L'Arabie saoudite, un modèle à suivre contre le tabagisme dans le monde arabe

Les jeunes du monde arabe fument divers produits du tabac, dont la chicha (Photo, AFP).
Les jeunes du monde arabe fument divers produits du tabac, dont la chicha (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 24 juillet 2022

L'Arabie saoudite, un modèle à suivre contre le tabagisme dans le monde arabe

  • Les responsables de la santé affirment que le Royaume a connu une baisse du tabagisme en grande partie due à la hausse des taxes sur les cigarettes
  • Le Comité saoudien de lutte contre le tabagisme souhaite réduire le pourcentage de fumeurs quotidiens à 5 % d'ici 2030

DUBAÏ: Le tabagisme reste un grave problème de santé dans les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, qui comptent certaines des proportions de fumeurs les plus élevées au monde.

Malgré cette forte prévalence du tabagisme dans la région, les politiques mises en place par les autorités saoudiennes semblent avoir entraîné une réduction significative du nombre de fumeurs dans le pays, ainsi qu'une augmentation du nombre de personnes cherchant de l'aide pour arrêter de fumer.

Les conséquences pour la santé publique de ce que l'Organisation mondiale de la santé appelle une «épidémie de tabagisme» sont graves. La fumée du tabac contient plus de 2 500 substances chimiques cancérigènes et, selon les données de l'OMS, le tabagisme finit par tuer jusqu'à 50 % des personnes qui s'adonnent à cette habitude.

Tobacco Atlas, un projet qui recueille des données sur les problèmes découlant de cette épidémie mondiale et sur les moyens de les combattre, estime que plus de 8,67 millions de personnes sont décédées de maladies liées au tabagisme en 2019 seulement, dont 1,3 million qui ont été exposées au tabagisme passif.

Rien qu'en Arabie saoudite, on estime que le tabagisme tue 70 000 personnes chaque année.

Le tabagisme est responsable de 80 à 90 % des décès causés par le cancer du poumon et augmente considérablement le risque d'autres cancers, ainsi que de maladies cardiovasculaires, pulmonaires, neurologiques, oculaires, digestives et infectieuses.

Les répercussions économiques souvent cachées du tabagisme, qui comprennent la facture des soins médicaux des fumeurs et des personnes exposées au tabagisme passif, coûtent chaque année des milliards de dollars à de nombreux pays.

Selon le Tobacco Atlas, les dommages économiques mondiaux causés par le tabagisme en 2019 se sont élevés à environ 2 000 milliards de dollars américains (1 dollar américain = 0,98 euro), ce qui équivaut à environ 1,8 % du produit intérieur brut mondial.

Une étude publiée dans la revue universitaire Tobacco Control en 2021 estime que le coût total du tabagisme pour les six pays du Conseil de coopération du Golfe — Bahreïn, Koweït, Oman, Qatar, Arabie saoudite et EAU — s'est élevé à plus de 14,3 milliards de dollars américains rien qu’en 2016. Les dépenses de santé publiques représentaient près de 75 % de ce coût.

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La région de la Méditerranée orientale a connu une baisse de 15 % de la proportion de la population de plus de 15 ans qui fume quotidiennement depuis 1990. Toutefois, le nombre de fumeurs dans la région a doublé depuis 2007 en raison de la croissance démographique rapide du Moyen-Orient (Photo, AFP).

La région de la Méditerranée orientale a connu une baisse de 15 % de la proportion de la population de plus de 15 ans qui fume quotidiennement depuis 1990. Toutefois, le nombre de fumeurs dans la région a doublé depuis 2007 en raison de la croissance démographique rapide du Moyen-Orient. (Photo, AFP/Archives)

Parmi ces six pays, le coût économique du tabagisme était le plus élevé en Arabie saoudite, le pays le plus peuplé du CCG, s’élevant à plus de 6,3 milliards de dollars américains. 

La prévalence mondiale du tabagisme est passée de 22,7 % en 2007 à 19,6 % en 2019, l'année la plus récente pour laquelle les données de l'OMS sont disponibles, selon le Tobacco Atlas.

La région de la Méditerranée orientale a connu une baisse de 15 % de la proportion de la population de plus de 15 ans qui fume quotidiennement depuis 1990. Toutefois, le nombre de fumeurs dans la région a doublé depuis 2007 en raison de la croissance démographique rapide du Moyen-Orient.

Le nombre croissant de jeunes fumeurs crée de nouveaux défis. Bien que l'utilisation de cigarettes électroniques et de produits du tabac chauffés — connus sous le nom de «vapotage» — soit souvent présentée aux fumeurs et aux non-fumeurs comme une alternative moins nocive que la cigarette, elle comporte ses propres risques, en particulier pour les adolescents et les jeunes adultes. 

Le Dr Cheikh Abdellah, spécialiste de la pédiatrie et de l'adolescence à la Cité médicale roi Abdelaziz à Riyad, avait déjà déclaré à Arab News en septembre 2019 qu'«on pourrait être tenté de se tourner vers les cigarettes électroniques afin de faciliter la transition entre les cigarettes traditionnelles et le fait de ne plus fumer du tout. Mais fumer des cigarettes électroniques n'est pas non plus conseillé».

Il a averti que les jeunes qui fument la cigarette électronique risquent d'avoir un retard dans le développement de leur cerveau. Ils risquent aussi de développer des problèmes de mémoire.

Quelques chiffres

* 2,500 substances chimiques cancérigènes dans la fumée du tabac.

 

* 8,67 millions de décès causés par des maladies liées au tabagisme (2019).

 

* 6,3 milliards de dollars = Coût économique du tabagisme en Arabie saoudite (2016).

 

* 14,3 milliards de dollars = Coût économique du tabagisme pour l’ensemble des pays du CCG (2016).

Le ministère saoudien de la santé s'efforce de relever les défis créés par la montée en popularité du vapotage. Il a publié des messages et des images sur Twitter et d'autres plateformes de médias sociaux mettant en garde contre les dangers des cigarettes électroniques, avec des slogans tels que: «Saveur à l'intérieur, couleur à l'extérieur, mais sa réalité est une crise cardiaque électronique.»

Depuis le début des années 2000, les autorités saoudiennes ont adopté une série de politiques visant à lutter contre le tabagisme. En 2003, elles ont lancé la première campagne publique antitabac du pays.

En 2015, elles ont interdit de fumer dans de nombreux lieux publics, notamment les institutions éducatives et culturelles et presque tous les lieux de travail. L'objectif actuel est de réduire la proportion de la population qui fume quotidiennement de 11 % à 5 % d'ici 2030.

Les autorités de Riyad ne se reposent toutefois pas sur leurs lauriers et prévoient de mettre en œuvre des initiatives supplémentaires afin de réduire davantage les dommages causés par le tabagisme.

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Les fumeurs saoudiens (ci-dessus) ont été avertis que leur habitude est dangereuse. Chaque année, environ 70 000 personnes meurent des effets du tabac au Royaume (Photo, AFP).

Dans une interview accordée en juin à la chaîne de télévision saoudienne Al-Ekhbariya, le Dr Mansour al-Qahtani, secrétaire général du Comité antitabac saoudien, a déclaré que le gouvernement avait l'intention d'interdire la vente de produits du tabac dans les supermarchés, après avoir précédemment interdit leur vente dans les kiosques en 2016.

Par la suite, les cigarettes ne pourront être achetées que dans les magasins spécialisés dans la vente de produits du tabac tels que la chicha et le tabac à mâcher.

La forte taxation des produits du tabac s'est avérée être un outil particulièrement efficace pour lutter contre le tabagisme, sur lequel le Royaume s'est largement appuyé. Alors que le Moyen-Orient dans son ensemble est à la traîne des autres régions pour ce qui est de l'imposition de lourdes taxes sur le tabac comme moyen de dissuasion, un certain nombre de pays du CCG se sont écartés de cette tendance.

Une étude de l'OMS de 2021 comparant les politiques antitabac dans le monde a révélé qu'en juin 2017, l'Arabie saoudite a introduit le droit de douane le plus élevé sur les cigarettes dans la région du CCG: une taxe d'accise de 100 %.

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Les conséquences sur la santé publique de ce que l'Organisation mondiale de la santé appelle une «épidémie de tabagisme» sont graves, surtout pour les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord (Photo, AFP).

Des recherches ont montré que les politiques saoudiennes ont permis de réduire le tabagisme. Une étude publiée dans l'Eastern Mediterranean Health Journal a révélé que l'augmentation des taxes de 2017 a été suivie d'une réduction notable de la population de fumeurs du Royaume et du nombre de cigarettes fumées.

Une analyse de 2022 publiée par les Annals of Saudi Medicine a également révélé que l'importation annuelle de cigarettes a chuté de plus de 27 % entre 2013 et 2019 après la mise en œuvre de cette taxe.

Selon l'OMS, l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont également imposé des restrictions en matière de publicité ainsi que des interdictions de fumer en public. Ces deux pays ont aussi mis en place de vastes programmes d'aide et de soutien aux fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer.

Le Royaume n'est que le deuxième pays du monde arabe à avoir mis en place des programmes et des cliniques d'arrêt du tabac au niveau national, en 2011, après Bahreïn, qui les a introduits en 2004.

En 2019, on comptait 542 cliniques de ce type en fonction dans toute l'Arabie saoudite. Selon les statistiques officielles, près de 27 % des personnes du Royaume qui ont participé à des programmes destinés à les aider à arrêter de fumer ont réussi à le faire, d’après une étude de 2020 publiée dans le Journal of Health Informatics in Developing Countries.

L'Arabie saoudite est également à la pointe du monde arabe en ce qui concerne l'utilisation des médias pour sensibiliser les gens aux méfaits du tabac et aux avertissements imprimés sur les paquets de cigarettes.

Selon une étude publiée en 2022 dans la revue Tobacco Control, l'Arabie saoudite a été le premier pays de la région de la Méditerranée orientale à rendre obligatoire l'utilisation d'emballages neutres et non visuellement attrayants pour les produits du tabac.

La réduction significative du tabagisme en Arabie saoudite, suite aux mesures strictes introduites pour augmenter le coût de la consommation et diminuer la demande, n'est pas surprenante et suit les recommandations politiques fondées sur des données.

Une étude de 2018 sur les politiques de santé publique visant à réduire le tabagisme, publiée par le Journal of Public Health Management and Practice, a révélé qu'un taux de taxation d'au moins 50 % est l'outil le plus efficace à long terme.

Cependant, le gouvernement saoudien ne se contente pas des résultats de ses politiques actuelles. Dans une interview accordée cette année au programme Yahla, Al-Qahtani a souligné: «Selon les études, la méthode la plus efficace pour lutter contre le tabagisme n'est pas le fait d’avoir la volonté ou de suivre le traitement (pour ceux qui cherchent à arrêter de fumer) mais les lois et les politiques (gouvernementales), et la plus importante d'entre elles est l'augmentation du prix. Nous nous efforçons toujours d'augmenter le prix des produits de tabac.»

Selon les dernières études internationales, a-t-il ajouté, une taxe de 150 % serait plus efficace. Si elle était introduite, cette politique aurait pour conséquence de faire passer le prix d'un paquet de cigarettes à environ 10,50 dollars américains en Arabie saoudite, soit le prix moyen le plus élevé pour un paquet dans le monde arabe.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban : le Hezbollah accuse Israël de « centaines de violations » de la trêve

Le chef adjoint du Hezbollah libanais, Cheikh Naim Qassem, prend la parole lors d'un rassemblement de soutien aux Palestiniens de Gaza, dans le cadre du conflit entre Israël et le groupe islamiste palestinien Hamas, à Beyrouth, au Liban. (File/Reuters)
Le chef adjoint du Hezbollah libanais, Cheikh Naim Qassem, prend la parole lors d'un rassemblement de soutien aux Palestiniens de Gaza, dans le cadre du conflit entre Israël et le groupe islamiste palestinien Hamas, à Beyrouth, au Liban. (File/Reuters)
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  • Son discours est intervenu alors que le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, se trouve au Liban, à l'approche de la date butoir du 26 janvier pour l'application complète de l'accord de cessez-le-feu.
  • « J'appelle l'État libanais à faire preuve de fermeté face à ces violations qui ont dépassé les centaines, cela ne peut pas continuer », a-t-il dit dans un discours diffusé par la télévision du Hezbollah, al-Manar.

BEYROUTH : Le chef du Hezbollah libanais, Naïm Qassem, a accusé  samedi Israël de « centaines de violations » de l'accord de cessez-le-feu entré en vigueur fin novembre et averti de nouveau que sa formation pourrait « perdre patience ».

Son discours est intervenu alors que le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, se trouve au Liban, à l'approche de la date butoir du 26 janvier pour l'application complète de l'accord de cessez-le-feu.

« J'appelle l'État libanais à faire preuve de fermeté face à ces violations qui ont dépassé les centaines, cela ne peut pas continuer », a-t-il dit dans un discours diffusé par la télévision du Hezbollah, al-Manar.

« Nous avons fait preuve de patience à l'égard de ces violations pour donner une chance à l'État libanais, qui est responsable de cet accord, ainsi qu'aux parrains internationaux, mais il ne faut pas tester notre patience », a-t-il ajouté.

L'accord de cessez-le-feu stipule que l'armée libanaise doit se déployer aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays, d'où l'armée israélienne doit se retirer dans un délai de 60 jours, soit jusqu'au 26 janvier.

Sorti affaibli de la guerre, le Hezbollah doit, lui, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne.

Vendredi, M. Guterres, qui s'est rendu auprès des Casques bleus dans le sud, a affirmé que l'« occupation » de cette région par Israël et ses opérations militaires devaient « cesser ».

Il a révélé que les soldats de maintien de la paix avaient découvert « plus de 100 caches d'armes appartenant au Hezbollah ou à d'autres groupes armés depuis le 27 novembre », jour de l'entrée en vigueur de la trêve.

Le chef du Hezbollah, qui avait des réserves sur la nomination de M. Salam, un juriste international respecté, a averti que « personne ne peut nous exclure de la participation politique effective dans le pays ».


Gaza : le cessez-le-feu est prévu pour entrer en vigueur dimanche à 06 h 30 GMT

Un garçon court avec un drapeau palestinien sur un monticule de décombres dans un camp pour personnes déplacées par le conflit à Bureij, dans le centre de la bande de Gaza, le 17 janvier 2025, suite à l'annonce d'une trêve dans le cadre de la guerre entre Israël et le Hamas. (Photo Eyad BABA / AFP)
Un garçon court avec un drapeau palestinien sur un monticule de décombres dans un camp pour personnes déplacées par le conflit à Bureij, dans le centre de la bande de Gaza, le 17 janvier 2025, suite à l'annonce d'une trêve dans le cadre de la guerre entre Israël et le Hamas. (Photo Eyad BABA / AFP)
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  • « Conformément à l'accord conclu entre les parties concernées et les médiateurs, le cessez-le-feu dans la bande de Gaza commencera à 8 h 30, dimanche 19 janvier, heure locale à Gaza », a écrit sur X Majed al-Ansari, le porte-parole qatari .
  • « Nous conseillons aux habitants de faire preuve de la plus grande prudence et de respecter les instructions des sources officielles », a-t-il ajouté.

DOHA : Le cessez-le-feu entre le mouvement islamiste palestinien Hamas et Israël dans la bande de Gaza entrera en vigueur dimanche à 04 h 30 GMT, a indiqué samedi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Qatar, pays médiateur.

« Conformément à l'accord conclu entre les parties concernées et les médiateurs, le cessez-le-feu dans la bande de Gaza commencera à 8 h 30, dimanche 19 janvier, heure locale à Gaza », a écrit sur X Majed al-Ansari, porte-parole du ministère qatari des Affaires étrangères.

« Nous conseillons aux habitants de faire preuve de la plus grande prudence et de respecter les instructions des sources officielles », a-t-il ajouté.

L'accord de cessez-le-feu, annoncé mercredi par le Qatar et les États-Unis, autre pays médiateur, prévoit dans une première phase de six semaines la libération de 33 otages retenus dans la bande de Gaza depuis l'attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.

En échange, Israël va relâcher 737 prisonniers palestiniens, selon le ministère israélien de la Justice, qui a précisé que leur libération n'interviendrait pas avant 16 heures dimanche (14 heures GMT).


Macron à Beyrouth: soutien ferme aux Libanais et leurs nouveaux dirigeants, pour une ère nouvelle

Le président français Emmanuel Macron serre la main de son homologue libanais Joseph Aoun au palais présidentiel de Baabda le 17 janvier 2025. Le 17 janvier, M. Macron a annoncé que Paris accueillerait dans les prochaines semaines une conférence internationale « pour la reconstruction du Liban » après une guerre entre le groupe militant Hezbollah et Israël. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron serre la main de son homologue libanais Joseph Aoun au palais présidentiel de Baabda le 17 janvier 2025. Le 17 janvier, M. Macron a annoncé que Paris accueillerait dans les prochaines semaines une conférence internationale « pour la reconstruction du Liban » après une guerre entre le groupe militant Hezbollah et Israël. (AFP)
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  • Pour affronter ces défis et amorcer l’écriture de la nouvelle page qui s’ouvre pour le pays, le président français estime qu’il faut s’adosser à trois piliers : restaurer la souveraineté, mettre le Liban sur la voie de la prospérité
  • C’est ce credo que Macron a déroulé lors de ses entretiens avec Aoun et qu’il a réitéré durant ses rencontres avec Salam et le chef du parlement libanais Nabih Berry

PARIS: En se rendant à Beyrouth, quelques jours après l’élection du nouveau président libanais Joseph Aoun et la désignation du nouveau premier ministre Nawaf Salam, le président français Emmanuel Macron a voulu confirmer que la France se tient fermement aux côtés du Liban et des Libanais, dans cette nouvelle ère qui s’ouvre.

C’est une ère porteuse de grands espoirs, pour un pays qui semblait voué au chaos, à cause de l’ineptie de sa classe politique et de ses luttes internes. C’est ce qu’il a voulu constater par lui-même en allant au contact des nouveaux dirigeants et du peuple libanais.

Mais c’est également une ère de défis complexes et difficiles, tant le Liban est fragilisé au niveau de ses institutions, de son économie et de son tissu social par des pratiques mercantiles et communautaires, les ingérences externes, puis récemment une guerre avec Israël qui a laissé une partie de son territoire en lambeaux.

Pour affronter ces défis et amorcer l’écriture de la nouvelle page qui s’ouvre pour le pays, le président français estime qu’il faut s’adosser à trois piliers : restaurer la souveraineté, mettre le Liban sur la voie de la prospérité et consolider son unité.

C’est ce credo que Macron a déroulé lors de ses entretiens avec Aoun et qu’il a réitéré durant ses rencontres avec Salam et le chef du parlement libanais Nabih Berry.

S’exprimant devant les journalistes à la suite de son tête-à-tête avec Aoun au palais présidentiel de Baabda il a souligné que la souveraineté passe par le respect du cessez-le-feu instauré entre le Liban et Israël le 26 novembre dernier et qu’il a qualifié de «succès diplomatique historique qui a permis de sauver des vies». Avec pour effet la nécessité de consolider le mécanisme de surveillance dont la France fait partie.

Cela implique une application stricte des engagements pris par les autorités israéliennes et libanaises dans le cadre de l'accord et dans les délais prévus.

 Soulignant que « des résultats ont été obtenus » à ce niveau, Macron a estimé qu’ils « doivent se fédérer, se confirmer dans la durée », avec « un retrait total des forces israéliennes, et un monopole total de l'armée libanaise sur les armes ».

C'est pourquoi ajoute Macron « nous soutenons, avec force la montée en puissance des forces armées libanaises et leur déploiement dans le sud du pays » tout en continuant à « consolider l'appui international en matière d'équipement de formation, et de soutien financier ».

Cet effort est soutenu par, la France à titre bilatéral et « je sais aussi que nos amis, l'arabie saoudite le Qatar les pays de la région sont prêts à faire davantage » ajoute-t-il, tout en travaillant « avec vous à la démarcation de la ligne bleue pour dégager une solution pérenne au bénéfice de la sécurité de tous ».

Macron a par ailleurs rappelé que cette souveraineté ne concerne pas que le sud du Liban, et que le contrôle des autres frontières, notamment dans le contexte du bouleversement en cours en Syrie, « constitue aussi un enjeu majeur ». 

L’autre pilier étant la prospérité au bénéfice de tous, il exprimé l’espoir d’une formation rapide du nouveau gouvernement pour mener à bien cette tâche et subvenir à l’urgence humanitaire qui n’est pas révolue.

La nécessité de réformer

La France assure t-il veille à ce que les engagements pris le 24 octobre à Paris soient tenus et qu'ils se traduisent matériellement au profit des populations déplacées par la guerre, Mais « au-delà des réponses d'urgence, la communauté internationale doit anticiper un soutien massif à la reconstruction des infrastructures des habitations détruites par la guerre, tout particulièrement au sud, où le million de déplacés libanais sont rentrés pour trouver leur maison et leur village réduits en cendres ».

À ce propos Macron a précisé qu’une conférence internationale pour la reconstruction se tiendra à Paris dans quelques semaines, lors d’une visite qu’effectuera le président libanais.

La prospérité suppose également des réformes, elles sont « attendues et connues » et s’adressant à Aoun dans des termes empreints d’une chaleur amicale « vous les portez, et vous les défendez », la réforme de la justice, la réforme bancaire, la réforme du marché de l'énergie, la lutte contre la corruption, « toutes ces réformes nécessaires, c'est le gouvernement à venir qui le portera, elles sont indissociables de cette reconstruction ». 

L'ensemble de ces points poursuit Macron doit servir le troisième objectif, « celui d'une nation libanaise, réconciliée et unie dans son pluralisme », car la plus grande des appartenances « est celle à une république qui croit dans l'universel, et d'un pluralisme qui respecte toutes les religions, toutes les communautés leur donnent à chacune sa place ».

Ce n'est que dans cette unité, assure-t-il dans « ce pluralisme réconcilié que le chemin est possible », rendant hommage au peuple libanais, aux milliers de victimes que le pays a déploré depuis le déclenchement de la guerre, « une guerre dans laquelle le Liban a été plongé, malgré lui par l'irresponsabilité de quelques uns ».

Avant sa rencontre avec Aoun au palais de Baabda Macron avait déposé une gerbe au monument du soldat inconnu, puis il s’est livré à un exercice qu’il affectionne particulièrement, en déambulant dans le quartier de Gemayzeh, qui avait été dévasté par l’explosion du port de Beyrouth en 2020

Évoluant au milieu d’une foule de libanais qui l’ont accueilli par des applaudissements chaleureux, il a siroté un café puis il a regardé des livres sur la reconstruction de ce quartier, qu’il avait visité juste au lendemain de l’explosion.

Il a échangé en toute spontanéité avec les personnes qui l’entouraient, il a fait des selfies, bu des jus de fruits, partagé une pizza en écoutant attentivement les personnes qui s'adressent à lui.

« Vous êtes adorable » lui lance une vieille dame, « aidez le Liban » lui demande un homme, une autre personne lui fait part de sa crainte d’une reprise de la guerre.

« Bon courage » et « garder le moral », assène le président français à ses interlocuteurs, avant de souligner que l’ère qui s’ouvre est une ère d’espoir où chacun a sa part à accomplir.

Macron avait commencé sa visite par une rencontre avec le premier ministre libanais en exercice Najib Mikati, et deux entretiens avec le chef d’état major de la FINUL, le général Jean-Jacques Fatinet, puis avec le commandant des opérations spéciales au sein du mécanisme de surveillance du cessez le feu le Général Jasper Jeffers et du représentant de la France au sein de ce mécanisme le général Guillaume Pin Hun.