NEW YORK : Les géants américains du numérique, qui font la pluie et le beau temps à Wall Street, publieront la semaine prochaine leurs résultats trimestriels sur fond de résilience face à la pandémie et de pression politique accrue, à quelques jours de l'élection présidentielle du 3 novembre.
Le marché voudra savoir quelle attitude ces groupes comptent adopter face aux régulateurs qui les accusent d'être devenus trop puissants, à commencer par Google, désormais visé par une plainte du gouvernement américain pour abus de position dominante.
Apple, Alphabet (maison mère de Google), Amazon et Facebook dévoileront simultanément jeudi, après la clôture de la place new-yorkaise, leurs chiffres d'affaires et leurs bénéfices de juillet à septembre.
Avec Microsoft, qui publiera ses résultats mardi soir, ces cinq mastodontes, omniprésents dans des domaines aussi variés que le commerce en ligne, la vie professionnelle ou les jeux vidéo, pèsent ensemble plus de 7 000 milliards de dollars en Bourse.
Pour Daniel Ives de Wedbush Securities, cette salve de bilans financiers sera cruciale pour Wall Street, qui tentera alors d'évaluer "comment ces piliers de la tech s'en sortent dans le contexte du Covid et des semi-confinements."
« Est-ce que leurs résultats et leurs perspectives seront suffisants pour permettre aux titres de poursuivre leur progression, ou représenteront-ils une alerte pour les investisseurs ? », s'interroge l'expert.
Si le rythme de croissance des actions des GAFA (acronyme de Google, Amazon, Facebook et Apple) et de Microsoft a ralenti au troisième trimestre par rapport à la période faste d'avril-juin, ces groupes continuent de donner le la aux grands indices boursiers.
Les milieux d'affaires seront attentifs aux recettes publicitaires de Google et de Facebook, qui représentent l'essentiel des revenus de ces groupes.
Ils tâcheront notamment d'estimer l'impact de la campagne de boycott de Facebook, qui a vu plus de 1 000 annonceurs suspendre leurs publicités sur la plateforme en juillet pour protester contre la diffusion de contenus haineux et le laxisme du réseau social.
Pour Amazon et Microsoft, l'accent sera mis sur la performance des activités du « cloud » ou informatique à distance, un secteur en plein essor dans lequel les deux compagnies ont lourdement investi ces dernières années.
« Va-t-on observer un tassement ou la pandémie fait-elle en sorte que le cloud est de plus en plus utilisé ? », se demande Gregori Volokhine de Meeschaert Financial Services.
La croissance des ventes en ligne d'Amazon et les ambitions de Microsoft pour sa prochaine gamme de consoles Xbox Series, qui sera lancée le 10 novembre, seront aussi scrutées.
Pour Apple, qui a récemment présenté ses nouveaux iPhone, compatibles avec la technologie 5G, les recettes liées aux smartphones et aux différents produits et services serviront de principal référent.
Poursuites
La réaction des Gafa aux accusations politiques et aux actions judiciaires à leur encontre fera également l'objet de toutes les attentions.
Le ministère de la Justice et 11 Etats américains ont lancé en début de semaine des poursuites contre Google pour abus de position dominante dans ses services généraux de recherche et ses services de recherche publicitaire.
« Etant donné la nature de ce procès, les risques liés à la réglementation seront à observer de près, notamment la façon dont l'entreprise va y répondre » suivant ses résultats, estime JJ Kinahan, responsable de la stratégie marché pour TD Ameritrade.
Facebook n'est pas épargné par les régulateurs américains : son PDG Mark Zuckerberg devrait prochainement être entendu, aux côtés de celui de Twitter, Jack Dorsey, par le comité judiciaire du Sénat.
MM. Zuckerberg, Dorsey et Sundar Pichai, le patron de Google, seront aussi auditionnés le 28 octobre, soit à la veille des résultats, par le comité sur le Commerce du Sénat sur la Section 230 du « Communications Decency Act », une loi controversée relative à la liberté d'expression sur Internet et à la responsabilité des grandes plateformes.
Face à cette myriade d'accusations, les GAFA cherchent à lisser leur image, insistant notamment sur le rôle bénéfique que leurs solutions apportent à des millions d'utilisateurs dans le monde, contraints de travailler de chez eux et de limiter leurs déplacements.
Ils ont par ailleurs augmenté leurs dépenses de lobbying au cours du troisième trimestre.
Facebook a déboursé près de 5 millions de dollars pour financer des groupes de pression politiques, une hausse de 1,5% par rapport au trimestre précédent. Google a fait grimper ses contributions de plus de 14%, à 1,9 million de dollars.