L'épineuse question du retour en France des enfants de jihadistes

Cette photo d'archive prise le 4 mars 2021 montre une femme tenant la main d'un enfant alors qu'ils se tiennent sous la pluie au Camp Roj, où sont détenus des proches de personnes soupçonnées d'appartenir au groupe État islamique (EI), dans la campagne près d'al- Malikiyah (Derik) dans la province de Hasakah, au nord-est de la Syrie. (AFP)
Cette photo d'archive prise le 4 mars 2021 montre une femme tenant la main d'un enfant alors qu'ils se tiennent sous la pluie au Camp Roj, où sont détenus des proches de personnes soupçonnées d'appartenir au groupe État islamique (EI), dans la campagne près d'al- Malikiyah (Derik) dans la province de Hasakah, au nord-est de la Syrie. (AFP)
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Publié le Vendredi 01 juillet 2022

L'épineuse question du retour en France des enfants de jihadistes

  • Emboîtant le pas de l'Allemagne, la Belgique s'est résolue fin juin à rapatrier la quasi-totalité de ses enfants, dont il ne reste que cinq sur place
  • Paris a contrario, maintient une politique décriée de retour au compte-gouttes

PARIS: Ils sont encore environ 200, captifs et esseulés dans l'hostilité du désert syrien. Contrairement à ses voisins européens, la France reste réticente à rapatrier ses enfants de jihadistes alors même que ceux revenus se fondent dans la normalité d'une enfance retrouvée.

Depuis 2016, 126 enfants dont les parents ont rejoint des territoires conquis à l'Etat islamique ont été rapatriés en France. Mais le plus gros contingent, près de 200 mineurs et 80 mères, sont toujours retenus dans des camps du nord-est syrien contrôlés par les Kurdes.

Emboîtant le pas de l'Allemagne, la Belgique s'est résolue fin juin à rapatrier la quasi-totalité de ses enfants, dont il ne reste que cinq sur place. Paris a contrario, maintient une politique décriée de retour au compte-gouttes.

Pour le Comité des droits de l'enfant de l'ONU, la France "a violé les droits des enfants français détenus en Syrie en omettant de les rapatrier". Il dénonce des conditions sur place "épouvantables", "mettant leur vie en danger depuis des années", selon ses constatations publiées en février.

Ces enfants entassés sous des tentes, exposés aux températures extrêmes, déscolarisés "manquent de produits de première nécessité, notamment l'eau, la nourriture et les soins de santé, et font face à un risque imminent de mort", s'alarment les experts de l'ONU.

"Quand ce sujet vient au devant de l'actualité, je sais les fantasmes qui peuvent se déployer", commente Stéphane Troussel, président du département de la Seine-Saint-Denis, en région parisienne.

"Les images d'enfants embrigadés par l'Etat islamique (EI), armes à la main, restent imprégnées", se désole l'élu qui prend en charge, au travers de l'Aide sociale à l'enfance (ASE), les deux-tiers des enfants français de retour de zone de guerre, principalement de la région irako-syrienne.

Mais "les enfants ne sont pas coupables, ils sont d'abord et avant tout les victimes des dérives mortifères de leurs parents et ce qu'il leur faut avant tout c'est de se reconstruire si on veut qu'ils puissent s'intégrer dans la société", insiste M. Troussel.

Une position à rebours de l'opinion: en 2019, près de sept Français sur dix étaient opposés au retour des enfants de jihadistes, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour France Info et Le Figaro.

«Hypothéquer leur avenir»

Le retour de ces "revenants", mineurs comme adultes, se fait a minima: en 2021, seuls huit enfants ont été rapatriés sur la juridiction de Seine-Saint-Denis. Et le sujet reste très sensible pour le gouvernement.

Mais les échéances électorales passées, le "Collectif des familles unies" regroupant des familles de français partis en zone irako-syrienne, espère un "geste" d'Emmanuel Macron pour son second mandat.

Sollicité par l'AFP, le Quai d'Orsay n'a pas souhaité communiquer et la dernière prise de position sur ce sujet remonte à avril, le président français avait alors assuré sur Franceinfo que les orphelins n'avaient pas vocation à rester dans les camps, sans préciser le calendrier.

"Il ne faut pas les laisser dans la fournaise, tout le monde est en train de craquer psychologiquement", prévient Marie Dosé, avocate de plusieurs femmes et enfants français retenus en Syrie.

"Dans les camps, c'est l'expérience de la violence de l'abandon, de la solitude", explique le professeur Thierry Baubet, chef du service de psychopathologie de l'enfant à l'hôpital Avicenne de Bobigny. Or, "l'un des facteurs de gravité du traumatisme, c'est la durée d'exposition. Les laisser, c'est maltraitant et c'est hypothéquer leur avenir", poursuit le pédopsychiatre dont les équipes évaluent chaque enfant à leur retour.

"Certains étaient très mal en point psychiquement avec beaucoup de crises d'angoisse, un sommeil troublé, des cheveux qui tombent, les plus âgés, au contraire émerveillés par ce qu'ils voyaient autour d'eux", a constaté à leur retour la vice-présidente du tribunal pour enfants de Bobigny, Muriel Eglin.

L'accueil de ces mineurs a été "une aventure", faite au début d'appréhensions, selon l'ASE des Yvelines. "Des familles d'accueil ou des éducateurs craignaient de voir figurer leur nom et adresse sur des courriers adressés au tribunal", et d'être ainsi associés aux dossiers de terrorisme des parents, confie Lucie Debove, cheffe de service de l'ASE de Seine-Saint-Denis.

Rapporter «la vérité»

Passés ces tâtonnements, une prise en charge sur mesure a été mise en place par les services de la protection de l'enfance en coordination avec la protection judiciaire de la jeunesse et les psychologues. Ils travaillent collectivement avec pour objet "que les enfants redeviennent des enfants", expose Sandra Lavantureux, directrice de l'ASE des Yvelines, en région parisienne.

De la scolarisation dont la plupart était privés, aux visites au parloir jusqu'au contrôle des messages Whatsapp et courriers venus de Syrie, rien n'est laissé au hasard par les acteurs de la protection de l'enfance. Le passé de la famille élargie non plus.

"Plus de 65% des parents sont en prison, on repère si la visite est positive pour l'enfant. Il y a très peu de situations de suspension du droit de visite. Quand il y en a, c'est parce qu'il y a une radicalisation toujours agissante avec un discours très agressif ou lorsque des enfants subissent des pressions sur des déclarations qui auraient pu être faites, préjudiciables aux parents qui vont être jugés pour acte de terrorisme", explique Mme Eglin.

Les autorités judiciaires, poursuit-elle, cherchent aussi l'"adhésion des parents et de la famille élargie au projet éducatif, essentielle à l'épanouissement de l'enfant. Elles veulent "s'assurer que les enfants vont grandir avec une vérité de leur histoire et ne pas rajouter des secrets à tous leurs traumatismes".

"Ce n'est pas anodin d'avoir deux parents en prison donc il faut leur expliquer les pourquoi et comment des agissements de leurs parents", abonde Me Josine Bitton, avocate de plusieurs enfants. Elle se rend au procès des parents pour "recueillir des bribes de leur histoire" afin de "les restituer, maintenant ou plus tard, à l'enfant".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".


Le lycée Averroès, «un bastion de l'entrisme islamiste», selon Retailleau

Le lycée musulman lillois Averroès, dont le contrat d'association avec l'Etat a été rétabli mercredi par la justice administrative, "est un bastion de l'entrisme islamiste", a affirmé jeudi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. (AFP)
Le lycée musulman lillois Averroès, dont le contrat d'association avec l'Etat a été rétabli mercredi par la justice administrative, "est un bastion de l'entrisme islamiste", a affirmé jeudi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. (AFP)
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  • "Les faits sont graves, ils sont significatifs de l'entrisme islamiste que je veux combattre avec la plus grande fermeté. Et le lycée Averroès est pour nous un bastion de cet entrisme"
  • "On a des éléments extrêmement graves, extrêmement lourds, l'argent des Français n'a rien à faire dans ce genre d'organisation"

MARSEILLE: Le lycée musulman lillois Averroès, dont le contrat d'association avec l'Etat a été rétabli mercredi par la justice administrative, "est un bastion de l'entrisme islamiste", a affirmé jeudi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, disant souhaiter "que l'Etat fasse appel".

"Les faits sont graves, ils sont significatifs de l'entrisme islamiste que je veux combattre avec la plus grande fermeté. Et le lycée Averroès est pour nous un bastion de cet entrisme", a déclaré le ministre. "On a des éléments extrêmement graves, extrêmement lourds, l'argent des Français n'a rien à faire dans ce genre d'organisation", a-t-il ajouté, lors d'un déplacement à Marseille.