ALGER: Les Algériens ont voté au compte-gouttes dimanche, disant s'être prononcés pour un "changement" et une "nouvelle Algérie" lors d'un référendum sur une révision de la Constitution, tandis que les partisans d'un boycott ont décrié une opération de vote viciée.
Au centre de vote Pasteur, au coeur d'Alger, rares sont les électeurs à avoir glissé leur bulletin dans l'urne pendant la matinée. Protocole sanitaire oblige, ils se présentent le visage camouflé par leur masque.
A l'entrée, un agent électoral prend leur température et les invite à se désinfecter les mains avant de procéder au vote, pour ou contre l'"Algérie nouvelle" promise par le président Abdelmadjid Tebboune, promoteur de cette réforme constitutionnelle.
"J'ai voté "oui" car je suis pour le changement", explique à l'AFP Abdennour Gueniche, un commerçant de 34 ans.
"Je suis optimiste pour l'avenir. Dans ses discours, le président Tebboune promet d'accorder une place importante aux jeunes", avance-t-il.
Dans la capitale algérienne, le dispositif sécuritaire a été renforcé pour empêcher toute tentative de rassemblement en ce jour d'élection et de commémoration du 66e anniversaire du début de la Guerre d'indépendance contre la puissance coloniale française (1954-1962).
Des véhicules de la police anti-émeute ont été déployés, notamment autour de la Grande Poste, lieu emblématique des rassemblements du "Hirak", le mouvement de protestation populaire inédit né en février 2019.
"J'ai voté +oui+ pour que mon pays ne s'effondre pas !", lance, ému, Djilali Bouazza, un retraité de 78 ans.
Mais vers 10H00 (09H00 GMT), sur 249 inscrits dans l'un des 17 bureaux de vote du centre Pasteur, seuls six électeurs avaient voté. "A Alger, les habitants votent en général à partir de la mi-journée", précise à l'AFP le président du bureau, Rachid Drasni.
Mahrez Lamari, ancien responsable d'une organisation panafricaine, a aussi opté pour le "oui".
"Aujourd'hui j'ai voté pour +l'Algérie nouvelle+, pour que les pratiques anciennes soient révolues à jamais et pour que la paix, la concorde, la stabilité, l'union et la solidarité reviennent au pays", dit-il.
Participation
A Birkhadem, dans la banlieue sud d'Alger, Ahmed Mohand a choisi de ne pas aller voter.
"Je ne vote plus depuis que (Abdelaziz) Bouteflika s'est accaparé le pouvoir. Depuis, toutes les élections sont truquées", affirme l'octogénaire.
L'ex-président déchu a été forcé par la rue à démissionner en avril 2019 après vingt ans à la tête du pays.
"Il y a trop de divisions autour de ce projet", estime M. Mohand.
Les opposants à la révision constitutionnelle -- partis politiques ou coalitions citoyennes -- n'ont pas pu tenir de meetings durant la campagne électorale.
Les partisans du "Hirak" ont appelé à boycotter le scrutin alors que les islamistes ont appelé à voter "non".
Si à Alger, les opérations de vote se sont déroulées dans le calme, sinon dans l'indifférence de large pans de la population, certaines régions ont manifesté plus vigoureusement leur opposition au référendum en poussant les autorités à fermer les bureaux de vote.
Dans les wilayas (préfectures) de Bejaïa et Tizi Ouzou, en Kabylie, presque tous les bureaux ont fermé leurs portes à la suite de divers incidents -- urnes et bulletins détruits -- et marches de protestation, selon les médias locaux.
"Voter le 1er novembre, c'est trahir la mémoire des martyrs", affichait une banderole déployée par des jeunes à Béjaïa.
L'élection présidentielle du 12 décembre 2019 avait été marquée par une abstention record de plus de 60%.
Un an après, le taux de participation est à nouveau le véritable enjeu du scrutin, et selon les chiffres de participation disponibles en début d'après-midi (13,03 % à 14 heures locales), il s'annonce d'ores et déjà très faible.
Les 61.000 bureaux de vote doivent fermer à 19H00 (18H00 GMT).