AMMAN: Le financement et l'eau restent deux problèmes à résoudre malgré l'annonce par la Jordanie d'un ensemble de procédures techniques et bureaucratiques constituant les bases d'un projet d'amélioration de la sécurité alimentaire.
Le Royaume a contacté des donateurs et des bailleurs de fonds internationaux en vue d’obtenir le financement de ce projet, qui implique également la Syrie, l'Irak et le Liban.
La création par le gouvernement jordanien d'un Conseil de la sécurité alimentaire qui travaillera aux côtés du comité national pour la sécurité alimentaire contribuera à atténuer la vulnérabilité du pays aux crises alimentaires mondiales et au changement climatique.
La Jordanie a lancé son plan exécutif 2022-2024 fin août, dans le cadre de la Stratégie nationale de sécurité alimentaire 2021-2030.
Le Premier ministre Bisher al-Khasawneh a décrit la stratégie comme «la première du genre dans le Royaume, une mise en œuvre des directives du roi Abdallah pour marquer 2021 comme une année de sécurité alimentaire et pour faire de la Jordanie un modèle régional de sécurité alimentaire».
Al-Khasawneh avait alors déclaré que la Jordanie avait pris un certain nombre de mesures en matière de sécurité alimentaire qui avaient abouti à l'amélioration du classement de la Jordanie sur l'indice mondial de la sécurité alimentaire, «la plaçant à la 49e place mondiale en 2021, contre la 62e place en 2020».
Les ministres de l'Agriculture de Syrie, d'Irak et du Liban se sont rencontrés récemment à Amman et sont convenus de soutenir l'initiative de la Jordanie d'accueillir l'observatoire régional de la sécurité alimentaire.
Proposé par le Programme alimentaire mondial (PAM), l'observatoire de la région du Levant vise à «surveiller les variables liées à la sécurité alimentaire et à suivre les questions liées au changement climatique, aux productions locales et au commerce».
Selon le PAM, l'observatoire basé en Jordanie «fournira également une analyse précise basée sur l'intelligence artificielle qui permettra aux décideurs politiques des pays du Levant d’établir des stratégies liées à la sécurité alimentaire».
À l’issue de la réunion d'Amman, un communiqué a été publié soulignant la nécessité de renforcer la coopération en matière de sécurité alimentaire, de savoir-faire, d'échange et d'intégration, afin de répondre à la demande accrue de produits alimentaires de même qu’à la hausse des prix.
En quête de financement
La Jordanie a annoncé en avril de cette année qu'elle négociait avec la Banque mondiale un prêt de 480 millions de dollars (1 dollar = 1 euro) pour financer son projet d'amélioration de la sécurité alimentaire.
Cependant, quatre mois plus tard, le gouvernement a déclaré qu'il n'était pas parvenu à un accord avec le bailleur de fonds international.
Le ministre de la Planification et de la Coopération internationale, Nasser Shraideh, a déclaré en août que le gouvernement avait conclu des «accords de financement initiaux» d'une valeur de 430 millions de dollars avec d'autres bailleurs internationaux.
Une source de la Banque mondiale a reconnu le gel de l'accord de prêt avec la Jordanie, mais a refusé d’en donner la raison.
Une source, qui a préféré rester anonyme, a déclaré à Arab News: «Il n'y a pas eu d'accord avec la Jordanie. La demande de financement était en cours d'examen.»
Une source officielle jordanienne, qui a également requis l'anonymat, a affirmé que le refus de la Banque mondiale en rapport avec la demande de la Jordanie était «probablement dû aux préoccupations de la Banque concernant les dettes du Royaume.»
Selon les rapports de la Banque mondiale sur la Jordanie, un total de quinze projets de financement n'ont pas été finalisés entre les deux parties, ni convenus avec le gouvernement.
Le dernier à être annulé, selon la Banque mondiale, était le projet de sécurité alimentaire d'urgence de 480 millions de dollars, en plus d'autres accords de financement, dont un prêt de 100 millions de dollars visant à financer l'expansion des silos à grains de la Jordanie.
La Jordanie a annoncé début octobre qu'elle signerait un nouvel accord avec la Banque européenne d'investissement pour fournir 130 millions d'euros dans le but d'améliorer la sécurité alimentaire.
S'adressant à la télévision d’État Al-Mamlakah, Nasser Shraideh a déclaré que l'argent servirait à augmenter et à maintenir les achats de blé et d'orge de la Jordanie, et à étendre sa capacité de stockage des produits de base.
La Jordanie et le Fonds de l'OPEP pour le développement international ont également signé un accord de 100 millions de dollars pour financer le projet de sécurité alimentaire d'urgence. Le gouvernement a déclaré que l'accord s'inscrivait dans le cadre des efforts visant à financer l'achat de produits de base.
Le ministre a ajouté qu'un accord de 200 millions de dollars avait été signé avec le Islamic Development Bank Group, également pour renforcer les stocks de blé et d'orge du Royaume.
Nasser Shraideh a salué le succès du gouvernement à assurer «des approvisionnements alimentaires de manière abondante pendant les périodes difficiles, principalement la pandémie de la Covid-19 et le conflit russo-ukrainien», grâce aux silos et réservoirs récemment construits.
Pénuries d'eau
Cependant, la stratégie de sécurité alimentaire de la Jordanie a inévitablement été mise à l'épreuve par les ressources en eau limitées du pays.
Sachant qu’elle est classée comme le deuxième pays le plus pauvre en eau au monde, les experts affirment néanmoins que la Jordanie, comme de nombreux autres pays, peut surmonter ce dilemme en recourant à de nouveaux modèles agricoles qui utilisent moins d'eau et se concentrent sur les cultures pluviales.
Reconnaissant qu'aucun pays ne peut atteindre l'autosuffisance alimentaire, Hazem al-Nasser, ancien ministre de l'Eau, a déclaré que «le fait que la Jordanie et de nombreux autres pays arabes soient en dessous du seuil de pauvreté en matière d’eau» signifiait que la production alimentaire, en particulier les céréales, était loin d’atteindre l'objectif voulu.
Dans un article récemment publié, Al-Nasser affirme: «La baisse des précipitations due au changement climatique touchera en premier lieu la production de céréales pluviales.»
«Compte tenu de l'impact du changement climatique et de l'urbanisation sans plans d'atténuation et d'adaptation appropriés, ce type d'agriculture pluviale sera progressivement supprimé.»
Al-Nasser a énuméré un certain nombre de procédures et de projets qui, s'ils sont mis en œuvre, peuvent aider la Jordanie et de nombreux autres pays à atteindre la sécurité alimentaire, notamment le lancement de campagnes de sensibilisation sur la rationalisation de la consommation alimentaire, compte tenu des «fortes hausses des prix alimentaires internationaux».
Le directeur du Centre national de recherche agricole, Nizar Haddad, a déclaré que la Jordanie avait produit des variétés de blé et d'orge résistantes à la chaleur, et utilisé des biotechnologies modernes qui lui permettent de faire face à la pénurie d'eau et d'accroître sa production de produits de base.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com