Ziad Makari, ministre de l’Information libanais: «Nous sommes attachés au patrimoine de la langue française»

Le ministre de l'Information du Liban, chef de la délégation libanaise, Ziad Makari, à l'occasion du sommet de l'OIF à Djerba en Tunisie. (Photo, Capture d’écran)
Le ministre de l'Information du Liban, chef de la délégation libanaise, Ziad Makari, à l'occasion du sommet de l'OIF à Djerba en Tunisie. (Photo, Capture d’écran)
Short Url
Publié le Vendredi 25 novembre 2022

Ziad Makari, ministre de l’Information libanais: «Nous sommes attachés au patrimoine de la langue française»

  • Pour M. Makari, l’ouverture récente par l’OIF à Beyrouth d’une Représentation pour le Moyen-Orient (Repmo) reflète «l'attachement du Liban à la francophonie et l'importance du Liban pour la francophonie»
  • «Le français fait partie de notre héritage culturel et les Libanais sont attachés à ce patrimoine linguistique. Nous tenons à le conserver et à le protéger», soutient le ministre

DJERBA: Le Liban est membre à part entière de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et fait partie de ses premiers adhérents. L’ancrage du français au Liban est ancien: des liens séculaires unissent le pays du Cèdre et la langue de Molière. Si depuis l’indépendance du pays en 1943, l’arabe est la seule langue officielle, le français garde une place privilégiée, tant dans le quotidien des Libanais que dans les textes administratifs. D’ailleurs, en un peu plus d’un siècle, des centaines d’écrivains libanais ont pris la plume en français, et dans différents genres littéraires. Parmi ces auteurs, celui que l’on ne présente plus, Amin Maalouf, le premier Libanais à avoir reçu le prix Goncourt en 1993 et à avoir été élu en 2012 à l’Académie française.

À l'occasion du 18e Sommet de la francophonie qui s'est tenu, les 19 et 20 novembre dernier à Djerba, en Tunisie, le ministre de l'Information du Liban, chef de la délégation libanaise au sommet de l'OIF, Ziad Makari, a répondu aux questions d'Arab News en français.

Ziad Makari ne cache pas sa fierté d’avoir participé à ce grand rendez-vous de la francophonie. «C’est la première fois que je participe à ce sommet. On avait hâte qu’il se tienne après qu'il a été reporté, en raison notamment de la pandémie de Covid-19», affirme le ministre.

Le thème principal du sommet – la place du numérique au sein de la francophonie – était «très important», selon Ziad Makari. «Le numérique est le seul outil qui peut réunir autant de francophones ensemble à travers le monde, d’autant plus qu’il y a des pays de la francophonie avec lesquels nous ne sommes pas très proches culturellement. Je fais allusion par exemple aux pays du continent africain. J’ai d’ailleurs pu échanger avec des responsables de ces pays autour de différentes problématiques.»

Le Liban, grand absent du village de la francophonie

Le ministre dit toutefois regretter l’absence d’un pavillon libanais au village de la francophonie, qui s’est tenu en marge du sommet de l’OIF. Pourtant, 21 pays y étaient représentés. «Malheureusement, nous n’avons pas eu de pavillon lors de cette édition en raison de la crise économique très sévère qui nous subissons. C'est triste, parce que nous faisons partie des pionniers de la francophonie dans le monde», déplore le ministre.

Un constat d’autant plus regrettable lorsque l’on sait que l’OIF vient tout récemment d’ouvrir à Beyrouth une Représentation pour le Moyen-Orient (Repmo). Pour le ministre, la présence de ce nouveau bureau – le deuxième dans le monde arabe – reflète «l'attachement du Liban à la francophonie et l'importance du Liban pour la francophonie. Notre pays a toujours été le pôle d'attraction de la francophonie au Moyen-Orient. Et maintenant, nous avons un très grand rôle à jouer avec cette représentation pour pouvoir réunir autant que nous le pouvons les pays francophones et tous les habitants des pays arabes, voire les personnes intéressées par la francophonie», ajoute-t-il. Le fait que le responsable de cette représentation régionale soit un Arménien est symbolique, selon M. Makari, «le Liban disposant d’une très grande communauté arménienne. La diversité du Liban est assez importante pour nous, c'est notre plus grande arme culturelle».

Le français, un héritage culturel

Alors que les derniers chiffres de l’OIF font état de près de 40% de francophones au pays du Cèdre avec 70% des écoles secondaires dont le français est la deuxième langue d'enseignement (30% pour l’anglais), la langue de Molière est en perte de vitesse dans le pays, surtout auprès des plus jeunes. Le ministre justifie ce recul de la langue française au niveau mondial face à une pratique de plus en plus présente de l’anglais, langue du business. Toutefois, M. Makari n’est pas inquiet. «Le français fait partie de notre héritage culturel et les Libanais sont attachés à ce patrimoine linguistique. Nous tenons à le conserver et à le protéger (…). La langue française ouvre de très grands horizons à nos jeunes, notamment pour trouver un emploi», insiste-t-il.

Si le ministre se targue que le Liban dispose «des meilleures universités françaises», la presse francophone est en crise, et il n’existe plus qu’un seul quotidien en langue française dans le pays, L’Orient-le Jour, qui résiste malgré une situation difficile. Selon le ministre, cela s’explique par un problème plus global, et est lié à la crise des médias, dont l’émergence du numérique est responsable. «Au niveau du ministère de l’Information, nous mettons tout en œuvre pour protéger les institutions francophones et faire davantage de progrès dans ce sens», assure-t-il.

La France aux côtés du Liban

Au-delà de la promotion de langue française, l’OIF se donne également pour mission de promouvoir la paix et la sécurité. Le pays a été touché par une terrible explosion, le 4 août 2020, qui a fait plus de 200 morts et des milliers de blessés. Le drame a aggravé une crise économique et politique sans précédent. À la suite à cette explosion, la secrétaire générale de l'OIF avait appelé «la grande famille francophone à agir financièrement ou matériellement pour aider le Liban, membre important de la francophonie».

Pour le ministre, l’aide des pays membres s’est révélée surtout symbolique, à l’exception de la France. Et M. Makari d’ajouter: «Ce sont surtout les deux visites du président Macron à Beyrouth qui ont été un facteur important pour aider le Liban à sortir de la crise économique et politique. On a senti que franchement, c'était le président français et la France qui étaient à nos côtés, d'une manière assez directe et franche, même si nous avons reçu des aides de tous les pays dans cette crise.»

L’aide a-t-elle réellement porté les fruits escomptés? «Non, pas encore», répond le ministre. «Mais au moins, les Libanais savent qu’ils ne sont pas seuls, que nous ne sommes pas seuls. La France joue un grand rôle dans l'élection du président libanais et pour faire sortir ce pays de la grave crise politique dont il est victime. Donc en tant que pays francophone, je ne pourrais pas dire que l’OIF est ou a été à nos côtés d'une façon très concrète», ajoute M. Makari. «Aujourd’hui, c'est surtout le bureau de l'OIF qui symboliquement représente une très grande aide et présence pour les Libanais», conclut le ministre sortant, avec beaucoup d’optimisme.


Liban: un mort dans une frappe israélienne dans le sud

Des personnes inspectent un véhicule incendié qui aurait été touché par une frappe israélienne à Ghazieh, près de Sidon, le 18 avril 2025. (AFP)
Des personnes inspectent un véhicule incendié qui aurait été touché par une frappe israélienne à Ghazieh, près de Sidon, le 18 avril 2025. (AFP)
Short Url
  • Une personne a été tuée vendredi dans un nouveau raid israélien visant un véhicule près de la ville côtière de Saïda, dans le sud du Liban
  • Malgré le cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après deux mois de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne mène régulièrement des attaques au Liban

GHAZIYEH: Une personne a été tuée vendredi dans un nouveau raid israélien visant un véhicule près de la ville côtière de Saïda, dans le sud du Liban, a indiqué le ministère libanais de la Santé.

Malgré le cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après deux mois de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant viser combattants et infrastructures du mouvement islamiste libanais soutenu par l'Iran.

"Le raid mené par l'ennemi israélien contre une voiture sur la route Saïda-Ghaziyeh a fait un mort", a indiqué le ministère de la Santé.

Après la frappe, le véhicule tout-terrain a pris feu, provoquant un nuage de fumée noire dans le ciel, selon un journaliste de l'AFP sur place. L'armée libanaise a bouclé la zone et les pompiers sont intervenus pour maîtriser les flammes.

La frappe n'a pas été revendiquée dans l'immédiat, mais l'armée israélienne a affirmé avoir tué plusieurs combattants du Hezbollah parmi lesquels des "commandants" cette semaine dans le sud du pays.

Après le début de la guerre à Gaza déclenchée le 7 octobre 2023 par une attaque du Hamas sur le sol israélien, le Hezbollah a ouvert un front contre Israël, tirant des roquettes sur le territoire israélien, disant agir ainsi en soutien aux Palestiniens.

En septembre 2024, le conflit a dégénéré en guerre ouverte avec des bombardements israéliens intenses au Liban qui ont décimé la direction du Hezbollah et fait plus de 4.000 morts, selon les autorités.


Explosion au port de Beyrouth: première comparution d'un ex-ministre

Une photo montre une vue du port de Beyrouth, site d'une énorme explosion qui a dévasté la capitale libanaise trois ans plus tôt, le 22 juillet 2023. (AFP)
Une photo montre une vue du port de Beyrouth, site d'une énorme explosion qui a dévasté la capitale libanaise trois ans plus tôt, le 22 juillet 2023. (AFP)
Short Url
  • Un ancien ministre de l'Intérieur a comparu jeudi pour la première fois devant le juge libanais chargé de l'enquête sur la gigantesque explosion au port de Beyrouth en 2020
  • En 2021, le juge Tarek Bitar avait été contraint de suspendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 220 morts et plus de 6.500 blessés en raison de pressions politiques

BEYROUTH: Un ancien ministre de l'Intérieur a comparu jeudi pour la première fois devant le juge libanais chargé de l'enquête sur la gigantesque explosion au port de Beyrouth en 2020, a indiqué une source judiciaire à l'AFP.

En 2021, le juge Tarek Bitar avait été contraint de suspendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 220 morts et plus de 6.500 blessés en raison de pressions politiques.

Une série d'actions en justice avaient en outre été intentées contre lui par des responsables politiques et fonctionnaires cités dans l'enquête, notamment l'ancien ministre de l'Intérieur, Nohad al-Machnouk, soupçonné de "négligence et manquements".

Le juge a repris en février ses investigations, après l'élection de Joseph Aoun à la présidence de la République et la nomination d'un Premier ministre réformateur, Nawaf Salam, qui se sont tous deux engagés à garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Selon la source judiciaire qui a requis l'anonymat, l'interrogatoire a porté sur un rapport que M. Machnouk avait reçu le 5 avril 2014, alors qu'il était ministre de l'Intérieur, concernant la "détention d’un navire dans les eaux territoriales libanaises, dont l’équipage avait demandé à être autorisé à reprendre la mer".

Le 4 août 2020, l'une des plus grandes explosions non nucléaires de l'histoire a dévasté des pans entiers de la capitale libanaise.

La déflagration a été provoquée par un incendie dans un entrepôt où étaient stockées sans précaution des tonnes de nitrate d'ammonium acheminées par navire, malgré des avertissements répétés aux plus hauts responsables.

Pointées du doigt pour négligence criminelle, les autorités libanaises, qui étaient au courant des dangers encourus, ont rejeté toute enquête internationale.

L'enquête avait notamment été suspendue après les accusations de partialité du juge proférées par le Hezbollah, désormais très affaibli par sa dernière guerre contre Israël fin 2024. Le parti qui dominait la vie politique libanaise avait demandé le renvoi de M. Bitar.

Deux juges de la direction des enquêtes de Paris sont attendus à Beyrouth à la fin du mois, pour présenter à M. Bitar les éléments recueillis par la justice française, trois ressortissants français figurant parmi les victimes, selon une source judiciaire.

Le 11 avril, deux anciens hauts responsables de la sécurité avaient également comparu pour la première fois devant M. Bitar.


Cellule terroriste: Amman partage les détails de l’enquête avec Beyrouth

Le roi Abdallah de Jordanie et le président libanais Joseph Aoun. (AFP)
Le roi Abdallah de Jordanie et le président libanais Joseph Aoun. (AFP)
Short Url
  • Beyrouth ne sait pas si des citoyens libanais sont impliqués dans un groupe de fabrication de missiles
  • Les services de renseignement de l'armée arrêtent deux Palestiniens pour contrebande d'armes à la frontière libano-syrienne

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a été informé, mercredi, par le roi Abdallah de Jordanie des résultats de l'enquête sur une cellule de fabrication de missiles découverte en Jordanie. Deux membres de cette cellule avaient été envoyés au Liban pour y suivre une formation.

Selon son bureau de presse, M. Aoun a exprimé la «pleine disposition du Liban à la coordination et à la coopération» entre les deux pays et a chargé le ministre de la Justice Adel Nassar de travailler avec son homologue jordanien, en coopération avec les agences de sécurité et judiciaires, sur les enquêtes et l'échange d'informations.

Une source judiciaire a déclaré à Arab News que les services de renseignement de l'armée libanaise «suivaient de près l'affaire de la cellule terroriste et nous ne savons pas encore si des Libanais sont impliqués».

«Cette agence a demandé à la Jordanie de lui fournir des informations concernant les enquêtes, de s'appuyer sur les enquêtes libanaises et, dans le cas où une implication libanaise serait prouvée, l'affaire serait alors renvoyée à la justice libanaise», a déclaré cette personne.

Parallèlement, les services de renseignement de l'armée libanaise ont déclaré avoir arrêté deux Palestiniens dans la ville de Sidon, dans le sud du pays, pour «commerce et contrebande d'armes militaires à travers la frontière libano-syrienne, et ont saisi plusieurs armes et munitions militaires en leur possession».

Le commandement de l'armée a déclaré que les détenus faisaient l'objet d'une enquête sous la supervision du pouvoir judiciaire.

Les médias ont rapporté que les deux hommes étaient des membres de l'appareil de sécurité du mouvement Hamas à Sidon.

Aucune agence de sécurité officielle n'a confirmé l'existence d'un lien entre les arrestations et la cellule jordanienne.

Mardi, l'agence de presse jordanienne a cité des responsables des services de renseignement qui ont déclaré qu'«une série de complots visant la sécurité nationale du pays ont été déjoués et 16 personnes soupçonnées de préparer des actes de chaos et de sabotage ont été arrêtées».

Les plans prévoyaient la production de missiles à l'aide de matériaux locaux et de composants importés. Des explosifs et des armes à feu ont été découverts, ainsi qu'un missile dissimulé prêt à être utilisé.

Les 16 suspects sont soupçonnés d'avoir participé à la mise au point de drones, d'avoir recruté et formé des individus au niveau national et d'en avoir envoyé d'autres à l'étranger pour qu'ils y poursuivent leur formation.

Selon les déclarations des suspects, deux membres de la cellule – Abdallah Hicham et Muath al-Ghanem – ont été envoyés au Liban pour coordonner leurs activités avec une figure importante de l'organisation et recevoir une formation.

En décembre, l'armée libanaise a lancé un processus de désarmement des factions palestiniennes situées à l'extérieur des camps de réfugiés palestiniens. Ces factions, fidèles à l'ancien régime syrien, étaient principalement basées dans la région de la Békaa, le long de la frontière avec la Syrie, et dans la région méridionale.

Le Premier ministre Nawaf Salam a exprimé «l'entière solidarité du Liban avec la Jordanie dans la lutte contre les complots qui menacent sa sécurité et sa stabilité» et sa «volonté de coopérer avec les autorités jordaniennes en cas de besoin concernant les informations selon lesquelles certaines personnes impliquées dans ces complots ont reçu une formation au Liban», selon son bureau de presse.

Lors du lancement du projet de réhabilitation de la route de l'aéroport de Beyrouth, M. Salam a déclaré que les questions de sécurité sur la route de l'aéroport étaient «en cours d'examen avec le ministre de la Défense Michel Menassa et le ministre de l'Intérieur Ahmed Hajjar».

Au cours des dernières 48 heures, la municipalité de Beyrouth a entrepris des efforts pour retirer des rues de la capitale les drapeaux des partis et les images des politiciens et des chefs de partis, en particulier ceux qui sont associés au Hezbollah.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com