RAMALLAH : La décision annoncée vendredi par l'Azerbaïdjan d'ouvrir une ambassade à Tel Aviv a suscité l'étonnement et la condamnation des Palestiniens.
L'Azerbaïdjan partage une longue frontière avec l'Iran et se ravitaille en systèmes d'armes auprès d’Israël. Il est maintenant prêt à devenir le premier pays à majorité et gouvernement chiites à avoir une représentation diplomatique en Israël.
Alors que certains anciens diplomates et analystes politiques palestiniens ont cherché à minimiser cette initiative, à un moment où les luttes diplomatiques entre les Palestiniens et Israël sont intenses, d'autres y ont vu une victoire de la diplomatie israélienne.
Certains officiers supérieurs de services de renseignement arabes ont déclaré à Arab News que la coopération accrue entre les services de sécurité d'Azerbaïdjan et ceux d'Israël ces dernières années signifiait que le personnel israélien pouvait désormais opérer librement dans les zones proches de la frontière entre l’Azerbaïdjan et l’Iran.
Le ministre du Développement social de l'Autorité palestinienne, Ahmed Majdalani, a déclaré à Arab News que l'Azerbaïdjan n'aurait pas pris la décision d'ouvrir cette ambassade sans consulter le président turc Recep Tayyip Erdogan, étant donné que « l'Azerbaïdjan est un protectorat turc ».
Il s'est dit surpris par cette décision, l'Azerbaïdjan étant l'actuel président du Sommet islamique de l’OCI, qui s'est opposé par le passé à une telle initiative.
« Malheureusement, la décision de l'Azerbaïdjan intervient à un moment où la droite israélienne prend le pouvoir en Israël et pourrait être perçue comme une récompense octroyée à l'extrême droite israélienne pour ses attaques contre les Palestiniens et les lieux saints de l’Islam », a-t-il déclaré.
« Nous exprimons notre étonnement et notre condamnation face à cette démarche politique non calculée qui porte préjudice aux Palestiniens ».
Le Premier ministre israélien sortant, Yair Lapid, a déclaré qu'il se félicitait de la décision de l'Azerbaïdjan, ajoutant que ce pays était un partenaire essentiel d'Israël et abritait l'une des plus grandes communautés juives du monde musulman.
Lapid a déclaré que cette décision reflétait la profondeur des relations bilatérales entre Israël et l’Azerbaïdjan et couronnait les efforts du gouvernement israélien pour construire des ponts diplomatiques solides avec le monde musulman.
« Je tiens à remercier le président Ilham Aliyev et à féliciter le peuple azéri qui sera désormais représenté pour la première fois dans l'État d'Israël », a-t-il déclaré.
L'ancien ministre palestinien des affaires étrangères, Nasser Al-Kidwa, a déclaré à Arab News qu'il considérait l'ouverture de l'ambassade comme un acte de gratitude envers Israël pour la fourniture de drones, d'équipements de reconnaissance et d'autres technologies militaires qui l'ont aidé à renverser la donne dans son conflit avec l'Arménie.
Mais il a également minimisé cette démarche : « Je ne pense pas qu'une telle démarche aura un impact sur la diplomatie palestinienne, d'autant que des pays comme les Émirats arabes unis et le Bahreïn – plus importants que l'Azerbaïdjan – ont déjà ouvert des ambassades en Israël ».
L'analyste politique israélien Yoni Ben Menachem a déclaré à Arab News que l'Azerbaïdjan jouait un rôle essentiel dans le conflit entre Israël et l'Iran, rappelant que des bases azerbaïdjanaises ont été utilisées pour lancer des frappes de drones israéliens à l'intérieur de l'Iran et pour accueillir le personnel du Mossad.
Sa coopération en matière de sécurité avec l'Azerbaïdjan pourrait même fournir à Israël un tremplin pour frapper les installations nucléaires iraniennes, a-t-il ajouté.
L'analyste politique palestinien Ghassan Al-Khatib a reconnu que la décision de l'Azerbaïdjan d'ouvrir une ambassade à Tel-Aviv était liée à la coopération sécuritaire entre les deux pays, mais a déclaré qu'elle se faisait « au détriment des principes du droit international ».
« L'ouverture d'une ambassade (...) ne changera pas la réalité politique. Israël est toujours un État occupant et Jérusalem est toujours une ville occupée », a-t-il déclaré.