Libye: l'art du filigrane renaît dans la médina de Tripoli

Un Libyen fabrique un bijou en filigrane traditionnel dans un atelier de la capitale Tripoli le 8 juin 2022. (AFP)
Un Libyen fabrique un bijou en filigrane traditionnel dans un atelier de la capitale Tripoli le 8 juin 2022. (AFP)
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Publié le Samedi 09 juillet 2022

Libye: l'art du filigrane renaît dans la médina de Tripoli

  • L'art du filigrane est une vieille tradition en Libye où les bijoux en or et en argent étaient fabriqués par les artisans de la médina de Tripoli, formés par les maîtres juifs puis arabes de la prestigieuse École des Arts et des Métiers
  • A son arrivée au pouvoir en 1969, l'ancien dirigeant Mouammar Kadhafi avait combattu le secteur privé, expropriant entreprises, commerces et habitations, et du jour au lendemain, les artisans, travaillant à leur compte, ont tout perdu

TRIPOLI Libye : Sautoirs, bagues ou fibules... de jeunes Libyens entortillent de délicats fils d'argent puis les soudent pour créer des bijoux traditionnels sous l'oeil averti de leur maître, engagé dans le sauvetage d'un artisanat en voie de disparition en Libye.

A 12 ans, Abdelmajid Zeglam, cadet des élèves de l'Académie libyenne des métiers d'artisanat de l'or et de l'argent (ALMA), est déjà un artisan confirmé dont les ouvrages filigranés, d'une minutie exceptionnelle, sont applaudis par ses pairs.

«J'ai hésité au début de peur d'échouer en raison de mon jeune âge mais ma mère m'a encouragé», confie timidement le jeune garçon, les mains sans cesse en mouvement.

Comme ses camarades, il a «étudié les alliages de l'or et de l'argent avant de fabriquer des bijoux», une activité que cet élève de 6e «aime beaucoup» et compte perfectionner pour en faire un travail à mi-temps. «Je veux devenir ingénieur pétrolier le matin, artisan l'après-midi», explique-t-il.

Comme lui, une vingtaine d'élèves, dont neuf femmes, fréquentent l'atelier qui n'occupe que quelques mètres carrés dans ce qui fut l'ancien consulat de France sous l'empire Ottoman, non loin de l'Arc de Marc Aurèle, le plus célèbre vestige romain de Tripoli.

«C'est un loisir mais à l'avenir je veux en faire mon métier», confie Mohamad al-Miloudi, 22 ans, casquette vissée sur la tête.

Etirant et torsadant de longues et fines lanières d'argent, cet étudiant en génie civil ne manque pas un seul cours depuis son inscription.

«L'art du filigrane est une vieille tradition en Libye où les bijoux en or et en argent étaient fabriqués par les artisans de la médina de Tripoli, formés par les maîtres juifs puis arabes de la prestigieuse Ecole des Arts et des Métiers», fondée à la fin du 19e siècle, explique Abdelnasser Aboughress, qui dirige l'ALMA.

Né au coeur de la médina il y a 55 ans, M. Aboughress a 40 ans de métier et un savoir-faire hérité de son père qu'il veut transmettre aux jeunes générations.

- «Peine» -

A son arrivée au pouvoir en 1969, l'ancien dirigeant Mouammar Kadhafi avait combattu le secteur privé, expropriant entreprises, commerces et habitations.

Du jour au lendemain, les artisans, travaillant à leur compte, ont tout perdu: leurs ateliers, leur gagne-pain et leurs élèves. En baissant le rideau, ils ont rompu avec des siècles de tradition.

«L'Etat a réduit à néant l'artisanat libyen, forçant la génération de jeunes apprentis qui devaient assurer la relève à quitter les métiers traditionnels pour intégrer l'armée» ou devenir fonctionnaire, se souvient le quinquagénaire, en triant marteaux et burins.

«La plupart des métiers traditionnels ont disparu», surtout ceux de l'or et de l'argent qui furent la fierté des Tripolitains, fournisseurs de bijoux et ornements aux autres régions.

«Des bijoux et accessoires importés d'Egypte ou de Chine, de piètre qualité, ont alors inondé le marché», regrette M. Aboughress, tandis que les derniers bijoux anciens étaient vendus dans des boutiques prisées des touristes et expatriés.

Pour Fatima Boussoua, la quarantaine, voir au fil des années des centaines de kilos de bijoux quitter le pays pour être souvent refondus hors de Libye «fait de la peine» car «c'est toute une partie de l'héritage artisanal libyen qui disparaît».

- Relève -

«Nous devons rapidement former des artisans pour préserver notre patrimoine», préconise cette dentiste de profession, en formation à l'ALMA depuis plus d'un an. Cet artisanat est un hobby et même une «passion» pour la professeure universitaire.

Devenir artisan confirmé dans l'art du filigrane implique des années d'apprentissage. Mais grâce à l'enthousiasme que leur transmet leur maître, les élèves d'Abdelnasser Aboughress produisent déjà des bijoux vendus en ligne ou dans l'atelier.

«Nous avons ce qu'il faut pour assurer la relève (...), il suffit seulement de gens passionnés», souligne Mme Boussoua, tout en jugeant également nécessaires un «appui financier» pour se procurer des matières premières coûteuses, et un «appui moral» pour que ce métier retrouve sa gloire d'antan.

M. Aboughress ne veut pas s'arrêter au petit atelier de la médina et compte «ouvrir des centres de formation dans d'autres villes et régions» de Libye.

Car, dit-il, «il est temps de faire revivre ce métier» avant qu'il ne disparaisse à jamais.


Le pianiste Igor Levit va donner un concert de plus de 16 heures à Londres

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
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  • Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance"
  • "Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée

LONDRES: Le pianiste Igor Levit va donner jeudi et vendredi à Londres un concert unique, prévu pour durer plus de 16 heures, en jouant en solo "Vexations" d'Erik Satie, sous la direction de l'artiste Marina Abramovic, connue pour ses performances radicales.

Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance".

"Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée. Elle se traduit ainsi par une performance durant entre 16 et 20 heures. Habituellement, plusieurs pianistes se succèdent pour jouer ce morceau sans interruption.

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19.

C'est la première fois qu'il va jouer ce morceau en intégralité en public.

Le public va être "témoin (d'un moment) de silence, d'endurance, d'immobilité et de contemplation, où le temps cesse d'exister", a commenté Marina Abramovic, artiste serbe de 78 ans. "Igor interprète +Vexations+ avec des répétitions infinies, mais une variation constante", a-t-elle ajouté.

Le rôle de Marina Abramovic, connue pour ses performances qui poussent les spectateurs dans leurs retranchements, est de "préparer le public à cette expérience unique".

Erik Satie avait lui écrit à propos du morceau à l'adresse des pianistes: "Pour jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses".

Dans une interview au quotidien britannique The Guardian, Igor Levit a encouragé son public à "se laisser aller". "C'est juste un espace vide, alors plongez dedans", a-t-il dit.

Les spectateurs pourront assister au concert soit pour une heure soit dans sa totalité. Il commencera jeudi à 10H00 (09H00 GMT).


Les Marionnettes enchantent Dubaï: une scène multilingue et inclusive pour les enfants

Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
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  • Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe
  • «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella, la fondatrice

DUBAÏ: À Dubaï, dans un paysage dominé par les écrans et les technologies dernier cri, un petit théâtre de marionnettes attire l’attention des familles en quête d’activités culturelles pour leurs enfants. Fondé par Gabriella Skaf, Les Marionnettes propose une expérience ludique, éducative et multilingue qui séduit aussi bien les enfants que leurs parents.

Une idée née d’un besoin personnel

Gabriella Skaf, franco-libanaise et ancienne juriste en droit bancaire, a quitté les salles d’audience pour donner vie à un tout autre théâtre: celui des marionnettes.

«J’ai toujours rêvé de créer quelque chose qui me ressemble, mais je n’avais pas encore trouvé la bonne idée», confie-t-elle avec sincérité.

C’est lors de vacances en France que tout a commencé: «Nous emmenions souvent nos enfants voir des spectacles de marionnettes, et ils étaient fascinés. Mon fils n’avait même pas deux ans, mais il restait captivé du début à la fin. À Dubaï, rien de tel n’existait», raconte Gabriella.

De retour aux Émirats, elle décide alors de donner vie à ce manque. «Au départ, c’était une petite idée… Puis les choses se sont enchaînées: nous avons trouvé un local, pris contact avec des marionnettistes en France, et après plusieurs mois de préparation, le théâtre a ouvert ses portes en novembre 2024.»

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Les Marionnettes propose des spectacles interactifs pour enfants en plusieurs langues (français, anglais, arabe, russe…).

Une programmation multilingue et interactive

Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe. «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella.

Le théâtre offre deux formats principaux:

  • Les spectacles de marionnettes, qui durent environ une heure avec une pause au milieu.
  • Le storytelling, plus court (30 minutes), où un animateur lit un livre, parfois accompagné de marionnettes, suivi d’une activité créative comme du bricolage, du dessin ou la fabrication de masques.

«L’objectif, c’est de rendre la lecture vivante et de faire participer les enfants. On essaie aussi de varier les langues: italien, arabe, français, russe… bientôt l’espagnol.»

Une activité éducative qui séduit les écoles

Les écoles ont rapidement adhéré au concept. «Les retours sont extrêmement positifs, confie Gabriella. Les enseignants apprécient le fait que ce soit à la fois pédagogique et ludique. Les enfants participent activement, posent des questions, interagissent avec les marionnettes… et surtout, ils gagnent en confiance.»

La différence entre les visites scolaires et familiales est notable. «À l’école, les enfants sont plus calmes, attentifs, et respectent davantage les consignes. Lorsqu’ils viennent avec leurs parents, ils se montrent plus spontanés, plus libres… mais tout aussi enthousiastes. Ce sont deux énergies différentes, et chacune a son charme.»

Les enfants sont encouragés à s’exprimer pendant les spectacles. «Les marionnettes posent des questions, les enfants répondent. Même les plus timides finissent par participer.»

Un message fort autour de l’inclusion

Le 30 avril, Les Marionnettes lancera un spectacle inédit en partenariat avec Sanad Village, une organisation qui accompagne les enfants à besoins spécifiques. «C’est une histoire sur l’inclusion. Le but, c’est d’apprendre aux enfants à accepter les différences, à être gentils et ouverts aux autres», explique Gabriella.

Le spectacle sera présenté en anglais, en français et en arabe, et proposé aux écoles ainsi qu’au grand public.  C’est un sujet important. On veut que les enfants comprennent qu’il ne faut pas avoir peur de ce qui est différent.»

Une ambition régionale

L’objectif de Gabriella ne s’arrête pas à Dubaï. «On aimerait bien développer le concept dans d’autres pays de la région: Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Liban. Il existe un véritable besoin pour ce type d’activité culturelle.»

Pour rendre le projet plus mobile, un théâtre itinérant est en préparation. «On pourra l’emmener dans les écoles, dans d’autres villes, et même l’utiliser pour des événements privés ou des anniversaires.»

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Gabriella Skaf - Fondatrice, Les Marionnettes. (photo: fournie)

Une programmation à découvrir en famille

Les spectacles ont lieu les week-ends – vendredi, samedi et dimanche – tandis que les séances de storytelling se déroulent en semaine. Une activité pour les tout-petits, appelée «Bright Minds», est aussi proposée le lundi matin.

«Le programme change chaque mois et on publie les détails chaque semaine sur notre site et nos réseaux sociaux. Les gens peuvent réserver en ligne ou acheter leurs billets sur place», précise Gabriella.

Prochaine étape: un club de lecture pour enfants, des ateliers théâtre et même des cours pour apprendre à créer ses propres marionnettes.


Les îles Farasan célèbrent l'arrivée annuelle du hareng

Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
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  • Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.
  • Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

RIYAD : Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.

Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

Reconnaissable à son bec de perroquet et à ses couleurs vives, le harid prospère dans les habitats riches en coraux, avec plus de 90 espèces, chacune ayant des formes et des couleurs uniques.

Farasan, un groupe d'îles coralliennes situées à 40 km de la côte de Jazan, devient le site de cet événement naturel lorsque de vastes bancs de poissons harid se rassemblent, selon l'agence de presse saoudienne. 

Les habitants peuvent prédire l'arrivée du poisson grâce à une odeur distincte qui se dégage de la mer après le coucher du soleil, le 15^e jour du mois lunaire.

La pêche annuelle au harid, célébrée à la fin du mois d'avril, est une tradition qui reflète l'héritage culturel des îles et qui fait la joie des habitants des îles Farasan depuis des siècles.

Reconnaissant l'importance culturelle et touristique de cette pêche, le prince Mohammed bin Nasser, gouverneur de Jazan, a inauguré le premier festival du harid des îles Farasan en 2005.

La 21^e édition du festival a été lancée lundi, mettant en avant les îles comme une destination prometteuse pour les touristes et les investisseurs. 

Le festival met en avant les coutumes, les traditions, les jeux folkloriques, l'artisanat et les sites historiques uniques de Farasan, tout en présentant l'artisanat local, comme les pièges à pêche, le tissage de palmiers, la création de sacs et de tapis, ainsi que le tricotage de chapeaux. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com