JERUSALEM: Israël a modifié et repoussé l'entrée en vigueur de nouvelles règles d'entrée en Cisjordanie occupée destinées aux étrangers, qui avaient suscité des critiques de Washington, Bruxelles et d'organisations de défense des droits humains qui les considèrent comme intrusives.
Pour Israël, cette nouvelle procédure devrait faciliter le processus d'obtention de visa, tandis que l'Autorité palestinienne l'a qualifiée lundi de "raciste".
Quelles sont les règles qu'Israël veut mettre en place?
Publiée une première fois en février, la nouvelle procédure d'entrée en Cisjordanie --territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël-- vise les étrangers souhaitant y résider, travailler, faire du bénévolat ou étudier.
Le règlement, qui devait entrer en vigueur lundi avant d'être repoussé au 20 octobre, imposait aux étrangers de réclamer un visa 45 jours avant l'arrivée, d'emprunter uniquement le point de passage entre la Jordanie et la Cisjordanie et non plus l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, de spécifier s'ils ont de la famille de premier degré en Cisjordanie et d'indiquer s'ils sont propriétaires de terres ou s'ils doivent en hériter.
La nouvelle procédure de 97 pages demandait dans certains cas de déposer une caution pouvant s'élever à 70.000 shekels (20.000 euros) et obligeait, entre deux visas, à une pause de plusieurs mois en dehors du territoire, notamment pour les conjoints étrangers de Palestiniens.
Elle imposait aussi aux étrangers de formaliser, auprès des autorités israéliennes, une relation amoureuse avec un Palestinien en Cisjordanie dans un délai de 30 jours et imposait des quotas sur les professeurs d'universités (150 par an) et les étudiants étrangers (100) se rendant dans des universités palestiniennes.
Quelles règles ont été modifiées et où en sont les procédures judiciaires?
Le Cogat, organe du ministère israélien de la Défense supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens, a publié dimanche un texte révisé et annoncé que les nouvelles mesures, présentées comme devant faciliter le processus de délivrance de visas, prendront effet le 20 octobre, pour deux ans.
Dans le texte révisé, l'obligation de formaliser sous 30 jours une relation amoureuse a été retirée, tout comme les quotas sur les professeurs et les étudiants étrangers dans les universités.
La période obligatoire de plusieurs mois hors de Cisjordanie entre deux visas a également été supprimée pour les conjoints étrangers de Palestiniens. La mention de la propriété de terrains ou d'héritage n'apparaît plus dans la demande de visa.
La mise en oeuvre de la procédure avait été reportée à deux reprises car contestée devant la Cour suprême israélienne par 19 plaignants, dont l'organisation israélienne des droits humains Hamoked. Celle-ci a annoncé son intention de saisir une nouvelle fois la justice, jugeant les nouvelles mesures toujours discriminatoires.
Quelles réactions à cette procédure controversée?
Le Premier ministre palestinien Mohammed Shtayyeh a qualifié lundi ces règles de "racistes", visant les étrangers d'origine palestinienne et "ceux qui sont solidaires de la Palestine".
"Le problème principal demeure: si un conjoint est étranger, Israël va empêcher des milliers de familles d'être réunies pour des raisons politiques et démographiques flagrantes", a déploré Jessica Montell, directrice de Hamoked, affirmant que la procédure "violait les obligations légales internationales d'Israël".
Selon elle, le but de la procédure est "à la fois de contrôler et d'isoler la population palestinienne".
Quelque 2,9 millions de Palestiniens résident aujourd'hui en Cisjordanie, où vivent aussi 475.000 Israéliens, dans des colonies jugées illégales par le droit international.
L'ambassadeur des Etats-Unis en Israël, Tom Nides, a affirmé qu'il continuerait à "s'engager fermement" contre les nouvelles règles. "Je continue d'être préoccupé par ces procédures", a- t-il tweeté dimanche, appelant le gouvernement israélien à "faire les ajustements nécessaires".
En juillet, la Commissaire européenne à l'Education, Mariya Gabriel, avait dénoncé les restrictions israéliennes comme étant contraires aux objectifs du programme d'échanges Eramus+.
"Alors qu'Israël bénéficie grandement d'Erasmus+, la Commission considère qu'il devrait faciliter et non entraver l'accès d'étudiants à des universités palestiniennes", avait-elle remarqué.
"Les 'règles du Cogat' sont faites non seulement pour contrôler et restreindre les échanges universitaires et la vie culturelle, mais elles sont aussi une forme intrusive de planification démographique", a dénoncé Hanane Achraoui, une ancienne ténor de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP).