En Israël, la coalition rattrapée par la réalité du conflit israélo-palestinien

Le Premier ministre israélien Naftali Bennett (à gauche) et le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid font une déclaration conjointe à la presse à Jérusalem le 20 juin 2022. OREN BEN HAKOON / AFP
Le Premier ministre israélien Naftali Bennett (à gauche) et le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid font une déclaration conjointe à la presse à Jérusalem le 20 juin 2022. OREN BEN HAKOON / AFP
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Publié le Mardi 21 juin 2022

En Israël, la coalition rattrapée par la réalité du conflit israélo-palestinien

  • Le seul gouvernement de l'histoire d'Israël soutenu par un parti arabe et forgé pour évincer l'ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu devait éviter les sujets clivants, mais a finalement trébuché sur le conflit israélo-palestinien
  • Début juin, c'est la crise. Des députés arabes refusent de voter le renouvellement d'une loi accordant aux 475 000 colons de Cisjordanie occupée les mêmes droits qu'aux Israéliens

JERUSALEM: Le seul gouvernement de l'histoire d'Israël soutenu par un parti arabe et forgé pour évincer l'ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu devait éviter les sujets clivants, mais a finalement trébuché sur le conflit israélo-palestinien, au point de remettre en cause de futures alliances avec la minorité arabe.

En juin 2021, après plus de deux ans de crise politique ayant mené Israël à quatre élections, le leader de la formation de droite radicale Naftali Bennett et le chef centriste Yaïr Lapid annoncent la formation d'une coalition hétéroclite. L'objectif est de chasser du pouvoir M. Netanyahu, Premier ministre depuis 12 ans sans interruption et inculpé de corruption dans une série d'affaires.

Pour y parvenir, MM. Bennett et Lapid fédèrent les "anti-Bibi", du surnom de M. Netanyahu, à gauche, au centre, de droite, et aussi la petite formation arabe Raam qui concentre ses appuis chez les bédouins du sud du pays. Le message du nouveau gouvernement est clair: il faut tenter de "réunir" toutes les franges de la société israélienne et "éviter" les sujets qui divisent.

La coalition passe l'été en mode lune de miel, parvient à faire adopter un premier budget d'Etat en plus de deux ans à l'automne, et commence à se lézarder au printemps 2022 sur fond de heurts entre manifestants palestiniens et policiers israéliens sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem, la formation Raam "gelant" alors son appui au gouvernement.

Début juin, c'est la crise. Des députés arabes refusent de voter le renouvellement d'une loi accordant aux 475.000 colons de Cisjordanie occupée les mêmes droits qu'aux Israéliens, ce qui révulsent des élus de droite au sein même de la coalition.

En refusant de soutenir le gouvernement pour renouveler cette "loi sur les colons", qu'il défend lui-même, M. Netanyahu expose les divisions au sein même de la coalition qui n'avait plus les appuis internes suffisants pour faire adopter une loi clé pour la population juive israélienne, notent des analystes.

Incapable de faire adopter cette loi, Naftali Bennett abdique lundi soir et annonce que son gouvernement fera voter d'ici la semaine prochaine la dissolution du Parlement pour convoquer à l'automne un cinquième scrutin en environ trois ans et demi.

Benjamin Netanyahu, 72 ans, accuse aussitôt la coalition d'avoir "dépendu de soutiens terroristes" et "abandonné le caractère juif d'Israël". "Il y a une majorité de droite dans la Knesset mais certains ont préféré s'associer à un parti arabe qu'avec moi (...) Moi, je ne formerai pas de coalition avec Mansour Abbas", renchérit M. Netanyahu, chef du Likoud (droite).

« Juifs contre Arabes »

Pour l'analyste politique Aviv Bushinsky, un ancien chef de la communication de M. Netanyahu, "une partie de la droite en Israël s'est dit que la présence des Arabes israéliens au gouvernement était peut-être une expérience intéressante mais que le prix final à payer était trop élevé".

"Ils (les Arabes Israéliens) voulaient plus que ce que nous étions près à leur donner. Si la droite remporte les élections, Mansour Abbas restera dans l'opposition et il pourrait même ne pas être élu", plusieurs électeurs arabes lui reprochant d'avoir pactisé avec un gouvernement, dit-il.

Dans ce contexte, l'un des principaux axes de la prochaine campagne électorale devrait être le suivant: "Juifs contre Arabes", notait mardi le Yediot Aharonot, titre le plus vendu de la presse israélienne.

"Le Likoud va dire qu'intégrer un parti arabe dans la coalition a été un péché impardonnable, un acte de trahison du pays. Les sondeurs du Likoud ont déjà discerné chez des Juifs israéliens une sorte de haine ou un désir de se venger contre l'ensemble de cette minorité", qui forme environ 20% de la population de ce pays de 9,6 millions d'habitants, poursuit le quotidien.

Pour l'analyste Dahlia Scheindlin, il y a bien une leçon à tirer de cette coalition hétéroclite. "Au final, aucun gouvernement ne peut se permettre de mettre de côté le conflit israélo- palestinien (comme a tenté de le faire la coalition, ndlr)", souligne-t-elle.

"Je pense que dès le début Netanyahu - qui est un fin stratège politique - savait qu'il y avait plusieurs choses sur laquelle la coalition pouvait s'entendre mais qu'il y avait une grande chose qui les divisait à savoir l'occupation et le conflit. Et il a tenté de tourner le fer dans cette plaie".


Liban: un mort et sept blessés dans des frappes israéliennes

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  • Le ministère libanais de la Santé a indiqué qu'une personne avait été tuée dans une frappe sur la ville de Chmistar (est)
  • Une personne a été blessée à Bnaafoul, dans le district de Saïda (sud-ouest), et six autres à Ansar, dans le district de Nabatieh (sud), selon lui

BEYROUTH: Des frappes israéliennes dans le sud du Liban ont fait un mort et sept blessés jeudi, l'armée israélienne affirmant avoir ciblé le Hezbollah et ses alliés tandis que le président libanais déplore des frappes contre des "installations civiles".

Le ministère libanais de la Santé a indiqué qu'une personne avait été tuée dans une frappe sur la ville de Chmistar (est). Une personne a été blessée à Bnaafoul, dans le district de Saïda (sud-ouest), et six autres à Ansar, dans le district de Nabatieh (sud), selon lui.

Le président Joseph Aoun a indiqué que les frappes israéliennes visaient des "installations civiles", condamnant ce qu'il considère comme une violation du cessez-le-feu négocié l'année dernière.

"L'agression israélienne répétée s'inscrit dans le cadre d'une politique systématique visant à détruire les infrastructures productives, à entraver la reprise économique et à saper la stabilité nationale sous de faux prétextes sécuritaires", a déclaré M. Aoun.

L'armée israélienne a indiqué dans un communiqué qu'elle avait "frappé des infrastructures terroristes du Hezbollah (...) dans la région de Mazraat Sinaï, dans le sud du Liban".

Elle a également indiqué qu'elle avait frappé des installations utilisées par Green Without Borders, une ONG sous sanctions américaines qu'Israël considère comme ayant "opéré sous une couverture civile pour dissimuler la présence du Hezbollah dans la zone frontalière avec Israël".

Israël a bombardé le Liban à plusieurs reprises ces derniers mois malgré la conclusion d'un cessez-le-feu en novembre, après plus d'un an d'affrontements avec le mouvement pro-iranien Hezbollah qui ont dégénéré en deux mois de guerre ouverte.

 


De retour dans une «ville fantôme», des Gazaouis montent des tentes sur les ruines

Les Palestiniens rentrés chez eux à Gaza-ville après le cessez-le-feu n'ont trouvé que des décombres à la place de leurs maisons. Ils tentent de mettre en place des abris de fortune en utilisant tout ce qu'ils peuvent trouver parmi les débris. (AFP)
Les Palestiniens rentrés chez eux à Gaza-ville après le cessez-le-feu n'ont trouvé que des décombres à la place de leurs maisons. Ils tentent de mettre en place des abris de fortune en utilisant tout ce qu'ils peuvent trouver parmi les débris. (AFP)
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  • Dans le nord-ouest de la ville située dans le nord du territoire palestinien ravagé par deux ans de guerre entre Israël et le Hamas, les rues quasi-désertes entourent des immeubles détruits
  • Certains sont complètement effondrés, d'autres tiennent encore debout mais sont très endommagés, selon des images aériennes filmées par l'AFP

GAZA: Les Palestiniens rentrés chez eux à Gaza-ville après le cessez-le-feu n'ont trouvé que des décombres à la place de leurs maisons. Ils tentent de mettre en place des abris de fortune en utilisant tout ce qu'ils peuvent trouver parmi les débris.

Dans le nord-ouest de la ville située dans le nord du territoire palestinien ravagé par deux ans de guerre entre Israël et le Hamas, les rues quasi-désertes entourent des immeubles détruits.

Certains sont complètement effondrés, d'autres tiennent encore debout mais sont très endommagés, selon des images aériennes filmées par l'AFP.

Hossam Majed, 31 ans, a retrouvé sa maison entièrement rasée. Dans les ruines de l'immeuble de plusieurs étages, le trentenaire a quand même réussi à rassembler quelques affaires, dont des meubles.

En attendant le retour des autres occupants de l'immeuble, il prépare les lieux en mettant en place un abri de fortune. Avec ses frères, il protège ce qu'il reste d'éventuels pillards.

"Même la nourriture est plus chère que dans le sud (du territoire) parce qu'elle est rare. Il n'y a pas d'électricité, pas d'eau, pas d'internet. Je dois marcher un kilomètre et demi juste pour remplir deux bidons d'eau", dit-il.

"Nous dormons dans la rue" 

Oum Rami Loubbad, mère de trois enfants âgée de 46 ans, a quitté en septembre sa maison déjà partiellement détruite, pour se réfugier à Khan Younès (sud).

Elle espérait la retrouver dans le même état. "C'était le seul espoir restant pour un peu de stabilité — et ils l'ont complètement détruite", dit-elle avec émotion.

"Nous dormons dans la rue. Je n'ai pas de tente", lâche-t-elle en espérant que des tentes seront distribuées.

Le retour a été un choc avec toutes ces destructions dans la ville, où l'armée israélienne avait, avant l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, concentré ses bombardements pour chasser le Hamas, auteur de l'attaque du 7 octobre 2023 contre Israël.

"Je regardais aussi loin que je pouvais, et je ne voyais rien!", dit Oum Rami Loubbad. Elle a récupéré ce qu'elle pouvait, des morceaux de meubles en bois, des vêtements et une bouteille de gaz.

"Nous allons vendre le plastique que nous trouvons et utiliser le bois pour faire la cuisine ou pour construire des toilettes", ajoute-t-elle. "Je ne sais pas combien de temps on va pouvoir supporter cela."

Ahmad Al-Abbassi, réfugié dans le sud pendant les bombardements, a retrouvé l'emplacement de son immeuble de cinq étages à Gaza-ville. Mais il n'en reste plus rien.

"Nous sommes retournés dans le nord en espérant retrouver nos maisons et (reconstruire notre) vie. Comme vous pouvez le voir, Gaza s'est transformée en une ville fantôme", dit-il.

"Marcher sur la maison" 

Sur les ruines, Ahmad Al-Abbassi tente d'ériger une tente de fortune, auprès d'un drapeau palestinien qui flotte au bout d'un piquet.

Avec le couvercle d'un fait-tout, il gratte le sol pour l'aplanir. Puis, il empile quelques parpaings pour y planter des fers à béton et soutenir une toile censée faire office de toit. Le vent s'en mêle et secoue la toile, ainsi que le drapeau.

"Nous essayons de récupérer tout ce que nous pouvons. Nous allons essayer de reconstruire juste pour avoir une pièce pour abriter nos enfants et nos familles", dit-il.

Moustafa Mahram, de retour chez lui avec sa famille, a trouvé sa maison de trois étages "réduite en cendres". "Tout est parti. Aujourd'hui, quand nous marchons, nous marchons littéralement dessus. Il n'y a aucun moyen d'y vivre."

Il a installé une tente près des décombres. "On a été jeté à la rue."

Le Palestinien décrit le quotidien des habitants rentrés à Gaza-ville: "il n'y a pas d'eau — pas d'eau potable, même pas d'eau salée, pas d'eau du tout. Aucun élément essentiel de la vie n'est disponible —pas de nourriture, pas de quoi boire, rien. Et comme vous pouvez le voir, il ne reste que des décombres".

"Il n'y a pas d'électricité, même pas de routes praticables pour marcher comme des êtres humains."

 


Netanyahu déterminé à obtenir le retour de toutes le dépouilles d'otages

 Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé jeudi sa détermination à obtenir le retour de toutes les dépouilles d'otages aux mains du Hamas, au lendemain de menaces de son ministre de la Défense de reprendre l'offensive dans la bande de Gaza. (AFP)
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé jeudi sa détermination à obtenir le retour de toutes les dépouilles d'otages aux mains du Hamas, au lendemain de menaces de son ministre de la Défense de reprendre l'offensive dans la bande de Gaza. (AFP)
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  • Israël a accusé le mouvement islamiste palestinien de violer l'accord de cessez-le-feu aux termes duquel il devait remettre tous les otages retenus à Gaza
  • Le Hamas a libéré dans les temps les 20 otages vivants mais il n'a remis depuis lundi que neuf dépouilles d'otages sur les 28 qu'il retient

JERUSALEM: Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé jeudi sa détermination à obtenir le retour de toutes les dépouilles d'otages aux mains du Hamas, au lendemain de menaces de son ministre de la Défense de reprendre l'offensive dans la bande de Gaza.

Israël a accusé le mouvement islamiste palestinien de violer l'accord de cessez-le-feu aux termes duquel il devait remettre tous les otages retenus à Gaza, les vivants et les morts, dans les 72 heures suivant l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, soit au plus tard lundi à 09H00 GMT.

Le Hamas a libéré dans les temps les 20 otages vivants mais il n'a remis depuis lundi que neuf dépouilles d'otages sur les 28 qu'il retient. Il affirme avoir remis les corps auxquels il a pu accéder et avoir besoin d'un "équipement spécial" pour récupérer les autres dépouilles.

"Nous sommes déterminés à obtenir le retour de tous les otages", a dit M. Netanyahu lors de la commémoration officielle du 2e anniversaire de l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien, qui avait déclenché la guerre.

"Le combat n'est pas encore terminé, mais une chose est claire: quiconque lève la main sur nous sait qu'il paiera un prix très lourd", a-t-il averti.

La veille, son ministre de la Défense Israël Katz a prévenu que "si le Hamas refuse de respecter l'accord, Israël, en coordination avec les Etats‑Unis, reprendra les combats et agira pour une défaite totale" du mouvement.

Le Forum des familles d'otages a appelé le gouvernement Netanyahu "à cesser immédiatement la mise en œuvre de toute autre étape de l'accord, tant que le Hamas continue de violer ouvertement ses obligations" sur le retour de toutes les dépouilles.

"Ils creusent" 

Interrogé sur le respect de l'accord par le Hamas, le président américain Donald Trump a déclaré: "ils creusent. Ils trouvent beaucoup de corps."

"Certains de ces corps sont là depuis longtemps, et certains sont sous les décombres. Ils doivent déblayer les décombres. Certains sont dans les tunnels", a-t-il ajouté.

Dimanche, la porte-parole du gouvernement israélien Shosh Bedrosian avait indiqué qu'un "organisme international", convenu dans le cadre de l'accord, aiderait "à localiser les otages (morts) s'ils ne sont pas retrouvés et libérés" lundi.

En échange du retour des dépouilles de captifs, Israël a remis au total 120 corps de Palestiniens, dont 30 jeudi à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.

L'accord de cessez-le-feu a été conclu sur la base du plan de Donald Trump qui vise à mettre fin définitivement à la guerre dans la bande de Gaza.

Il prévoit dans une première phase le cessez-le-feu, la libération des otages, un retrait israélien de secteurs de Gaza et l'acheminement de plus d'aides humanitaires au territoire palestinien dévasté.

L'accord prévoit dans une étape ultérieure notamment le désarmement du Hamas et l'amnistie ou l'exil de ses combattants et la poursuite des retraits israéliens dans Gaza, des points qui restent sujet à discussion.

Israël, qui contrôle tous les accès à la bande de Gaza, doit en principe ouvrir après le cessez-le-feu et la libération des otages, le point de passage crucial de Rafah, entre l'Egypte et le territoire palestinien, à l'aide humanitaire.

Les autorités israéliennes ont affirmé que la date d'ouverture du passage de Rafah serait annoncée "ultérieurement" et que ce serait pour la "circulation des personnes uniquement".

"Pas d'eau, pas de nourriture" 

Le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher, a prévu de se rendre jeudi au passage de Rafah, côté égyptien, après avoir appelé à ouvrir "tous les points de passage" à l'aide.

Fin août, l'ONU a déclaré une famine dans plusieurs zones de Gaza, ce que conteste Israël.

Israël autorise actuellement l'acheminement de l'aide humanitaire essentiellement via le passage de Kerem Shalom (sud), mais les organisations humanitaires se plaignent des lenteurs administratives et des contrôles de sécurité.

De retour dans les ruines de leurs maisons à Gaza-ville, plusieurs habitants installent des tentes ou des abris de fortune au milieu des décombres, selon des images de l'AFP.

"Nous sommes jetés à la rue. Il n'y a pas d'eau, pas de nourriture, pas d'électricité. Rien. Toute la ville de Gaza a été réduite en cendres", déclare Mustafa Mahram.

L'attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.221 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l'AFP à partir de données officielles.

La campagne de représailles israélienne a fait 67.938 morts à Gaza, en majorité des civils, selon les chiffres du ministère de la Santé du Hamas.