BEYROUTH: Trente et un détenus se sont évadés dimanche d'une prison de Beyrouth. Le lendemain, quatre d’entre eux ont été arrêtés par l'unité d'enquête des Forces de sécurité intérieure (FSI).
«Les recherches se poursuivent pour arrêter les autres détenus qui se sont évadés de la prison de Beyrouth», a signalé la direction générale des FSI.
Certains détenus sont libanais et d'autres étrangers. On compte notamment des Syriens et des Palestiniens, a-t-elle ajouté.
Une source au sein des services de sécurité a confié à Arab News que les détenus «ont scié à l'aide d'une vis les barreaux d'une fenêtre de la cellule qui donne sur la rue».
La prison est située sous un pont qui se trouve à proximité du palais de justice de Beyrouth. Si, aujourd'hui, la prison dépend de l'autorité pénitentiaire du Liban, elle était autrefois tenue par la sûreté générale.
Le 21 novembre 2021, une prison de Baabda a été le théâtre d'une vaste évasion organisée; cinq détenus qui essayaient de s'évader ont trouvé la mort dans un accident de voiture; d'autres ont été arrêtés.
Au Liban, les prisons connaissent fréquemment des émeutes durant lesquelles les prisonniers revendiquent de meilleures conditions de vie.
Le député Michel Moussa, qui dirige la commission parlementaire des droits de l’homme, a posé la question suivante: «Comment trente et un détenus ont-ils pu s'échapper d'un établissement qui devrait être hautement surveillé et sécurisé?»
Dans un entretien accordé à Arab News, il a affirmé: «Cette question reste sans réponse pour le moment, car les enquêtes se poursuivent.»
Le député a ajouté: «Nous avons déjà appelé à fermer la prison d'Adlieh, construite il y a quelques années. Nous sommes convaincus qu'elle ne remplit pas les critères de base à tous les niveaux. On nous a promis à maintes reprises de la supprimer sans donner suite à cette promesse.»
«Une chose est sûre: la prison ne respecte aucun critère relatif aux droits de l'homme.»
«Il semblerait que les services de sécurité s'en servent à nouveau pour incarcérer les détenus du palais de justice de Beyrouth en raison du nombre trop important de prisonniers.»
M. Moussa a souligné que l'évasion survenue dimanche dernier attestait de la gravité des problèmes économiques, sécuritaires et judiciaires dont souffre le Liban.
Pour résoudre la difficulté que pose le nombre de plus en plus important de personnes incarcérées sans être jugées, le député a appelé à supprimer cette pratique. Il a insisté sur la nécessité de réactiver les tribunaux, étant donné que la situation que connaît actuellement le Liban ne saurait tolérer de délai.
Plus de 80% des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté en raison de la crise économique profonde qui frappe le pays. Cette dernière, dans la mesure où les salaires ont perdu de leur valeur, conduit un grand nombre de soldats et de membres des forces de sécurité à fuir le service ou à démissionner pour trouver un autre emploi ou pour émigrer.
Les hauts responsables de l'armée et de la sécurité acceptent dorénavant que de nombreux soldats et officiers de sécurité exercent un second emploi.
Le chef de la division des relations publiques au sein des Forces de sécurité intérieure, le colonel Joseph Moussallem, a assuré à Arab News que les circonstances économiques des policiers «n’affectaient pas la qualité de leur travail».
Selon lui, le fait que les arrestations soient en hausse montre que la criminalité reste bien contrôlée au Liban. Il a cependant admis que la réforme des prisons s’enlisait.
Selon les données des FSI, de nombreux prisonniers possèdent un passé criminel chargé et ont purgé des peines de prison à plusieurs reprises.
Les FSI estiment que la surpopulation des prisons pose problème en dépit des «efforts que nous consentons pour réaliser des réformes» et du «soutien des organisations civiles».
Selon le colonel Moussallem, les délits les plus répandus dans le pays concernent les vols de biens publics et privés.
En effet, la communauté de Hermel (Bekaa) a manifesté dimanche dernier devant un magasin pour protester contre un vol à main armée et une fusillade qui se sont produits dans la ville.
Les résidents ont bloqué une route. Ils brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire: «Renforcez la sécurité. Ne protégez pas les coupables. Poursuivez-les, traduisez-les en justice et qu'ils reçoivent la sanction qu'ils méritent.»
Cheikh Ali Taha, le mufti de Hermel, s'est exprimé en ces termes: «La région fait face à un phénomène inquiétant.»
Il a exhorté les responsables à agir de toute urgence et à combattre la criminalité. Dans le cas contraire, les citoyens seront contraints de se défendre eux-mêmes.
Dans le nord du Liban, plus précisément dans la région de Koura, l'association des oléiculteurs a pour sa part dénoncé «le vol des cultures saisonnières dans la région».
«Un groupe de voleurs professionnels s'empare chaque matin de nos récoltes qui ne sont pas encore mûres et vole des tonneaux de fer, des fils électriques, des clôtures de fer ainsi que des ruches. La situation est intenable», a expliqué l'association dans un communiqué.
Selon le colonel Moussallem, le nombre total de prisonniers et de détenus dans le pays s'élève à quelque «9 000 individus». Il a noté que les prisons libanaises étaient conçues pour accueillir près de 3 000 personnes à pleine capacité.
Il a ajouté que les vols et autres délits avaient baissé cette année de 6,5% par rapport à l'année dernière.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com