PARIS : Reporter le « Black Friday »? « Si ça ne remet pas en cause une date de réouverture des magasins le 27 novembre », répondent des professionnels au ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, qui a proposé mercredi de « décaler » l'opération promotionnelle.
« À chaque fois qu'un ministre parle, ça va dans un sens différent », soupire Yohann Petiot. Le directeur général de l'Alliance du commerce, une association de fédérations professionnelles notamment de l'habillement, regrette ces signaux contraires, qui « pèsent sur l'état d'esprit des chefs d'entreprise et des commerçants, alors que ceux-ci ont besoin de clarté et de visibilité ».
Mardi, Jean Castex n'a pas exclu, lors d'un petit-déjeuner de la majorité, une réouverture des commerces dès le 27 novembre si la situation sanitaire le permet, comme le réclament de très nombreuses fédérations professionnelles.
Décaler à quand?
Mais mercredi, Bruno Le Maire, partisan d'une réouverture rapide des commerces, a jeté un froid en demandant aux acteurs de la distribution de « décaler » l'opération promotionnelle « Black Friday », prévue le 27 novembre. Lors de la séance de questions au gouvernement au Sénat, il a demandé aux acteurs de la grande distribution et du commerce en ligne d'« examiner toutes les possibilités de décaler cette opération » de prix cassés, venue des États-Unis, et qui connaît chaque année un engouement croissant.
« D'accord, si ça ne remet pas en question la date de réouverture du 27 novembre pour les commerces physiques » dits non essentiels, réagit Yohann Petiot. Ce dernier alerte quand même sur le fait que « si on fait un “Black Friday” promotionnel à quinze jours de Noël, ça n'a aucun sens économique, sanitaire ou social ».
Francis Palombi, président de la Confédération des commerçants de France (CCF), se dit « content sur le moment que ce soit reporté, mais si c'est pour nous annoncer qu'on n'ouvrira pas le 27, c'est une nouvelle toute relative ».
« Est-ce que ça a du sens de demander maintenant ce report ? » interroge aussi Laurent Munerot, président de l'U2P (Union des entreprises de proximité). « Je suis presque plus inquiet parce que ça accréditerait l'idée qu'on ne rouvrirait pas les commerces le 27 novembre. »
Selon Bercy, « cette demande ne préjuge en rien de la décision sur la date de réouverture des commerces ». Le ministère explique que « quelle que soit la décision, la date du 27 novembre pour le “Black Friday” est une mauvaise date ».
« Si les commerces rouvrent, ce n'est pas une bonne chose de rouvrir sur une promotion, et s'ils sont fermés, ce ne serait pas une bonne idée pour les commerçants de maintenir une promotion dont les gens ne pourraient pas profiter quand on sait que le “Black Friday”, c'est 5 milliards de ventes en physique et 1 milliard en ligne », poursuit la même source.
Bien à l'avance
Mais contrairement aux dates des soldes, le gouvernement n'a pas la main sur la tenue de telles opérations promotionnelles d'initiative privée.
Le directeur général d'Amazon France, Frédéric Duval, a souhaité mercredi sur France Inter « que les petits commerces ouvrent le plus vite possible. S'ils ouvrent pour le 27 novembre, ce serait parfait. »
Mais il ne s'est pas prononcé sur une annulation ou un décalage de l'opération promotionnelle de la part de son entreprise.
« C'est une grosse opération pour les e-commerçants », relève aussi la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad), qui ne « ferme pas la porte », mais doit consulter ses adhérents. « Que le commerce physique puisse rouvrir le 27, cela aurait été l'idéal pour tout le monde », dit la même source en suggérant qu'il « aurait fallu anticiper, peut-être ».
« Une opération comme celle-ci se prépare bien à l'avance, les produits sont déjà stockés, les prospectus déjà imprimés, ce n'est pas si simple que ça », abonde Thierry Desouches, porte-parole de Système U, qui « va étudier comment on gère cette demande ».
En tout état de cause, la décision concernant la réouverture des commerces sera « prise courant de la semaine prochaine » a dit le gouvernement. « La seule chose sur laquelle on veut une réponse , conclut Yohann Petiot, c'est à savoir quand nous pourrons ouvrir nos magasins. »