PARIS: Violoniste renommé, directeur d'un festival de musique et d'un orchestre, le Français Renaud Capuçon ajoute une nouvelle corde à son arc: un label qui fera "la courte échelle" à de jeunes musiciens en quête de visibilité.
L'artiste, qui vient de quitter Warner Classics et le label Erato pour rejoindre Deutsche Grammophon (filiale d'Universal Music Group), devient ainsi producteur, en développant en collaboration avec cette prestigieuse maison de disque un label nommé "Beau Soir Productions", qui aidera de jeunes talents à se produire plus largement.
"Ça a toujours trotté dans ma tête mais je n'avais pas trouvé la clé de la manière de faire", affirme à l'AFP le violoniste, qui mettait déjà souvent en avant de jeunes musiciens, notamment au Festival de Pâques qu'il a fondé à Aix-en-Provence, dans le sud-est de la France, et qui fêtera ses 10 ans en 2023.
«Amener la musique partout»
"Ça s'est cristallisé pendant la pandémie. Il y avait beaucoup de jeunes impactés et, comme j'aidais et conseillais déjà des talents émergents, je me suis dit: +Autant le faire dans une entité+", ajoute le violoniste qui, pendant le confinement, avait diffusé sur les réseaux sociaux chaque jour des vidéos de lui jouant à domicile.
L'idée de "Beau Soir Productions", présentée par l'artiste et Deutsche Grammophon comme un projet innovant dans le milieu de la musique classique, est d'offrir une sorte de "courte échelle pour les faire avancer plus rapidement".
Le label produit les concerts de ces jeunes avec Renaud Capuçon à travers la France et des enregistrements d'eux seront diffusés par Deutsche Grammophon.
"Il ne s'agit pas de jeunes sortant du Conservatoire, ce sont déjà des professionnels", explique-t-il. Pour le moment, le projet implique six talents, dont la violonistes Manon Galy (révélation aux Victoires de la musique classique cette année) et le jeune altiste Paul Zientara.
"Tant qu'on est au Conservatoire, on est protégé mais, quand on est dans l'entre-deux et qu'on n'a pas encore d'agent, on doit prendre en tant que jeune musicien les plus importantes décisions de sa vie", ajoute M. Capuçon.
"Je suis soit second violon ou en train de diriger l'orchestre, donc pas de risque que je les éclipse", affirme celui qui a fait ses débuts comme maestro il y a un an avec l'Orchestre de chambre de Lausanne, dont il est le directeur artistique.
"Ce n'est pas moi qui les fait progresser mais, en les emmenant dans des salles pleines, ils prennent confiance", dit-il.
"Il y a un côté social également: on va se produire dans des salles en région qui ont du mal à remplir, dans des prisons, ds hôpitaux. Ca me semble essentiel d'amener de la musique partout", affirme le musicien de 46 ans, qui continuera de se produire en solo et de commercialiser des albums.
"J'ai l'impression d'être dans une autre partie de ma vie", affirme l'artiste, par ailleurs époux de la journaliste française Laurence Ferrari.
Il vient de sortir un album (sous le label Erato), où il s'attaque aux "Quatre Saisons" de Vivaldi, ainsi qu'à des concertos du compositeur guadeloupéen méconnu Le Chevalier de Saint-George (1745-1799), qui va faire l’objet d'un biopic de Disney.
Ayant fondé il y a deux ans un fonds de dotation qui sert à prêter des instruments, souvent chers, à de jeunes musiciens, il se plaît dans ce rôle de "père de famille", leur prodiguant des conseils en termes de répertoire mais aussi concernant leur image sur les réseaux sociaux.
"Les jeunes peuvent être entraînés dans une sorte de vague quand on leur dit: +Vous êtes super+ et ils oublient qu'ils sont là pour jouer du Brahms ou du Beethoven... Mais il faut garder les pieds sur terre pour tenir sur le long terme", insiste-t-il.