CHICAGO: Tim Lenderking, l'envoyé spécial des États-Unis pour le Yémen, a qualifié de «préoccupant» l'échec de la prolongation de la trêve avec les Houthis, qui a expiré le 2 octobre, mais il a refusé de spéculer sur le rôle éventuel de l'Iran sur ce point.
Lors d'une réunion d'information à laquelle Arab News a assisté mercredi, Lenderking a déclaré que les Houthis avaient formulé des demandes «de dernière minute» qui sous-entendent qu'ils «revenaient sur l’essentiel des engagements qu'ils avaient pris plus tôt dans le processus».
Lorsqu’on lui a demandé si le régime iranien, qui soutient les Houthis, pourrait être responsable de cette situation, Lenderking a répondu: «Nous ne savons pas.» Téhéran a soutenu la trêve de deux mois menée par l'ONU lorsqu'elle a été conclue le 2 avril, a-t-il ajouté, ainsi que lorsqu'elle a été renouvelée, sans difficulté, le 2 juin et le 2 août.
Il a attribué l'impossibilité de convenir d'une troisième prolongation au cours du présent mois aux «demandes maximalistes et impossibles» formulées par les négociateurs houthis au sujet du paiement des salaires de leur «personnel militaire et de sécurité».
Tant que la trêve ne sera pas renouvelée, la menace d'une reprise de la violence majeure demeurera, a déclaré Lenderking, et sans un retour à une «approche plus positive», l'implication de l'Iran dans le processus continuera d'être perçue comme «assez négative».
«Il reste dans notre intérêt national d'aider nos partenaires du Golfe à se défendre contre toute agression extérieure et nous le ferons dans le cas d'une agression qui vient du Yémen», a déclaré Lenderking.
«Le président et le secrétaire d'État ont été clairs sur le fait que les États-Unis continueront à soutenir nos partenaires du Golfe et leurs besoins légitimes en matière de défense afin de répondre aux menaces existantes et émergentes. Et cela inclut les attaques transfrontalières, en provenance du Yémen ou d'ailleurs, contre des cibles en Arabie saoudite et dans les Émirats arabes unis (EAU).
«Après tout, il y a plus de cent vingt mille citoyens américains qui vivent et travaillent dans les pays de la région du Golfe. Je sais que le président et le secrétaire n'ont pas d'autre objectif que celui d'assurer la sécurité des Américains, où qu'ils vivent à l'étranger.»
Lenderking a réaffirmé que la porte restait ouverte à la reprise des pourparlers de paix, qui, selon lui, apporterait des avantages aux Houthis et à l’ensemble du peuple du Yémen, mais il a condamné les récentes menaces de la milice.
«Le discours des Houthis, qui ont menacé la navigation commerciale et les compagnies pétrolières, est totalement inacceptable», a-t-il affirmé.
L'émissaire a déclaré que l'administration Biden avait approuvé, avec le soutien du Congrès, le «transfert futur» d'armements défensifs à l'Arabie saoudite et aux EAU, notamment «des missiles Patriot supplémentaires au royaume d'Arabie saoudite et le système Terminal High Altitude Area Defense, ou Thaad, aux Émirats arabes unis».
«Ces munitions ont joué un rôle essentiel dans la défense des deux pays contre les attaques transfrontalières de drones et de missiles qui proviennent du Yémen», a-t-il ajouté.
«Permettez-moi d'insister sur le point qui est ici essentiel: nous, ainsi que la communauté internationale, appelons toutes les parties à la retenue. En ce moment particulièrement sensible, alors qu'aucune trêve n'est officiellement en vigueur et qu'elle a été convenue, accueillie favorablement et respectée par les parties, nous devons insister pour que toutes les parties fassent preuve d'un maximum de retenue.»
Selon Lenderking, la trêve décidée au mois d’avril a eu de nombreux effets bénéfiques pour le peuple yéménite: une réduction spectaculaire – d'environ 60% – des pertes civiles; plus de vingt-cinq mille citoyens yéménites ont pu se rendre à l'étranger grâce à des vols commerciaux pour la première fois depuis 2016; enfin, une multiplication par cinq de la quantité d'expéditions de carburant qui passe par le port de Hodeïdah par rapport à l'année précédente, ce qui a contribué à réduire les prix du carburant.
Le cessez-le-feu a également permis aux organisations humanitaires de travailler plus facilement dans le pays.
«Nous sommes extrêmement préoccupés par la situation humanitaire au Yémen», a déclaré Lenderking, tout en prévenant que les besoins des civils «sont importants» et que «les financements ne sont pas suffisants».
«Les États-Unis ont versé 5 milliards de dollars [1 dollar = 1,01 euro] au cours du conflit, dont 1 milliard à l'aide humanitaire au cours de cette année», a-t-il précisé.
Les États-Unis continueront à désigner les Houthis comme une organisation terroriste étrangère jusqu'à ce qu'un accord de paix définitif soit conclu, a précisé Lenderking.
«Nous nous appuyons également sur les engagements que les Saoudiens et le gouvernement yéménite ont pris pour maintenir les termes de la trêve», a-t-il indiqué.
«Alors, effectivement, voyons quels engagements les Houthis sont prêts à prendre. Réduisons les exigences maximalistes. Reprenons la conversation productive qui a eu lieu au cours des six derniers mois sur la concrétisation d'une trêve élargie, d’un cessez-le-feu durable et du processus politique interyéménite que nous souhaitons tous.»
S’efforçant de considérer les derniers développements de manière aussi optimiste que possible au vu des circonstances, Lenderking a indiqué: «Nous constatons que les éléments clés de la trêve continuent de tenir et que les négociations intensives menées par l'ONU et la diplomatie américaine se poursuivent sans relâche.»
«Quand je parle des éléments clés de la trêve qui tiennent, laissez-moi être clair sur ce que je veux dire. J’entends qu'il y a toujours des niveaux de violence relativement bas dans le pays. Les bateaux de carburant continuent à décharger dans le port de Hodeïdah. Il y aura davantage de vols civils et commerciaux de l'aéroport de Sanaa. Ces éléments particuliers de la trêve ont été extrêmement efficaces et ont donné des résultats tangibles au peuple yéménite au cours des six derniers mois.»
«Nous pensons être confrontés à un choix difficile: d'une part, il y a un retour à la guerre, qui n'apportera rien d'autre que des victimes et des destructions au Yémen, et encore plus de confusion quant à l'orientation de ce conflit», a-t-il soutenu. Si, cependant, un renouvellement du cessez-le-feu venait à être décidé, «il y a la possibilité non seulement d'étendre, mais d'élargir la trêve, c'est-à-dire d'y apporter des éléments plus positifs, dont les vols, comme je l'ai mentionné. Des discussions très dynamiques sont en cours avec de nombreux pays sur des destinations supplémentaires pour les vols».
«Nous pensons que le traitement du carburant à Hodeïdah sera encore plus rationalisé. Nous espérons parvenir à un accord sur le paiement des salaires. Il s'agit d'une demande essentielle des deux parties: avoir la possibilité de payer les fonctionnaires yéménites qui ne l'ont pas été depuis de nombreuses années – enseignants, infirmières, fonctionnaires –, leur verser des salaires.»
«C'est le genre d'avantages qui sont en jeu si les parties, en particulier les Houthis, choisissent la voie de la paix. C'est un choix très clair, du point de vue de la communauté internationale et de celui des États-Unis.»
Lenderking a de nouveau souligné que «tous les canaux restent ouverts» pour des pourparlers qui visent à prolonger la trêve et à reprendre les négociations afin d'éviter une escalade de la violence.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com