PARIS: Kader Arif, ex-ministre de François Hollande, a été condamné mercredi à un an de prison avec sursis par la Cour de justice de la République (CJR) pour avoir fait attribuer un marché public en 2014 à une société gérée par son frère, "une injustice" pour son avocat.
Chargé du portefeuille des Anciens combattants dans les gouvernements Ayrault puis Valls, entre 2012 et 2014, Kader Arif devra également payer une amende de 20 000 euros.
Il était accusé d'avoir fait conclure sans mise en concurrence, en mars 2014, un contrat de "media-training" de 60 000 euros entre le ministère de la Défense et la société All Access, gérée par son frère Aissa Arif, dont le nom n'apparaissait pas.
"Kader Arif (...) s'est délibérément placé dans une situation où il ne pouvait ignorer qu'il retirait un intérêt pour lui même et ses proches de nature à compromettre tant son objectivité que son impartialité", ce qui constitue le délit de "prise illégale d'intérêt", a estimé dans son arrêt la formation de jugement de la CJR, seule instance habilitée à juger des membres du gouvernement pour des faits commis dans l'exercice de leurs fonctions.
Cette formation, composée de trois magistrats, de six députés et de six sénateurs, l'a aussi reconnu coupable des deux autres délits qui lui étaient reprochés: l'atteinte à la liberté d'accès des candidats aux marché publics et le détournement de fonds publics, en ayant déclenché le règlement de la facture alors qu'une seule séance de "media training" avait été réalisée sur les six prévues.
« Fortes hésitations »
"Huit ans d'attente et au bout une injustice", a commenté l'un de ses avocats, François Cantier, après l'annonce de la décision.
"Si M. Arif était vraiment coupable des faits qu'on lui reproche, la peine, elle, est très légère. Il y a eu très certainement de fortes hésitations sur la question centrale de la culpabilité", a-t-il analysé.
Jeudi dernier, l'accusation avait requis deux ans de prison avec sursis, 15.000 euros d'amende, ainsi qu'une interdiction d'exercer des fonctions publiques pendant cinq ans.
Si les montants en jeu sont "modestes", "un tel comportement témoigne d'une conception de l'Etat qui n'est pas acceptable et qui va à l'encontre des principes d'exemplarité et de probité" qu'on attend d'un responsable public, avait estimé le procureur général près la Cour de cassation François Molins, qui représente l'accusation à la CJR.
Estimant qu'il avait "trahi la confiance" placée en lui en cherchant à "venir en aide à sa famille par le biais de ses fonctions", M. Molins avait également retenu une volonté de "dissimulation" des liens entre son frère et la société ayant obtenu le contrat.
L'ancien ministre délégué et secrétaire d'Etat avait lui réfuté toute volonté de "tricher", assurant qu'il ne connaissait pas le rôle de son frère dans la société retenue pour le contrat.
"Je ne savais pas qui étaient ses dirigeants et qui étaient ses actionnaires", avait affirmé Kader Arif, renvoyant à son administration la responsabilité de ne pas l'avoir alerté sur un lien entre All Access et sa famille.