Clap de fin au Parlement sur le budget de la Sécu, après le rejet d'une motion de censure

Le Premier ministre français Elisabeth Borne (2e à droite) et le ministre français de la Justice Eric Dupond-Moretti (à gauche) participent à une réunion avec tous les ministres du gouvernement pour présenter l'avancement des discussions sur la réforme des retraites et ses prochaines étapes, à l'Hôtel de Matignon, à Paris, le 2 décembre 2022.  (Photo Bertrand Guay / AFP)
Le Premier ministre français Elisabeth Borne (2e à droite) et le ministre français de la Justice Eric Dupond-Moretti (à gauche) participent à une réunion avec tous les ministres du gouvernement pour présenter l'avancement des discussions sur la réforme des retraites et ses prochaines étapes, à l'Hôtel de Matignon, à Paris, le 2 décembre 2022. (Photo Bertrand Guay / AFP)
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Publié le Samedi 03 décembre 2022

Clap de fin au Parlement sur le budget de la Sécu, après le rejet d'une motion de censure

  • La motion n'a recueilli que 87 voix, loin de la majorité absolue des 288 nécessaires pour faire chuter le gouvernement
  • Devant un hémicycle clairsemé, Elisabeth Borne a déploré que la succession de motions de censure ait «considérablement réduit le temps utile au débat»

PARIS: Point final au Parlement sur le budget de la Sécurité sociale pour 2023, après le septième 49.3 de l'automne: l'Assemblée nationale a rejeté vendredi soir une motion de censure de la Nupes, entraînant l'adoption définitive du texte.

La motion n'a recueilli que 87 voix, loin de la majorité absolue des 288 nécessaires pour faire chuter le gouvernement. Et faible résultat pour la gauche, en cette fin de semaine où la grève SNCF a pu empêcher des parlementaires de se rendre à Paris, selon des membres de l'alliance.

Devant un hémicycle clairsemé, Elisabeth Borne a déploré que la succession de motions de censure ait "considérablement réduit le temps utile au débat": rien que sur ce budget, "6 motions de censure, plus qu’en trois ans pour Michel Rocard", a tancé la Première ministre, passablement agacée.

Premier ministre entre 1988 et 1991, le socialiste Rocard est celui qui a le plus recouru au 49.3.

La motion en discussion vendredi faisait suite au déclenchement une nouvelle fois mercredi de l'arme constitutionnelle du 49.3 par la Première ministre, afin de faire passer ce projet de loi sans vote.

"Vous tournez comme un disque rayé", lui a lancé vendredi le député LFI Manuel Bompard, sur fond d'apostrophes à gauche quant à une "fin de règne" des macronistes.

"Il faut remettre la poule sur l'oeuf: sans 49.3, pas de motion de censure", a rappelé Moetai Brotherson, du groupe communiste.

Assurant chercher "sans relâche des compromis de bonne foi", la cheffe du gouvernement a elle proposé aux oppositions "d’engager une discussion, en transparence, sur la manière" de "discuter plus longuement du fond des textes", plutôt que de donner "le spectacle du déchirement et des débats stériles".

Ni les députés LR ni les indépendants du groupe Liot n'étaient présents.

Le groupe RN n'a pas joint ses voix à celles de la gauche, contrairement à de précédentes fois. "Nous ne sommes pas là pour servir d'agence publicitaire" à la Nupes mais "pour l'avenir, nous ne nous interdisons rien", a prévenu son orateur Laurent Jacobelli.

Le texte de la Nupes avait marqué ses distances: "Il n'y aura jamais ni complaisance ni connivence avec l’extrême droite".

Le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan a lui voté pour la motion.

«Système de santé à bout de souffle»

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) a été approuvé juste dans les temps, à la veille de l'expiration du délai de 50 jours d'examen fixé par la Constitution.

Ce projet de budget prévoit des mesures de prévention en santé (rendez-vous aux âges-clés de la vie), la hausse du prix du tabac, des dispositions anti-fraude sociale, et encore la création d'une quatrième année de stage en médecine générale "en priorité" dans les déserts médicaux.

Sont programmées également des économies, notamment de 250 millions sur les laboratoires d'analyses médicales. Ceux-ci sont en grève jusqu'à samedi contre ce "coup de rabot" sur leurs bénéfices.

Mme Borne a vanté "des moyens massifs pour notre hôpital" et des mesures de protection des "plus fragiles", quand la gauche pointait "un système de santé à bout de souffle".

Les discussions ont été limitées dans l'hémicycle, de par la succession de 49.3 actionnés parfois préventivement, et permettant au gouvernement de choisir les amendements retenus.

Dominée par la droite, la chambre haute avait rejeté mardi en nouvelle lecture ce projet de budget, étant agacée que le gouvernement ait "balayé" ses amendements "emblématiques".

Parmi ceux-ci, l'un prévoyait un relèvement de l'âge de la retraite à 64 ans - un marqueur constant du Sénat depuis plusieurs années. Mais le gouvernement a fait le choix de proposer sa réforme dans un autre projet de loi à venir, dont les contours seront annoncés mi-décembre et qui agite fortement les esprits.

"Vous avez reculé pour mieux sauter", a affirmé l'insoumis Manuel Bompard, se disant "prêt à la bataille" et annonçant un défilé à Paris le 21 janvier, "à l'appel de la jeunesse".

Mme Borne espère, avec "les Républicains par exemple", pouvoir "trouver un chemin", a-t-elle déclaré au journal Le Parisien.

Cette réforme controversée pourrait faire l'objet d'un projet de budget rectificatif de la Sécurité sociale, ce qui permettrait d'utiliser à nouveau le 49.3 si nécessaire, début 2023.

Dans l'intervalle, le Parlement doit adopter définitivement le budget 2023 de l'Etat, pour lequel la locataire de Matignon a déjà engagé sa responsabilité via le 49.3 à deux reprises.


Après les tensions, Paris et Alger entament un nouveau chapitre

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
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  • Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune ont décidé de relancer les échanges bilatéraux
  • L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique

Après avoir frôlé la rupture, un nouveau chapitre s'ouvre dans les relations entre la France et l'Algérie.

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise.

Le communiqué publié par le palais de l'Élysée fait suite à plusieurs signes récents de rapprochement, notamment l'entretien accordé par Tebboune aux journalistes des médias publics algériens, où il a exprimé sa volonté de renouer le dialogue avec son homologue français et de mettre fin à ce qu'il a qualifié de «période d'incompréhension» entre leurs deux pays.

L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique, centrée sur trois axes prioritaires: la coopération sécuritaire, la gestion des flux migratoires et les questions mémorielles.

Le communiqué conjoint, publié à l’issue de cet échange, souligne la volonté des deux chefs d’État de dépasser les crises récentes pour amorcer une relation apaisée et mutuellement bénéfique.

Premier résultat concret dans le cadre de cette volonté affichée, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot se rend à Alger le 6 avril pour des entretiens avec son homologue algérien Ahmed Attal.

Les ministres devront détailler un programme de travail ambitieux et en décliner les modalités opérationnelles et le calendrier de mise en œuvre.

La coopération sécuritaire doit reprendre sans délai, notamment pour lutter contre le terrorisme au Sahel et sécuriser les frontières de la région.

La gestion des migrations irrégulières et la question des réadmissions de ressortissants algériens en situation irrégulière en France sont au cœur des discussions. 

Cette dynamique s’inscrit dans la continuité de l’engagement du président français, exprimé dès le début de son premier mandat et même avant, lors de sa campagne électorale en Algérie, où il avait qualifié la colonisation de «crime contre l’humanité».

Plus tard et dès son élection en 2017, Macron a affiché sa volonté de regarder «la vérité en face». Sa première visite officielle en Algérie marquait la priorité qu’il entend donner à la relation franco-algérienne, en posant les bases d’un dialogue sincère et apaisé. 

Cet engagement a été réaffirmé par la déclaration d’Alger en août 2022, qui prévoyait la mise en place d’une «commission mixte des historiens» chargée d’examiner les archives et de favoriser une meilleure compréhension mutuelle.

Les enjeux de ce rapprochement, dont l’objectif est la poursuite du travail de refondation des relations bilatérales, dépassent le cadre strictement bilatéral et s’inscrivent dans un contexte géopolitique et sécuritaire complexe.

La coopération entre Paris et Alger est essentielle pour répondre aux défis régionaux, notamment dans le Sahel, où le terrorisme et l’instabilité menacent la sécurité de l’Afrique du Nord et de l’Europe. 

La France et l’Algérie partagent un intérêt commun pour la lutte contre les groupes armés et leur coopération stratégique revêt une importance capitale pour stabiliser la région.

La gestion des flux migratoires reste un point de tension récurrent, car si la France souhaite des mécanismes de réadmission efficaces, l’Algérie demande le respect de la dignité et des droits de ses ressortissants. 

Malgré la volonté de réconciliation affichée, le dossier mémoriel reste un obstacle majeur.

La question des excuses officielles pour les crimes coloniaux demeure sensible. Si Emmanuel Macron a reconnu des «crimes contre l’humanité» en 2017, les demandes d’excuses formelles de l’Algérie n’ont pas encore été pleinement satisfaites. 

Les travaux de la commission mixte des historiens, lancés à l’été 2022, doivent permettre d’approfondir la recherche sur cette période sombre et de poser les bases d’un dialogue apaisé.

Malgré les gestes d’ouverture, les relations entre Paris et Alger restent fragiles, en partie en raison d’une méfiance réciproque, alimentée par des perceptions contradictoires des enjeux bilatéraux.

L’un des points de friction les plus marquants est la question du Sahara occidental. La position française, perçue comme favorable au Maroc, a suscité des crispations du côté algérien, allant jusqu’au rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France. 

Pour Alger, le soutien implicite de Paris au plan d’autonomie marocain est perçu comme un alignement qui remet en cause l’équilibre diplomatique régional.

Bien que la France ait tenté de clarifier sa position, en affirmant vouloir accompagner une dynamique internationale de sortie de crise, ce dossier demeure une source de tension. 

Au-delà des relations diplomatiques, les opinions publiques des deux pays jouent un rôle crucial dans l’évolution du partenariat.

En Algérie, une partie de la population reste méfiante vis-à-vis des intentions françaises, nourrie par un sentiment de souveraineté exacerbée et par la mémoire toujours vive des exactions coloniales. 

En France, la question algérienne suscite également des clivages politiques. Certains considèrent les gestes mémoriels comme une forme de repentance excessive, tandis que d’autres appellent à une reconnaissance plus franche des torts commis pendant la colonisation. 

La relance des relations entre la France et l’Algérie repose sur un équilibre délicat entre la reconnaissance du passé, la gestion des défis actuels et la mise en œuvre d’une coopération tournée vers l’avenir. 

Malgré la volonté politique manifeste, la concrétisation de ce partenariat dépendra de la capacité des deux dirigeants à dépasser les clivages historiques et à impulser une dynamique durable.


Paris entend résoudre les tensions avec Alger « sans aucune faiblesse »

le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
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  • Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ».
  • « L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

PARIS : Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ». Il s'exprimait au lendemain d'un entretien entre les présidents français et algérien, qui visait à renouer le dialogue après huit mois de crise diplomatique sans précédent.

« Les tensions entre la France et l'Algérie, dont nous ne sommes pas à l'origine, ne sont dans l'intérêt de personne, ni de la France, ni de l'Algérie. Nous voulons les résoudre avec exigence et sans aucune faiblesse », a déclaré Jle chef de la diplomatie française devant l'Assemblée nationale, soulignant que « le dialogue et la fermeté ne sont en aucun cas contradictoires ».

« L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

Les Français « ont droit à des résultats, notamment en matière de coopération migratoire, de coopération en matière de renseignement, de lutte contre le terrorisme et au sujet bien évidemment de la détention sans fondement de notre compatriote Boualem Sansal », a affirmé le ministre en référence à l'écrivain franco-algérien condamné jeudi à cinq ans de prison ferme par un tribunal algérien. 


Algérie: Macron réunit ses ministres-clés au lendemain de la relance du dialogue

Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron  réunit mardi plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune
  • Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales.

PARIS : Emmanuel Macron  réunit mardi à 18H00 plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue, a appris l'AFP de sources au sein de l'exécutif.

Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales après des mois de crise, selon le communiqué conjoint publié lundi soir.

Le ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, effectuera de même une visite prochainement pour relancer la coopération judiciaire.

Le communiqué ne mentionne pas en revanche le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, figure du parti de droite Les Républicains, partisan d'une ligne dure à l'égard de l'Algérie ces derniers mois, notamment pour obtenir une nette augmentation des réadmissions par le pays de ressortissants algériens que la France souhaite expulser.

Bruno Retailleau sera présent à cette réunion à l'Élysée, avec ses deux collègues Barrot et Darmanin, ainsi que la ministre de la Culture, Rachida Dati, et celui de l'Économie, Éric Lombard, ont rapporté des sources au sein de l'exécutif.

 Dans l'entourage du ministre de l'Intérieur, on affirme à l'AFP que si la relance des relations décidée par les deux présidents devait bien aboutir à une reprise des réadmissions, ce serait à mettre au crédit de la « riposte graduée » et du « rapport de force » prônés par Bruno Retailleau.