Riyad et Ankara doivent maintenir leur partenariat stratégique

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, (à droite) posant avec le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, (à gauche) à Ankara (Photo, AFP).
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, (à droite) posant avec le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, (à gauche) à Ankara (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 23 juin 2022

Riyad et Ankara doivent maintenir leur partenariat stratégique

Riyad et Ankara doivent maintenir leur partenariat stratégique
  • La visite du roi Salmane en Turquie en avril 2016 a démontré les liens personnels entre les deux dirigeants
  • C'est Téhéran qui profite le plus des divisions entre les deux pays à majorité sunnite les plus puissants de la région

Depuis la visite du président turc, Recep Tayyip Erdogan, à Riyad en 2015, le commerce et les investissements bilatéraux n'ont cessé d'augmenter. Des centaines d'entreprises turques opèrent dans le Royaume, avec bien plus 946,9 millions d’euros d'investissements. La valeur des investissements saoudiens en Turquie est estimée à près de 1,9 milliards d’euros. Le commerce bilatéral est évalué à environ 7,5 milliards d’euros.
Mais la relation stratégique entre les deux nations va au-delà des liens commerciaux. Le roi Salmane a été l'un des premiers dirigeants mondiaux à exprimer son soutien à Erdogan après la tentative de coup d'État ratée contre lui l'année dernière. L'Arabie saoudite installe également certains de ses avions de guerre sur la base aérienne turque d'Incirlik, dans le cadre de sa participation à la coalition internationale visant à vaincre Daech.
La visite du roi Salmane en Turquie en avril 2016 a démontré les liens personnels entre les deux dirigeants, et a souligné les menaces de sécurité communes auxquelles ils sont confrontés de la part de groupes extrémistes, tels que Daech. Les ambitions hégémoniques régionales de l'Iran sont également une préoccupation pour Ankara. Lorsqu'Erdogan a rendu visite au roi Salmane et au prince héritier, Mohammed ben Salmane, en février de cette année, la Syrie et la sécurité régionale ont été au centre de leurs discussions.
La crise provoquée par le Qatar risque de peser lourdement sur le partenariat entre la Turquie et l'Arabie saoudite, étant donné qu'Ankara a récemment appelé le Quartet antiterroriste (ATQ) à mettre fin à son boycott de Doha. Cela dit, la Turquie est bien consciente qu'en tant que pays musulman sunnite puissant et influent, il ne serait pas dans son intérêt d'envenimer les relations avec l'Arabie saoudite.


«La profondeur stratégique qu'Ankara gagne en travaillant en harmonie avec le Quartet antiterroriste dirigé par l'Arabie saoudite est dans l'intérêt de la région à long terme.»

    Oubai Shahbandar

La profondeur stratégique qu'Ankara gagne en travaillant en harmonie avec le Quartet antiterroriste dirigé par l'Arabie saoudite est dans l'intérêt de la région à long terme. Étant donné que la Turquie a une expérience directe du chaos que peut entraîner une ingérence extérieure dans ses affaires intérieures, elle devrait être naturellement sensible aux préoccupations de l'ATQ concernant le soutien qatari à une ingérence déstabilisatrice dans les affaires intérieures arabes.
La menace des extrémistes est une préoccupation intérieure majeure pour la Turquie, Istanbul et d'autres villes ayant été le théâtre d'une vague d'attentats l'année dernière. La coopération avec l'Arabie saoudite et l'ATQ contre le fléau du financement du terrorisme et la lutte contre l'idéologie extrémiste est évidemment bénéfique pour toutes les parties. Erdogan est également dans une position unique qui lui permet d'exercer une pression supplémentaire sur le Qatar pour qu'il se conforme aux exigences de l'ATQ s'il le souhaite.
Quant à la menace iranienne, elle est plus proche que jamais des frontières de la Turquie, alors que des milliers de soldats appartenant aux gardiens de la révolution iraniens et leurs milices extrémistes qui agissent pour leur compte progressent en Syrie. C'est Téhéran qui profite le plus des divisions entre les deux pays à majorité sunnite les plus puissants de la région.
Il faut espérer que les divergences avec la Turquie sur le Qatar pourront être résolues par des voies bilatérales respectueuses. La visite d'Erdogan à Riyad cette semaine sera, espérons-le, un signal de coopération et d'unité continues. Ce partenariat doit perdurer si l'on veut que la ligne de démarcation tienne contre les extrémistes, leurs bienfaiteurs et la maligne agression iranienne qui nous menace tous.

Oubai Shahbandar est un ancien conseiller principal du ministère de la Défense, et actuellement un consultant en communications stratégiques spécialisé dans les affaires du Moyen-Orient et du Golfe.
NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs de cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com