PARIS: Les décisions gouvernementales, mises en application dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire décrété le 20 mars dernier – des villes confinées, des frontières maritimes et terrestres fermées et des vols suspendus – ont mis un point d’arrêt à l’économie marocaine. En effet, en quelques semaines, 132 000 entreprises ont dû interrompre leurs activités, et 950 000 salariés se sont retrouvés au chômage temporaire, voire définitif pour certains.
Les touristes marocains et étrangers ont déserté les 3 500 établissements touristiques recensés au Maroc, ce qui représente une perte colossale pour un secteur pilier de l’économie marocaine. En effet, ce dernier participe à la création des richesses à hauteur de près de 8% du PIB du pays, crée 500 000 emplois directs et contribue à hauteur de 15% de la population active si l’on prend en compte les emplois indirects. Selon le ministère de tutelle, durant les premiers mois, le secteur du tourisme a perdu 24 milliards de dirhams (1 dirham marocain = 0,092 euro) de recettes, et 50% des unités hôtelières étaient à l’arrêt total.
Professionnels nationaux et internationaux
Afin de permettre le repositionnement du marché marocain du tourisme à l’échelle nationale et internationale, l’Office national marocain du tourisme (ONMT) a réuni, dans le cadre de la seconde édition des Tourism Marketing Days (TMD), le 27 octobre dernier, les professionnels nationaux et internationaux du secteur afin d’élaborer des stratégies marketing et des opérations commerciales qui permettent de redynamiser les activités touristiques dans le pays.
Présidée par Adel el-Fakir, directeur général de l’ONMT, cette édition a réuni divers acteurs majeurs du secteur comme Hamid Bentahar, vice-président de la Confédération nationale du tourisme et président du Conseil régional du tourisme de Marrakech-Safi; Réda Akaaboune, PDG de Golden Palm Group; Abdelhamid Addou, PDG de la Royal Air Maroc; ainsi que les directeurs régionaux de l’ONMT.
Contexte difficile
À l’instar de tous les pays du monde, le secteur du tourisme marocain subit les conséquences de la pandémie de Covid-19. Dans ce contexte difficile, l’édition 2020 des TMD s’est déroulée en semi-présentiel. Les professionnels du secteur se sont penchés sur les pistes éventuelles de relance de la filière touristique, laquelle représente une des activités phares de l’économie marocaine.
«Cet événement nous permet de travailler ensemble sur les meilleures pratiques et stratégies afin d’outiller l’ensemble des opérateurs du secteur», déclare Adel El Fakir, directeur général de l’ONMT. «Chacun pourra, à son niveau, élaborer sa feuille de route d’un point de vue commercial et marketing pour préparer la reprise en toute connaissance de l’évolution de la demande au niveau des marchés émetteurs de touristes», précise-t-il.
État des lieux
Avant de proposer des pistes de relance adaptées au contexte particulier de pandémie mondiale, les professionnels du secteur se sont intéressés à l’analyse de l’activité touristique dans le pays, notamment celles qui concernent les répercussions de la restriction des déplacements et des voyages, ainsi que la fermeture des établissements hôteliers et des frontières. «Il faut agir avec le peu de possibilités qui nous sont offertes», insiste le directeur général de l’ONMT. «Il ne faut pas attendre de meilleures conditions. Il faut agir aujourd’hui, ensemble, pour reconquérir nos marchés. Le Maroc est un pays touristique et il le restera.»
Intervenue en duplex lors de cette rencontre, Nadia Fettah Alaoui, ministre du Tourisme, de l’Artisanat, du Transport aérien et de l’Économie sociale, tient à rassurer, en dépit du contexte sanitaire: «Depuis le début, nous avons travaillé à nous préparer à une relance post-crise qui nous permettra de réouvrir nos hôtels, nos villes. Mais, comme vous le savez, ce virus vit parmi nous», déclare la ministre de tutelle. «C’est pourquoi nous envisageons toujours la relance, parce que nous le pouvons, mais cela sera mis en œuvre dans un contexte sanitaire qui est spécifique», indique-t-elle.
Nadia Fettah Alaoui rappelle que «la priorité reste la gestion de la crise sanitaire à travers la mise en œuvre des protocoles sanitaires qui ont fait leurs preuves depuis des semaines et qui sont respectés par l’ensemble des acteurs du tourisme». Elle poursuit: «Nous recommandons vivement à l’ensemble des opérateurs de s’inscrire dans ce projet ambitieux, Welcome back Safely, ce nouveau label de standard international qu’il faudra appliquer dans la majorité des établissements hôteliers du Maroc».
Pistes de relance
La seconde partie des travaux des Tourisme Marketing Days a été dédiée à l’analyse des résultats de l’étude de l’ONMT, consacrée au marché mondial du tourisme et menée depuis le début de la crise sanitaire. L’objectif est de connaître les attentes et la perception des touristes en termes d’offres touristiques, de connexion avec les clients, de digitalisation des activités en matière d’information et d’achat ainsi que par l’analyse de la concurrence directe ou indirecte.
Selon Adel el-Fakir, cette analyse a permis de retenir des priorités d’actions majeures pour relancer l’activité touristique. Parmi ces dernières, l’amélioration des conditions d’accessibilité, la reprise du trafic aérien, le partenariat avec les opérateurs et le développement de la relation client.
«La relance du tourisme implique une reprise au minimum de 50% du trafic aérien et la levée des restrictions de déplacements inter-villes», souligne, de son côté, Hamid Bentahar, vice-président de la Confédération nationale du tourisme et président du Conseil régional du tourisme de Marrakech-Safi.
Priorités
Quelles sont les priorités pour optimiser le retour sur investissement dans la mise en œuvre des actions promotionnelles et des offres commerciales les plus adaptées au contexte? Telle était la thématique du troisième volet des échanges entre les acteurs du secteur lors de cet événement.
«Pour rassurer nos clients, nous avons opté pour la mise en place de How We Care, un protocole sanitaire de 300 mesures, mis en place par notre staff médical au niveau du siège de Palma de Majorque, et tout en respectant, bien évidemment, les exigences du gouvernement dès juillet dernier», explique, de son côté, Oum-Hani Saaf, directrice commerciale du groupe Iberostar à Agadir.
De son côté, Jaafar el-Mekkaoui, directeur général Paradis Plage Taghazout, souligne l’importance de connaître les atouts des villes et des régions du Maroc. «Car c’est en connaissant nos avantages et nos faiblesses que nous pourrons envisager une reprise plus importante», explique-t-il. «On ne peut vendre le pays comme étant une destination “palmier couscous”! Nous avons encore des niches très importantes à mettre en avant, comme le surf, le yoga, le bien-être, et un arrière-pays qui est extraordinaire. Nous pouvons offrir des expériences de voyages plus intéressantes pour les touristes étrangers qui reviendront pour découvrir un Maroc différent de ce qu’ils avaient connu», ajoute-t-il.
Lors de cette séance, des intervenants étrangers du secteur touristique comme TripAdvisor, Karavel-Fram, Voyage privé, NG Travel, eDreams, Trip.com Group ou encore GlobalData ont manifesté leurs attentes en matière d’offres et ont fait quelques recommandations afin de maintenir la destination Maroc dans leurs catalogues d’offres adaptées au contexte de pandémie mondiale.
«Seule la collaboration nous permettra d’aller plus loin. La crise que traverse le monde est sans précédent, et son impact sur notre industrie est fulgurant, avec beaucoup d’incertitudes. Mais en même temps, il y a des changements visibles, des opportunités à exploiter, et on doit se faire à la réalité du monde tel qu’il est aujourd’hui», indique pour sa part Hamid Bentahar, vice-président de la Confédération nationale du tourisme et président du Conseil régional du tourisme de Marrakech-Safi.