Dans le sud des Etats-Unis, l'industrie gazière grignote les zones côtières

John Allaire, retraité de 66 ans, se tient devant le terminal d'exportation de gaz naturel liquéfié de Venture Global Calcasieu Pass à Cameron, en Louisiane (Photo, AFP).
John Allaire, retraité de 66 ans, se tient devant le terminal d'exportation de gaz naturel liquéfié de Venture Global Calcasieu Pass à Cameron, en Louisiane (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 10 octobre 2022

Dans le sud des Etats-Unis, l'industrie gazière grignote les zones côtières

  • «Si c'est construit, il n'y aura pas de retour en arrière possible»
  • Dans cette région côtière, la récente démultiplication des projets irrite les habitants, qui les jugent trop polluants

CAMERON, États-Unis:,"Ils nous prennent notre vie". Sur le seuil de sa maison en Louisiane, Travis Dardar pointe du doigt un imposant terminal d'exportation de gaz... et le terrain qui pourrait bientôt en accueillir un deuxième, le forçant à quitter sa maison et son activité de pêcheur.

Ce projet est "bien pire qu'un ouragan", après lequel, au moins, "on peut reconstruire", juge celui qui se voit comme une victime collatérale du développement de l'industrie gazière américaine, que la crise du gaz russe a rendue primordiale.

"Si c'est construit, il n'y aura pas de retour en arrière possible."

Dans cette région côtière entre le Texas et la Louisiane, la récente démultiplication des projets de terminaux d'exportation de gaz naturel liquéfié (GNL), immenses édifices posés sur des plateaux de béton qui grignotent peu à peu les zones naturelles, irrite les habitants, qui les jugent trop polluants.

Le terminal envisagé près de chez Travis Dardar et sa femme Nicole ne serait qu'à quelques centaines de mètres de leur domicile. Cela ne leur laisserait d'autre choix que de plier bagages - en espérant que leur terrain soit racheté à un prix raisonnable.

Un autre est en projet à l'endroit où ils pêchent. Le couple Dardar risque donc de devoir aussi abandonner son activité de pêche de crevettes et d'huîtres dans la zone, ultime déracinement.

"On ne sait pas ce qu'on va faire ensuite. On sait une chose : on ne peut pas vivre ici", regrette Travis Dardar.

Ukraine

En mars dernier, quelques semaines après le début de l'invasion russe de l'Ukraine, le président Joe Biden s'est engagé à augmenter les livraisons de GNL à l'Europe, trop dépendante du gaz russe.

44,6 milliards de mètres cubes y ont déjà été exportés en 2022, contre 26 en 2020, rapporte le Centre pour le GNL, qui regroupe des entreprises du secteur.

Les États-Unis sont devenus le premier exportateur mondial de GNL, une industrie qui ne peut qu'être attirée par le Golfe du Mexique, avec ses infrastructures et sa situation stratégique.

À elle seule, la zone compte 5 des 7 terminaux d'exportation américains en activité et 22 des 24 projets soumis aux autorités.

Une activité qui, en retour, lui apporte "de nombreux emplois", promet Charlie Riedl, directeur exécutif du Centre pour le GNL.

Selon lui, tant que les projets de construction de terminaux respectent les critères environnementaux, le gouvernement doit "les autoriser sans délai".

Bruit, lumière et pollution

Mais ces côtes de Louisiane et du Texas sont "sacrifiées", assure John Allaire, un autre habitant.

"Vous avez le bruit, la lumière, la pollution de l'air et plusieurs dizaines d'hectares de marécages bétonnés" se désole-t-il, assis dans sa barque, en désignant le nouveau terminal d'exportation de GNL, tout près de chez lui.

Dépité, John Allaire observe les vagues causées par les immenses méthaniers éroder la côte et les boues de dragages qui couvrent sa plage.

Il s'inquiète aussi des conséquences sur la faune. Le projet prévu sur le terrain qui longe sa propriété se situe sur un marécage abritant une espèce d'oiseaux menacée, le râle noir.

"C'est horrible de voir cette administration (Biden, NDLR) (…) qui disait qu'il y avait une urgence climatique, approuver ce genre d'installations", se désole Kelsey Crane, en charge des politiques publiques à l’association Earthworks.

Fissures

De l'autre côté du fleuve Sabine, la ville texane de Port Arthur compte déjà de nombreuses installations pétrochimiques.

Près du terminal de Cheniere Energy - qui a payé l'an dernier près de 1,5 million de dollars d'amende pour des fissures dans ses réservoirs - le militant John Beard guide un "toxic tour" de la région, en compagnie d'associations écologistes.

En juin, une explosion a provoqué la fermeture temporaire du terminal GNL de Freeport, plus au sud, rappelant aux habitants les risques immédiats posés par ce voisinage si particulier.

Mais John Beard, à la tête du Port Arthur Community Action Network, dénonce aussi les effets à long terme sur la santé d'habitants largement issus des minorités.

A Port Arthur, la population est majoritairement afro-américaine ou hispanique, et un quart d'entre elle vit sous le seuil de pauvreté, selon le bureau de recensement américain.

Dans le comté, le taux de mortalité du cancer est 25% plus élevé que dans le reste de l'Etat, d'après le Texas Cancer Registry.

John Beard pense que les industriels n'ont pas choisi cette zone par hasard : "ils prennent le chemin où la résistance est la moindre, celui des pauvres, de ceux qui n'ont pas accès à des avocats, qui n'ont pas l'éducation ou le savoir".


L'Otan en plein doute sur son avenir face à la tempête Trump

Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, s'exprime lors d'une conférence et d'une réunion avec des étudiants de l'École d'économie de Varsovie (SGH), à Varsovie (Pologne), le 26 mars 2025. (Photo Wojtek RADWANSKI / AFP)
Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, s'exprime lors d'une conférence et d'une réunion avec des étudiants de l'École d'économie de Varsovie (SGH), à Varsovie (Pologne), le 26 mars 2025. (Photo Wojtek RADWANSKI / AFP)
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  • Sous les coups de butoir de Donald Trump et de son équipe, l'Organisation du traité de l'Atlantique nord, vieille dame de plus de 75 ans, doit rapidement changer.
  • les États-Unis restent membres de l'OTAN, y compris pour la dissuasion nucléaire, mais se désengagent des forces conventionnelles, comme l'a évoqué le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth. 

BRUXELLES : Les tirs de barrage américains contre les pays européens de l'Otan ébranlent jusqu'aux fondements de l'Alliance atlantique, qui a cependant toutes les peines du monde à imaginer un avenir sans les États-Unis.

Sous les coups de butoir de Donald Trump et de son équipe, l'Organisation du traité de l'Atlantique nord, vieille dame de plus de 75 ans, doit rapidement changer. Un diplomate interrogé sous couvert d'anonymat décrit l'agressivité de la nouvelle administration américaine comme un « traumatisme ».

Ce changement se fera-t-il avec ou sans les États-Unis ? La question agite les couloirs du siège de l'Alliance à Bruxelles.

« On connaît la direction : moins d'États-Unis et plus d'Europe », résume un diplomate sous couvert d'anonymat. Cependant, de nombreuses questions restent en suspens.

En deux mois, Donald Trump s'en est pris au Canada qu'il entend voir devenir le 51ᵉ État américain, et au Danemark, dont il revendique l'un des territoires, le Groenland. 

Plusieurs responsables américains, dont le vice-président J. D. Vance, n'ont pas caché leur mépris à l'égard des Européens, considérés comme des « profiteurs » et des passagers clandestins d'une alliance où, dénoncent-ils, ils ne paient pas leur dû.

Depuis le 20 janvier, date du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, « l'optimisme est de moins en moins de mise », confie un diplomate. « Les États-Unis n'ont pas encore pris de décisions concrètes, mais on dirait que chaque jour est porteur d'un nouveau coup contre les fondations de l'Alliance. »

- Transition « désordonnée » -

Pour Camille Grand, ancien secrétaire général adjoint de l'Otan et chercheur auprès de l'ECFR, trois scénarios sont possibles.

Celui de la transition ordonnée : les Américains se désengagent, mais en bon ordre, à la suite d'une négociation qui donne aux Européens le temps de se préparer. « Cela permet d'éviter les incertitudes », assure-t-il dans un entretien avec l'AFP.

Celui de la transition « désordonnée » : les États-Unis restent membres de l'OTAN, y compris pour la dissuasion nucléaire, mais se désengagent des forces conventionnelles, comme l'a évoqué le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth. 

Le retrait se fait « en mode crise », avec des « menaces et des annonces désordonnées ». C'est « le scénario dominant » aujourd'hui, estime l'analyste.

Il y a aussi le scénario cauchemar pour nombre d'Alliés : le retrait « de facto ou de jure ». Les États-Unis se désintéresseront de la défense du continent européen.

Donald Trump exige que les Européens et les Canadiens consacrent au moins 5 % de leur PIB à cette défense, alors qu'ils sont à moins de 2 % pour l'Italie ou l'Espagne. La marche est très haute. Mais tous savent qu'il faudra « annoncer » quelque chose au sommet de l'OTAN en juin, selon un diplomate.

Le Secrétaire général de l'Alliance Mark Rutte a évoqué un chiffre entre 3,5 et 3,7 %. Ce sera difficile, mais c'est une question de priorités dans les dépenses nationales, ajoute-t-il. 

Personne ne sait si ce chiffre sera suffisant pour Donald Trump.

- "Cinq ans" -

En attendant, beaucoup à Bruxelles et dans les autres capitales européennes s'interrogent sur un "après" Etats-Unis.

"Nous avons toujours su que le moment viendrait où l'Amérique se retirerait en quelque sorte et où l'Europe devrait faire davantage", rappelle ainsi Jamie Shea, ancien porte-parole de l'Otan et expert auprès du think tank londonien Chatam House.

Et le calendrier est très serré. Les Européens ont "cinq ans" pour recréer une dissuasion face à la menace russe, juge ainsi Camille Grand. Un calcul basé sur le temps jugé nécessaire, selon plusieurs services de renseignement, pour que la Russie reconstitue son armée et soit en mesure de menacer un pays de l'Otan, explique-t-il. 

Selon cet expert français, les Européens en sont capables, même si un investissement substantiel sera nécessaire pour combler l'apport américain en termes de renseignement, de satellites ou de logistique. « Il n'y a pas de raison que 500 millions d'Européens ne puissent pas dissuader 140 millions de Russes », assure-t-il.

Plusieurs pays en doutent. « Les États-Unis restent indispensables pour une dissuasion crédible », estime ainsi un diplomate européen auprès de l'Otan.


Le Wisconsin, théâtre d'une première défaite électorale pour Trump et Musk

 Donald Trump et Elon Musk. (Photo AFP)
Donald Trump et Elon Musk. (Photo AFP)
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  • Le président américain Donald Trump a essuyé mardi son premier revers électoral avec l'élection d'une juge démocrate dans le Wisconsin,
  • En Floride, deux législatives partielles ont également eu lieu mardi dans des circonscriptions solidement ancrées à droite et qui resteront dans l'escarcelle des républicains, selon les projections de plusieurs médias

WASHINGTON : Le président américain Donald Trump a essuyé mardi son premier revers électoral avec l'élection d'une juge démocrate dans le Wisconsin, un scrutin habituellement d'ampleur locale, marqué cette fois-ci par la forte implication d'Elon Musk.

Selon les projections de plusieurs médias américains, Susan Crawford, soutenue par les démocrates, a remporté un siège pour dix ans à la Cour suprême de cet État de la région des Grands Lacs.

Elle faisait face à Brad Schimel, soutenu par Donald Trump et par le multimilliardaire Elon Musk, et dont la victoire aurait fait basculer la haute instance du Wisconsin du côté conservateur.

En Floride, deux législatives partielles ont également eu lieu mardi dans des circonscriptions solidement ancrées à droite et qui resteront dans l'escarcelle des républicains, selon les projections de plusieurs médias.

Mardi soir, le président a mis à profit sa plateforme Truth Social pour se féliciter des deux « larges » victoires de son camp en Floride, mettant en avant son « soutien » aux candidats.

Il n'a en revanche pas commenté le résultat pour la Cour suprême du Wisconsin, préférant y retenir l'adoption, par un référendum organisé le même jour, d'une mesure obligeant les électeurs à présenter une pièce d'identité avec photo afin de pouvoir voter.

« C'est une grande victoire pour les républicains, peut-être la plus grande de la soirée », a-t-il écrit.

« Le plus important » 

Elon Musk n'a pas non plus réagi à la défaite de Brad Schimel, et a plutôt salué l'issue du référendum local. « C'était le plus important », a-t-il affirmé sur son réseau social X.

Le patron de Tesla et Space X s'inquiétait d'un potentiel rééquilibrage par la Cour suprême locale dans le découpage des circonscriptions électorales, en faveur des démocrates. État pivot, le Wisconsin avait été remporté par Donald Trump à la présidentielle de novembre.

« C'est l'une de ces situations étranges où une petite élection en apparence pourrait déterminer le destin de la civilisation occidentale », avait lancé Elon Musk mardi.

Le président républicain avait, lui, publié lundi sur Truth Social un message de soutien à Brad Schimel. Il s'en était surtout pris à Susan Crawford, qui serait, selon lui, « un désastre pour le Wisconsin et pour les États-Unis d'Amérique ».

Un peu plus de deux mois après le début de son mandat, les enquêtes d'opinion indiquent une baisse relative de la popularité de Donald Trump. Ces élections dans le Wisconsin et en Floride étaient les premières véritables épreuves auxquelles il faisait face dans les urnes depuis novembre.

Campagne onéreuse 

Mardi, le trumpiste Randy Fine a bien remporté le siège en jeu à la Chambre des représentants face au démocrate Josh Weil, mais avec une avance bien plus mince qu'il y a quelques mois.

Ces résultats ont « de quoi donner des sueurs froides à mes collègues républicains », a déclaré sur la chaîne MSNBC Hakeem Jeffries, responsable de la minorité démocrate à la Chambre des représentants. Cela fait écho à la difficulté de l'opposition à se faire entendre depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche.

Dans le Wisconsin, les deux camps avaient sorti l'artillerie lourde pour une élection qui, d'ordinaire, passe inaperçue dans le reste du pays.

Selon le Centre Brennan de l'université de New York, c'est « le scrutin judiciaire le plus coûteux de l'histoire américaine », avec plus de 98 millions de dollars déversés dans la campagne, dont 53 millions en faveur du candidat conservateur.

Elon Musk n'est pas étranger à cela.

« Il a dépensé plus de 25 millions de dollars pour essayer de m'empêcher de siéger à la Cour suprême du Wisconsin », a lancé dimanche Susan Crawford lors d'un rassemblement.

Son équipe de campagne avait récemment accusé Elon Musk de vouloir « acheter un siège à la Cour suprême du Wisconsin afin d'obtenir une décision favorable » dans des poursuites engagées par Tesla, son entreprise de véhicules électriques, contre les autorités du Wisconsin.


Amnesty International demande à la Hongrie d'arrêter M. Netanyahou

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. (Photo d'archives de l'AFP)
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. (Photo d'archives de l'AFP)
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  • Le Premier ministre israélien doit se rendre cette semaine dans un pays membre de la Cour pénale internationale
  • Cette visite " ne doit pas devenir un indicateur de l'avenir des droits humains en Europe "

LONDRES : Amnesty International a demandé à la Hongrie d'arrêter le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, à la suite d'informations selon lesquelles il se rendra dans cet État membre de l'UE mercredi à l'invitation de son homologue hongrois Viktor Orban.

M. Netanyahou fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré en novembre par la Cour pénale internationale en raison de la conduite d'Israël à Gaza.

M. Orban, proche allié de M. Netanyahu, a déclaré qu'il n'exécuterait pas le mandat. En tant qu'État membre, la Hongrie est tenue d'exécuter tout mandat d'arrêt délivré par la CPI.