Covid-19: au nom de l'urgence sanitaire, un recul des libertés à réinterroger

"En Europe occidentale, la France a été le pays qui a pris les mesures les plus dures". (Photo, AFP)
"En Europe occidentale, la France a été le pays qui a pris les mesures les plus dures". (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 30 juillet 2022

Covid-19: au nom de l'urgence sanitaire, un recul des libertés à réinterroger

  • A la suite du vote du Parlement, le 1er août prendront officiellement fin les cadres juridiques d'exception qui avaient été décidés face à la catastrophe sanitaire.
  • La covid-19 a été un « stress test» pour l’Etat de droit partout dans l’UE, analysait un rapport de l'Assemblée nationale en octobre 2021

PARIS : Au nom de l'impératif sanitaire, les Français ont accepté pendant deux ans et demi de pandémie un recul de leurs libertés, exagéré pour certains qui veulent pouvoir désormais mieux débattre du sujet.

A la suite du vote du Parlement, le 1er août prendront officiellement fin les cadres juridiques d'exception - état d'urgence, gestion de la crise sanitaire - qui avaient été décidés face à la catastrophe sanitaire.

Après un dernier feu vert donné samedi par le Conseil constitutionnel, le gouvernement ne pourra plus imposer qu'un test négatif de dépistage à la Covid à l'embarquement en direction du territoire français et pour les voyages outre-mer, dans des cas bien précis.

Depuis mars 2020, 13 lois ont été votées par le Parlement, donnant au Premier ministre des pouvoirs qui se sont traduits par des confinements, couvre-feu, pass sanitaires et vaccinaux, etc.

"On s'était progressivement habitué à être une société d'individus libres, nous sommes une nation de citoyens solidaires", lançait fin 2020 le chef de l'Etat Emmanuel Macron pour justifier ces restrictions.

La covid-19 a été un "stress test" pour l’Etat de droit partout dans l’UE, analysait un rapport de l'Assemblée nationale en octobre 2021.

"En Europe occidentale, la France a été le pays qui a pris les mesures les plus dures", analyse aujourd'hui Raul Magni-Berton, politologue à Sciences-Po Grenoble.

En disposant d'une large majorité, le gouvernement a pu facilement imposer des décisions de façon unilatérale et "il n'est pas étonnant qu'on abandonne l'état d'urgence au moment où (il) ne jouit plus que d'une majorité relative", estime-t-il.

Même s'il entérinait déjà la disparition du cadre permettant la mise en oeuvre de mesures d'exception, le texte finalement voté par le Parlement est bien différent de ce qu'avait prévu le gouvernement initialement.

Les oppositions de droite et de gauche ont rejeté un possible pass sanitaire aux frontières, de ou vers l'étranger, mais aussi entre l'Hexagone, la Corse et les outre-mer avant qu'un compromis entre députés, sénateurs et gouvernement ne soit finalement trouvé.

Selon Pacôme Rupin, ex-député LREM qui s'était opposé au pass vaccinal, les libertés ont été rognées trop longtemps: "au début de la crise sanitaire, il était normal de prendre des dispositions très fortes mais, à partir du moment où on connaissait mieux le virus, il fallait lever un certain nombre de contraintes".

 

Loi sanitaire face au Covid: le Conseil constitutionnel donne son aval

Le Conseil constitutionnel a donné son feu vert samedi aux dispositions concernant les outre-mer dans la nouvelle loi sanitaire face à la Covid, après une saisine des députés LFI.

Définitivement adopté par le Parlement mardi, ce nouveau texte de loi permet un possible contrôle sanitaire aux frontières - un test de dépistage à la Covid négatif -  en cas d'apparition d'un nouveau variant particulièrement dangereux.

Un dispositif identique pourra s'appliquer pour les voyages de l'hexagone à destination des collectivités ultramarines, par exemple, "en cas de risque de saturation" de leur système de santé.

Les députés LFI avaient annoncé un recours au sujet des territoires ultramarins en estimant qu'ils faisaient l'objet d'une différence de traitement "injustifiée".

Le Conseil constitutionnel a toutefois jugé conformes à la Constitution les dispositions incriminées.

"Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit", souligne-t-il.

Cette loi met par ailleurs explicitement fin le 1er août au pass sanitaire et autres mesures d'exception contre la Covid-19.

«Clauses de revoyure»

"On a eu très peu de débats sur la question des libertés individuelles, clairement on a fait passer la santé avant tout", observe-t-il.

D'autres députés sont plus nuancés: "On a toujours essayé de corriger les mesures en fonction de l'évolution de la situation sanitaire", lance Sacha Houlié, président Renaissance (ex-LREM) de la commission des Lois, rappelant qu'un certain nombre d'amendements ont été déposés pour rouvrir les jauges ou revoir la durée de fermeture de certains lieux.

Mais que se passera-t-il à l'avenir? Avec le député LR Philippe Gosselin, il a rendu en décembre 2020 un rapport proposant des "contre-pouvoirs" renforcés en cas de crise majeure.

"La tentation pourrait être de vouloir mettre tout le monde sous cloche, c'est un risque sérieux dont il faut se prémunir", estime Philippe Gosselin.

La pression étant désormais "retombée", il souhaiterait le lancement d'une discussion collective sur "ce qui pourrait servir de cadre à un futur état d'urgence sanitaire ou énergétique".

"Décidons-en maintenant", en prévoyant par exemple des clauses de revoyure, plaide-t-il.

Si "l’état d’urgence est utile et efficace pour faire face à un désordre momentané", "sur le long terme, son usage est délétère", jugeait en septembre 2021 le Conseil d'Etat qui suggère une saisine automatique du Conseil constitutionnel sur ces lois.

Du côté des scientifiques, qui ont contribué à guider les décisions du gouvernement, l'heure est aussi aux préconisations.

Pour le Conseil scientifique, qui va être remplacé par une nouvelle structure, la décision du niveau de circulation du virus nécessitant un retour de mesures de contrôle "doit faire l’objet d'une concertation dans la société".

"Nous pensons que ces mesures sont nécessaires dans certains cas mais nous disons aussi qu'il est essentiel de connaître l'opinion des Français sur le sujet", a récemment déclaré l'un de ses membres, le Pr Arnaud Fontanet. "On ne s'en sortira pas sans un débat démocratique".

C'est l'un des regrets du Pr Jean-François Delfraissy, son président, au moment de tirer dans Le Parisien un bilan de ces longs mois de crise: "on aurait pu prendre des décisions avec les citoyens".


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.