconnaît que «dans la réalité, les investisseurs sont confrontés à un ensemble d’entraves sous couvert d’exceptions dans certains secteurs».
Nouvelle stratégie
En réalité, cette nouvelle stratégie n’apporte rien de révolutionnaire. Elle reste fidèle à l’approche tunisienne en matière d’investissement, qui repose principalement sur les incitations – notamment fiscales – et néglige l’aspect le plus important pour l’investisseur: la sécurité de son investissement, qui implique en particulier la possibilité pour lui de porter plainte, en cas de litige, devant des juridictions internationales, notamment auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi).
Et rien, dans la nouvelle stratégie comme dans les précédents textes, n’offre cette garantie qui, pourtant, figurait dans le premier code d’investissement tunisien, celui de 1969. Toutefois, les autorités entendent discuter le nouveau texte avec les opérateurs économiques; elles ont encore le temps de rectifier le tir.