Le Hezbollah et l'Iran empêchent tout redressement au Liban, selon des experts

Des membres de la milice du Hezbollah soutenue par l'Iran défilent à Srifa, au sud Liban, lors d'un enterrement d’un milicien haut gradé, en 2016 (Photo, Shutterstock)
Des membres de la milice du Hezbollah soutenue par l'Iran défilent à Srifa, au sud Liban, lors d'un enterrement d’un milicien haut gradé, en 2016 (Photo, Shutterstock)
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Publié le Samedi 07 novembre 2020

Le Hezbollah et l'Iran empêchent tout redressement au Liban, selon des experts

  • Une table ronde met en évidence l'intransigeance politique et la mauvaise gestion économique comme obstacles aux réformes
  • L'Iran «contribue aux conflits dans la région, transformant ainsi le Liban en théâtre de nombreux et terribles événements»


LONDRES: Le Hezbollah et l'Iran empêchent le Liban de mettre en œuvre des réformes indispensables pour sortir des crises politiques, sociales et financières, a souligné vendredi Ziad Majed, professeur associé et coordinateur de programme pour les pluralités du Moyen-Orient à l'Université américaine de Paris.

L'Iran «contribue aux conflits dans la région, transformant ainsi le Liban en théâtre de nombreux et terribles événements», a indiqué Majed lors d'une table ronde virtuelle organisée par le Conseil pour la compréhension arabo-britannique en présence d'Arab News.

Alia Moubayed, analyste financière, a noté pour sa part que le système politique dysfonctionnel avait hautement contribué aux problèmes financiers du Liban.

«La nature existentielle de cette crise découle du fait qu’elle comprend plusieurs volets. C’est une crise de la balance des paiements… C’est aussi une crise de la dette. La dette du Liban est supérieure à 140% depuis des décennies et, récemment, elle n’a cessé d’augmenter. Nous sommes arrivés à un point où cette dette est devenue  fatale, conduisant à un défaut de paiement», a-t-elle ajouté.

«C’est aussi une crise bancaire. Le système bancaire attirait des capitaux étrangers et offrait des bénéfices exorbitants et risqués. Jusqu'à 75% des actifs des banques ainsi que la Banque centrale étaient exposés au risque, le résultat a alors été une incapacité à rembourser».

Moubayed a souligné que cela avait de graves répercussions sociales sur les Libanais ordinaires. «Le revenu par habitant a diminué de plus de la moitié en moins d'un an. La livre libanaise a perdu près de 80% de sa valeur», a-t-elle ajouté.

«Cela a évidemment conduit à une hyperinflation de  plus de 120% qui ruine véritablement l’épargne des Libanais, et sape également de nombreux moyens de subsistance. Les Libanais souffrent d’un seuil de pauvreté qui dépasse désormais les 50%, contre 37% en 2019.

«Il y a eu aussi l'horrible explosion qui s'est produite au port de Beyrouth, et qui a aggravé la contraction du PIB. L'économie libanaise est véritablement en état de choc».

Ziad Abdel Samad, directeur exécutif du Réseau des ONG arabes pour le développement, a déclaré que l'explosion du 4 août a été un moment charnière pour le pays, aussi bien symbolique que matériel.

«L’explosion de Beyrouth… a été la manifestation de l’échec du gouvernement. La corruption et la négligence ont empêché les principales agences de faire correctement leur travail », a-t-il ajouté.

Moubayed a affirmé: «Nous nous retrouvons avec un manque de volonté, de compétence et… de capacité à faire avancer le pays sur une voie vertueuse. Cette perspective est également contrecarrée par l’élite politique car quelqu’un doit supporter le poids de ces pertes. Cela signifie que ceux qui ont profité de cet état de fait pendant tout ce temps… essaient maintenant d'éviter cette refonte».

Majed a acquiescé, ajoutant que: «Dans ce genre de situation, il est extrêmement difficile de modifier la loi électorale, de façonner le concept de partage du pouvoir, et de parler d'une citoyenneté capable, par sa créativité et son activisme, de reconstruire à nouveau le Liban ou encore le système politique».

Il a poursuivi: «Si vous associez avec cela la gestion financière ou toutes les crises économiques et la terrible situation actuelle, vous avez un pays qui ne fait que pousser ses habitants à partir».

Cependant, Abdel Samad a suggéré un remodelage complet des approches sociales et économiques au Liban, basé sur «la création d'une grande coalition» afin d’«adopter un programme de réforme urgente» et «récupérer l'État et les biens volés» auprès de l'élite politique.

«Il est évident que l’effondrement du Liban créera sans aucun doute de graves menaces pour la région. Le Liban accueille plus d'un million de réfugiés syriens et environ 500 000 réfugiés palestiniens officiellement enregistrés », a-t-il dit.

«Il est important de souligner que toute pression externe peut certainement aider, mais ceci n’apportera le résultat escompté qu'avec l'aide d'un mouvement local fort, capable de briser le statu quo et de conduire la nation vers de réels changements».

Moubayed a révélé que si un changement politique se produit, une feuille de route sera nécessairement prête pour résoudre les problèmes financiers du Liban.

«Nous avons besoin d'une loi relative au contrôle des capitaux qui réduirait les pertes hors du système. Une autre action immédiate serait une rationalisation du coûteux système de subventions qui ne profite pas à ceux qui en ont réellement besoin», a-t-elle ajouté.

«En plus de ces mesures, nous devons aborder la crise de manière globale. Cela signifie une restructuration solide de la dette qui permettrait de remédier au caractère non viable des finances publiques.

«Le deuxième pilier de l'approche serait la restructuration du système bancaire afin de remettre le secteur financier à sa bonne taille, car nous sommes clairement en présence d'un système surdimensionné que la société et l'économie ne peuvent pas soutenir ».

«Le troisième pilier serait également un solide système de protection sociale qui fait défaut au Liban. Il est clair que toute la structure de la gouvernance nécessite une réforme réelle. Je ne pense pas que les citoyens libanais sont prêts en ce moment à subir davantage de douleurs, inévitables si nous n’établissons pas un système de bonne gouvernance basé sur la transparence, sur un appareil judiciaire indépendant, et sur une forte responsabilité».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Finul: quatre soldats italiens blessés, Rome accuse le Hezbollah

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  • Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban
  • Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus

ROME: Quatre soldats italiens ont été légèrement blessés lors d'une nouvelle "attaque" contre la mission de maintien de la paix de l'ONU au Liban, la Finul, a indiqué vendredi le gouvernement italien, qui en a attribué la responsabilité au Hezbollah.

"J'ai appris avec profonde indignation et inquiétude que de nouvelles attaques avaient visé le QG italien de la Finul dans le sud du Liban (et) blessé des soldats italiens", a indiqué dans un communiqué la Première ministre Giorgia Meloni.

"De telles attaques sont inacceptables et je renouvelle mon appel pour que les parties en présence garantissent à tout moment la sécurité des soldats de la Finul et collaborent pour identifier rapidement les responsables", a-t-elle affirmé.

Mme Meloni n'a pas désigné le responsable de cette attaque, mais son ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani a pointé du doigt le Hezbollah: "Ce devraient être deux missiles (...) lancés par le Hezbollah, encore une fois", a-t-il déclaré là la presse à Turin (nord-ouest).

Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a indiqué à l'AFP que Rome attendrait une enquête de la Finul.

Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban, qui abrite le contingent italien et le commandement du secteur ouest de la Finul".

"J'essayerai de parler avec le nouveau ministre israélien de la Défense (Israël Katz, ndlr), ce qui a été impossible depuis sa prise de fonction, pour lui demander d'éviter d'utiliser les bases de la Finul comme bouclier", a affirmé le ministre de la Défense Guido Crosetto, cité par le communiqué.

Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus, dont une vingtaine dus à des tirs ou des actions israéliennes.

Plus de 10.000 Casques bleus sont stationnés dans le sud du Liban, où la Finul est déployée depuis 1978 pour faire tampon avec Israël. Ils sont chargés notamment de surveiller la Ligne bleue, démarcation fixée par l'ONU entre les deux pays.

L'Italie en est le principal contributeur européen (1.068 soldats, selon l'ONU), devant l'Espagne (676), la France (673) et l'Irlande (370).


Syrie: le bilan des frappes israéliennes sur Palmyre s'élève à 92 morts

Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
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  • Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie
  • Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah

BEYROUTH: Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan.

Mercredi, trois frappes israéliennes ont ciblé la ville moderne attenante aux ruines gréco-romaines de la cité millénaire de Palmyre. Une d'entre elles a touché une réunion de membres de groupes pro-iraniens avec des responsables des mouvements irakien d'Al-Noujaba et libanais Hezbollah, selon l'Observatoire.

Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie.

Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah.

L'ONG avait fait état la veille de 82 morts.

Ces frappes israéliennes sont "probablement les plus meurtrières" ayant visé la Syrie à ce jour, a déclaré jeudi devant le Conseil de sécurité Najat Rochdi, adjointe de l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie.

Depuis le 23 septembre, Israël a intensifié ses frappes contre le Hezbollah au Liban mais également sur le territoire syrien, où le puissant mouvement libanais soutient le régime de Damas.

Depuis le début de la guerre civile en Syrie, Israël a mené des centaines de frappes contre le pays voisin, visant l'armée syrienne et des groupes soutenus par Téhéran, son ennemi juré. L'armée israélienne confirme rarement ces frappes.

Le conflit en Syrie a éclaté après la répression d'un soulèvement populaire qui a dégénéré en guerre civile. Il a fait plus d'un demi-million de morts, ravagé les infrastructures et déplacé des millions de personnes.

Située dans le désert syrien et classée au patrimoine mondial de l'Unesco, Palmyre abrite des temples gréco-romains millénaires.

 


Israël annonce mettre fin à un régime de garde à vue illimitée pour les colons de Cisjordanie

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  • Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne
  • Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a annoncé vendredi que le régime dit de la détention administrative, équivalent d'une garde à vue quasi illimitée, ne serait désormais plus applicable aux colons israéliens en Cisjordanie.

Alors que "les colonies juives [en Cisjordanie] sont soumises à de graves menaces terroristes palestiniennes [...] et que des sanctions internationales injustifiées sont prises contre des colons [ou des entreprises oeuvrant à la colonisation], il n'est pas approprié que l'Etat d'Israël applique une mesure aussi sévère [la détention administrative, NDLR] contre des colons", déclare M. Katz dans un communiqué.

Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967 et les violences ont explosé dans ce territoire palestinien depuis le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas à Gaza, le 7 octobre 2023.

Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne. Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens.

Face à la montée des actes de violences commis par des colons armés, plusieurs pays occidentaux (Etats-Unis, Union européenne, Royaume-Uni et Canada notamment) ont au cours des douze derniers mois pris des sanctions (gel des avoirs, interdiction de voyager) contre plusieurs colons qualifiés d'"extrémistes".

Il y a quelques jours, les Etats-Unis ont sanctionné pour la première fois une entreprise israélienne de BTP active dans la construction de colonies en Cisjordanie.

La détention administrative est une procédure héritée de l'arsenal juridique de la période du Mandat britannique sur la Palestine (1920-1948), avant la création d'Israël. Elle permet aux autorités de maintenir un suspect en détention sans avoir à l'inculper, pendant des périodes pouvant aller jusqu'à plusieurs mois, et pouvant être renouvelées pratiquement à l'infini.

Selon le Club des prisonniers palestiniens, ONG de défense des Palestiniens détenus par Israël, plus de 3.430 Palestiniens se trouvaient en détention administrative fin août. Par comparaison, seuls huit colons juifs sont détenus sous ce régime à ce jour, selon le quotidien israélien de gauche Haaretz vendredi.

L'annonce de la fin de la détention administrative pour les colons survient au lendemain de l'émission par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêts internationaux contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant recherchés par la justice internationale pour des "crimes de guerres" et "crimes contre l'humanité".

M. Netanyahu a rejeté catégoriquement la décision de la Cour comme une "faillite morale" et une mesure animée par "la haine antisémite à l'égard d'Israël".