TUNIS : Une quarantaine d'intellectuels tunisiens ont lancé samedi une pétition appelant à juger le député tunisien qui a justifié l'assassinat de l'enseignant français Samuel Paty en qualifiant l'atteinte au prophète musulman de « plus grand des crimes ».
« Vanter les mérites de la décapitation du professeur Samuel Paty en public, comme châtiment divin, sur les réseaux sociaux, est une forme d'assassinat indirect », ont estimé les signataires de ce texte « contre l'apologie du terrorisme » publié sur la plateforme Change.org.
Pour la plupart des universitaires ou des artistes, dont l'historienne Sophie Bessis ou l'ex-ministre Kamel Jendoubi, ils ont appelé les autorités tunisiennes à « donner suite à l'enquête décidée par le Parquet » et à lever l'immunité du député afin qu'il soit traduit en justice.
Samuel Paty, professeur d'histoire de 47 ans, a été tué le 16 octobre à la sortie de son collège près de Paris pour avoir montré à ses élèves des caricatures du prophète de l'islam Mahomet lors d'un cours sur la liberté d'expression. Cette attaque a suscité émotion et effroi en France.
Le lendemain de cet assassinat, le député tunisien Rached Khiari --indépendant mais élu sous la bannière du mouvement islamiste Karama, membre de la coalition gouvernementale-- a écrit sur Facebook: « Toute atteinte au prophète Mahomet est le plus grand des crimes. Tous ceux qui le commettent (...) doivent assumer ses retombées ».
La police a ouvert une enquête préliminaire dans la foulée mais aucune enquête judiciaire n'a été ouverte pour le moment.
Le pôle judiciaire « a chargé une brigade spécialisée dans les affaires de terrorisme d'enquêter sur le contenu du message posté » sur Facebook, a indiqué à l'AFP Mohsen Dali, substitut du procureur général au tribunal de première instance de Tunis, le 19 octobre.
« Le discours de justification du terrorisme est lui-même une des formes abjectes de terrorisme », ont souligné les signataires de la pétition.
La société tunisienne connaît de profonds clivages concernant la religion. La révolution de 2011 dans le pays a consacré la liberté de conscience et de croyance, inscrites dans la Constitution de 2014.
De nombreux Tunisiens ont partagé ces derniers jours sur les réseaux sociaux des messages appelant à davantage de respect pour le prophète Mahomet, tandis que d'autres soulignaient l'importance de défendre la liberté d'expression y compris en matière de religion.