PARIS: Trois têtes d'affiche pour un parti en quête de sens: à moins de trois mois de l'élection du président des Républicains, Eric Ciotti, Bruno Retailleau et Aurélien Pradié rodent leurs arguments.
Présents aux journées parlementaires de LR jeudi et vendredi à Biarritz, ils participeront tous trois samedi à La Ciotat à la rentrée des Républicains des Bouches-du-Rhône, occasion de tester leurs discours devant les adhérents.
L'enjeu est rien de moins que remettre à flot un parti en chute depuis des années, et sonné par sa déroute (4,8%) à la présidentielle. "On est au bord du gouffre, je ne suis même pas sûr que ce soit sauvable", soupire un soutien de l'un des candidats.
Pour cela, Bruno Retailleau veut "créer un nouveau parti", Eric Ciotti promet "la rupture", et Aurélien Pradié plaide pour "tout changer: le nom, le siège, notre organisation..."
Contrairement à 2019, lors de l'élection de Christian Jacob, il y a cette fois un vrai suspense entre le député des Alpes maritimes Eric Ciotti et le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau. Numéro 3 de LR, Aurélien Pradié fait lui figure de challenger, tandis que le maire d'Orléans Serge Grouard espère avoir ses parrainages.
"Retailleau est le candidat des cadres, Ciotti celui des militants", entend-on régulièrement chez LR.
Patron de la puissante fédération des Alpes-maritimes, très apprécié dans le sud-est, Eric Ciotti s'était à la surprise générale hissé en finale de la primaire l'an dernier avec son message sécuritaire-identitaire. Il soutient le très populaire Laurent Wauquiez, qu'il souhaiterait voir désigner dès 2023 candidat à la présidentielle.
Mais côté cadres, beaucoup redoutent que son arrivée ne fasse fuir vers Horizons élus et électeurs refroidis par un positionnement parfois proche d'Eric Zemmour. "Si c'est Ciotti, ça pètera tout de suite" prédit un député.
Dans ce contexte Bruno Retailleau apparaît à beaucoup comme une alternative, malgré des positions conservatrices. Lui-même est issu du mouvement de Philippe de Villiers et a hérité du micro-parti de François Fillon, Force républicaine.
« Clivage »
"Il a prouvé au Sénat qu'il peut fédérer les sensibilités et mettre en sourdine ses convictions" ce qui lui donne "un atout majeur du point de vue de l'incarnation et du rassemblement", assure une élue.
Elle s'inquiète toutefois d'"un clivage Fillon/Sarkozy qui réapparaît".
Bruno Retailleau a déjà reçu le soutien de Gérard Larcher, François Fillon, François-Xavier Bellamy, et mercredi Julien Aubert, ex-député et patron du mouvement Oser la France (fort de 3.000 adhérents).
Eric Ciotti est lui soutenu par Frédéric Péchenard, Nadine Morano et le patron des jeunes LR Guilhem Carayon.
Quant à Aurélien Pradié, qui veut être la "surprise" de ce match, il peut compter sur la jeune garde, tels les députés Julien Dive et Pierre-Henri Dumont.
"Au nom du renouvellement il peut faire un score. Mais son problème est que beaucoup le voient sur une ligne de gauche", ajoute l'élue déjà citée.
Conscient de ses points faibles, chacun a commencé à élargir son discours: au régalien pour Aurélien Pradié, à l'économie pour Eric Ciotti...
Mais "dans la bataille pour la tête du parti, la seule chose qui compte c'est le nombre de cartes", assure un député, qui voit là un avantage à Eric Ciotti.
Dans un parti comptant quelque 58.000 adhérents, beaucoup d'incertitudes demeurent: Bruno Retailleau saura-t-il mobiliser les réseaux Fillon? Eric Ciotti fera-t-il revenir les LR partis vers Eric Zemmour? Comment se comportera l'électorat plus urbain d'Ile-de-France?
Le premier tour de l'élection est prévu le 3 décembre, avec un deuxième le 10 si besoin. "Trois mois c’est long, ça peut créer des clans, il faut que ce soit facteur de renouveau et pas de division", soupire un maire.
D'autant que cette campagne se déroulera en parallèle d'une session parlementaire où des textes clé comme l'assurance-chômage, voire une possible réforme des retraites, nécessiteront l'apport de LR.
"Tous les candidats vont devoir se radicaliser. On risque de se retrouver dans une situation de blocage institutionnel qui nous sera préjudiciable", soupire un député.